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mardi, 08 janvier 2008

"The world must be made safe for democracy"

1b7e949201c2abdd11f45ca52375b8e0.jpgIl y a 90 ans, le 8 Janvier 1918, le président américain Thomas Woodrow Wilson énonce, dans un discours retentissant, un programme en Quatorze Points pour mettre fin à la Grande Guerre.

Désormais il n'est plus seulement l'homme qui apporte à l'Europe le concours américain, il devient l'organisateur de la paix de demain, celui qui tiendra une place primordiale dans la reconstruction des relations internationales.

Déçu par l'attitude des nations en guerre, il récuse l’idée d’une diplomatie fondée sur l’équilibre des puissances qu’il considère comme la marque même de la décadence européenne, et veut mettre en place un nouvel ordre international fondé sur des appréciations morales et juridiques et non plus sur des considérations géopolitiques, un "nouveau monde" capable d'éviter les guerres.

S'alliant aux courants libéraux, il se pose donc en promoteur d'une diplomatie ouverte et propose la création d'une Société des Nations (premier et dernier points de son discours) en relation avec un libéralisme économique : liberté des mers et limitation des barrières douanières, réduction des armements nationaux (troisième et quatrième points). En héritier des "Pères fondateurs" des Etats-Unis, il consacre plusieurs points de son projet au droit des peuples colonisés de disposer d'eux-mêmes, ou aux tracés de frontières "selon les limites des nationalités", ce qui provoquera des différends avec les Anglais, les Français et les Italiens qui avaient, dès le Traité de Londres, établi un plan de partage de l'empire ottoman et sont bien décidés à se partager les anciens territoires coloniaux et zones d'influences allemandes.

Mais dans l'ensemble, la presse française témoigne son approbation, les uns parce qu'ils sont persuadés que le président Wilson vient d'annoncer un monde nouveau, débarrassé du fléau de la guerre, les autres parce qu'ils croient que le généreux programme américain ne sera appliqué qu'après le succès des armées alliées, tous parce qu'ils ont surtout retenu du message présidentiel le point 8, celui qui a trait à l'Alsace-Lorraine.

Mais le gouvernement français craint que ce programme ne renforcer l'opposition à la politique du cabinet Clemenceau. En effet, les journaux socialistes approuvent le président américain avec enthousiasme.: "Ce sera l'honneur du président Wilson d'avoir, par ses messages répétés, obligé les nations de l'Entente à conformer leurs aspirations nationales à la justice." (Albert Thomas dans l'Information). La presse modérée s'inquiète: "Les socialistes et quelques autres penseurs prétendent nous imposer (...) la Société des Nations comme une chose révélée, échappant par là à la discussion et au doute." (Alfred Capus dans le Figaro). Et Paris invite discrètement le président Wilson à ne pas manifester des sympathies excessives à l'égard des socialistes et à soutenir la politique de Clemenceau. Entre le président du Conseil et le président des États-Unis des rapports complexes s'établissent. La France a besoin des troupes, du matériel, des dollars des États-Unis pour faire la guerre. L'Amérique, même si elle préfère Albert Thomas à Clemenceau, ne veut pas être le champion des mouvements révolutionnaires. Le réalisme les pousse donc à s'entendre ...

Certains points du programme de Thomas Woodrow Wilson serviront de base au Traité de Versailles de 1919. Mais Woodrow Wilson commet l’erreur de se rendre personnellement en France pour négocier le traité de paix et s’enlise dans des considérations assez éloignés de l’idéalisme affiché des 14 points. Au total, le Traité de Versailles aboutit aux objectifs inverses que souhaitait remplir Wilson. L’Allemagne se vit infliger d’importantes sanctions territoriales (perte de 13% de son territoire et de ses colonies), une sévère restriction militaire (une armée de 100.000 hommes avec une marine symbolique) et d’importantes compensations économiques. Et il réussit paradoxalement à renforcer le rôle géopolitique de l’Allemagne par la création d’une multitude d’Etats dont la puissance était insuffisante pour contenir les ambitions renaissantes de l’Allemagne.

Paradoxe : le Congrès des États-Unis refusera de signer ce traité ainsi que d'entrer dans la Société des Nations, certains de ses membres faisant ainsi payer à Wilson son refus de soutenir la cause indépendantiste du Sinn Fein irlandais.

 

 

Résumé des Quatorze Points :

I. Traités de paix conclus lors de négociations en pleine lumière, afin de mettre un terme à la diplomatie secrète.

II. Liberté de navigation sur les océans, à l'extérieur des eaux territoriales, à l'exception des zones fermées dans le cadre de l'application de traités internationaux.

III. Abolition, autant que possible, de toutes barrière douanières et l'instauration de conditions de commerces équitables au sein de toutes les nations consentantes à la paix et associés en vue de la préserver.

IV. Garanties que chaque nation s'engagera à réduire l'armement national au niveau le plus bas possible, compte tenu des exigences de leur sécurité domestique.

V. Règlement des conflits coloniaux, respectant le bien-être des populations concernées aussi bien que l'intérêt des nations colonisatrices.

VI. Évacuation des territoires russes occupés et règlement des questions relatives à la Russie favorable à son auto-détermination politique et à son insertion dans la société des nations libres.

VII. La Belgique devra être évacuée et retrouver son entière souveraineté.

VIII. Évacuation et rétablissement de tous les territoires français occupés, retour de l'Alsace-Lorraine à la France.

IX. Rectification des frontières italiennes sur une base nationaliste.

X. Autonomie des peuples composant l'Empire austro-hongrois.

XI. Évacuation de la Roumanie, de la Serbie et du Monténégro et restitution des territoires occupés; libre accès à la mer pour la Serbie; rectification des frontières dans les Balkans pour favoriser les aspirations nationales et historiques.

XII. Souveraineté pour la portion turque de l'Empire ottoman ; autonomie des états non-turcs ; liberté de passage dans le Bosphore et les Dardanelles.

XIII. Création d'un état polonais indépendant, avec libre accès à la mer.

XIV. Création d'une Société des Nations assurant l'indépendance politique et l'intégrité des États petits et grands.

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