jeudi, 11 janvier 2007
Un chien est mort
Mon chien est mort.
Je l'ai enterré au jardin
près d'un vieil engin sous la rouille.
Là, ni plus bas, ni plus haut,
un jour il me retrouvera.
Pour le moment
il est parti avec son poil,
avec ses airs mal élevés et son nez froid.
Et moi qui ne crois pas, matérialiste,
au ciel promis, au ciel céleste pour aucun homme quel qu'il soit
pour ce chien ou tout autre chien je crois au ciel,
oui, je crois en un ciel
où je n'entrerai pas,
mais où il m'attend lui en agitant la queue
ainsi qu'un éventail
pour qu'à mon arrivée
l'affection m'y accueuille.
Ah je ne dirai pas ma tristesse ici-bas
celle d'avoir perdu un brave compagnon,
car il ne fut jamais pour moi un serviteur.
Il eut à mon égard une amitié de hérisson
gardant sa suzeraineté,
une amitié d'étoile indépendante
sans autre intimité que celle nécessaire,
sans exagérations:
il ne grimpait pas sur mon linge
me couvrant de poils ou de gale,
il ne se frottait pas à mes genoux
comme les obsédés sexuels à quatre pattes.
Non, mon chien, lui, me regardait
m'accordant l'attention dont j'ai besoin,
l'attention nécessaire
pour faire comprendre à un vaniteux
que dans sa condition de chien,
avec ces yeux-là,
plus purs que les miens,
il perdait son temps,
pourtant il me regardait de ce regard
que m'avait réservé toute sa douce vie poilue,
sa vie de silencieux, près de moi,
sans jamais m'importuner ni rien me demander.
Ah!que j'ai regretté souvent de n'avoir pas de queue
pour vagabonder avec lui sur les rivages,
l'Hiver, à l'Ile-Noire, dans la solitude infinie :
là-haut, l'espace est traversé d'oiseaux glacials
et mon chien bondit, hirsute,
chargé d'un voltage marin plein de mobilité :
mon chien errant et renifleur qui arbore sa queue dorée
face à face avec l'Océan et son écume.
Joyeux, joyeux,
joyeux comme les chiens savent être heureux,
sans plus d'histoire, avec le naturel tout-puissant de l'effronterie.
Il n'y a pas d'adieu pour mon chien disparu.
Il n'y a, il n'y eut de mensonges entre nous.
Il est mort, je l'ai enterré.
Voilà, c'est tout.
Pablo Neruda, la rose détachée, traduction de Claude Couffon.
18:07 Publié dans Elise, poèmes | Lien permanent | Commentaires (3) | Facebook |
dimanche, 16 juillet 2006
" Les yeux des bêtes sont remplis des choses qu'elles ne peuvent pas dire. " (suite)
Elise a toujours été "ma" chienne, Duke, lui, avait choisi Michel avec lequel il adorait faire de longues balades dans les bois de Maincourt, mais moins d'un an après notre déménagement, un nouveau cancer eut raison de son maître. Les chiens "sentent" les choses : quand mon mari était en bonne santé, Duke lui sautait violemment dessus pour exprimer sa joie, et pourtant il ne le fit plus jamais à partir du moment où il vit son maître amaigri et engoncé dans un corset au retour de l'hôpital. Après la disparition de Michel, Duke resta couché derrière la porte d'entrée pendant une semaine, puis après m'avoir regardée, vint un soir se coucher sur mes pieds. A partir de cette nuit là, les deux chiens vinrent dormir sur mon lit, Elise la tête sur mon oreiller, Duke sur mes pieds. Et lorsque nous eûmes un chat, Chipie dormit elle aussi avec nous, entre les pattes d'Elise. Qui a dit que les chiens et les chats ne s'entendent pas ?
Chipie est arrivée à la maison en 92, à l'age de 2 mois. Duke était impressionné par cette petite boule de poils, mais Elise l'adopta immédiatement et la poursuivait dans toute la maison avec une idée fixe, lui sentir les fesses, sans doute pour vérifier d'où elle venait et qui elle avait vu !!!. Les premiers jours chipie avait une trouille bleue, et se réfugiait dans les classeurs dans mon bureau, mais au bout d'une semaine elle comprit qu'on ne lui voulait aucun mal et se laissa approcher. Il fallut pourtant la séparer d'Elise qui la léchait copieusement. Je me souviens de la première fois où ma chatte partit faire un petit tour dehors, Elise l'attendait à côté de la chatière, et à son retour lui donna une rouste pour lui expliquer à sa manière qu'elle était inquiète. La semaine suivante, Chipie miaulait devant l'évier où je préparais sa gamelle car elle était encore trop petite pour sauter; eh bien Elise mit son museau entre ses pattes avant et ses pattes arrière, et la monta tout d'un coup sur l'évier. Nous étions tous soufflés !!!
05:10 Publié dans Elise | Lien permanent | Commentaires (1) | Facebook |
jeudi, 29 juin 2006
" Les yeux des bêtes sont remplis des choses qu'elles ne peuvent pas dire. " (suite)
C'est l'arrivée d'Elise en mai 90 qui a bouleversé notre vie : elle avait dû être abandonnée lâchement par ses propriétaires dans les bois de saint Cucufa où nous allions promener Duke, son tatouage avait manifestement été effacé volontairement, mais avec un peu d'astuce nous avions réussi à retrouver ses maîtres qui résidaient à l'autre bout de l'Ile-de-France. Mais ils prétendaient qu'ils l'avaient donné quelques jours avant à un inconnu! Bref, Elise est restée avec nous … Duke qui aboyait chaque fois que nous partions devint silencieux, les voisins ne râlaient plus, mais deux chiens dans un appartement, ce n'était plus tenable, alors nous avons décidé de déménager pour une maison, mon beau père avait décidé de vendre notre maison du Var et de régler la succession de ma belle mère, ce petit pactole nous en donnait l'occasion.
La maison que nous avions achetée, et que j'habite toujours, est située dans une résidence "à l'américaine", avec des jardins non clos au milieu de vastes parties communes. Heureusement une tolérance nous permet de clôturer l'arrière des terrains car tout de suite Duke et Elise avaient décidé de "faire le ménage" sur leur territoire en chassant tous les chiens des alentours. Dès le premier week-end nous embauchions donc tous nos copains pour installer un grillage et planter quelques arbustes pour le dissimiler au maximum. Mais dès le lendemain Elise détricotait un bout de grillage, faisait le tour de la maison et après une petite ballade, venait gratter à la porte d'entrée. Jour après jour nous avons dû retricoter le bas de la clôture, dresser de vrais barrages de planches, de plantes piquantes etc. … Elise semblait nous dire "je sors et je rentre quand je veux!" Duke essayait de la suivre, mais chaque fois il accrochait ses longs poils et se blessait, il renonçât vite! Ce manège dura tout l'été, et finalement l'hiver eut raison de son humeur vagabonde, elle préféra rester au chaud et l'année suivante elle avait oublié ses fugues.
Elise est moitié husky et moitié berger allemand, chaque fois que nous rencontrions des enfants, ils la prenaient pour un loup et elle devint vite leur mascotte. Elle était ravie car elle adorait leurs caresses. Elle en profitait pour littéralement les "débarbouiller" à coups de langue, ce qui ne plaisait pas à tous les parents !
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dimanche, 30 avril 2006
" Les yeux des bêtes sont remplis des choses qu'elles ne peuvent pas dire. "
Elise va avoir 16 ans 1/2; un age canonique pour une chienne de sa taille. Duke, son vieux compagnon a lui aussi vécu plus de 16 ans avant de mourir d'une crise cardiaque il y a un peu plus d'un an. Ma maison doit être bonne pour la gente canine …
Mes nièces ont donc essayé la semaine dernière de me persuader de leur réserver un petit de Vanille, leur chienne labrador. Le père est lui aussi un champion et avec de tels parents je ne risque donc pas de dysplasie des hanches ou de tare oculaire. Mais non, pas question … j'adore les chiens, surtout les gros, mais basta, je vais souffler un peu après Elise !
Et puis comment contraindre ma "petite vieille" percluse de rhumatisme à supporter les bousculades d'un chiot plein d'énergie qui viendra sans cesse lui sauter dessus pour jouer, alors qu'elle doit souvent bander tous ses muscles pour arriver à se mettre debout, ses pattes flageolant pendant quelques secondes comme on le voit faire par un jeune veau qui se met debout pour la première fois, et sa grande queue lui servant de balancier pour ne pas tomber.
Après la mort de Duke, mon lit était devenu sa tanière et elle y passait pratiquement toutes ses journées à somnoler. Mais dès qu'elle entendait ma clé dans la serrure, elle se précipitait pour m'accueillir. Mais peu à peu, monter et descendre les escaliers était devenu une épreuve, surtout le matin quand les muscles sont engourdis, et je la voyais tourner en rond pendant de longues minutes avant de se lancer. Et puis, un jour, fini, elle avait décidé que ce n'était pas possible, qu'il valait mieux rester en bas plutôt que de prendre trop de risques! Depuis, elle ne quitte plus le canapé …
Comment lui imposer aussi un jeune compagnon glouton qui lorgnera sur sa gamelle alors qu'elle aime maintenant prendre son temps pour manger et attendre d'être bien sure que je ne vais pas lui donner quelque reste de mon assiette pour se décider à attaquer sa gamelle. Quand nous allons à Bordeaux, elle préfère d'ailleurs ne pas manger pendant quelques jours plutôt que d'engloutir sa gamelle pour éviter que Vanille et des 2 chats ne la lui chipent!
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