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samedi, 12 mars 2011

Pétronille

 

Scan20002_2.jpg

 

 

Je suis une petite fille

Mais je mets des pantalons.

J'ai beau m'appeler Pétronille

J'aime mieux etre un garçon.

 

Quand la crémiere m'interpelle

« Bonjour ma petite demoiselle »

Expres je lui réponds

« Bonjour M'sieur Potiron. »

 

Quand le boucher s'écrie

« Qu'est-ce que veut aujourd'hui Ma petite escalope ? »

Je fronce les sourcils

Et lui dis : « Du persil, Mademoiselle Pénélope. »

 

Ça crée la confusion.

 

J'ai beaucoup d'caractère

Beaucoup de formation

 

Et sous mes petits airs

Se cache un grand garçon

 

Je n'aime pas les filles

Aux réflexes sanguins

Moites sous les charmilles

Et pâles dans les trains.

 

Quand on est un garçon

On siffle dans ses doigts

On est Ali-Baba

On grimpe sur les toits.

 

On s'en va sur les mers

Où y'a plein de moutons.

On vole dans les airs

Avec les électrons.

 

Et devant ces exploits

Tout l'monde reste baba.

 

« Non Maman, pas ma robe, je veux mon pantalon

Ma ceinture de cuir, mon colt, mes munitions

Je vais faire un hold-up

A Plessis-Robinson. »

 

René de Obaldia

Innocentines

mardi, 08 mars 2011

MOI, CHRISTINE, QUI AI PLEURÉ

BL-pizan2.jpgChristine de Pisan (Venise vers 1363 -  vers 1430) est la première femme à vivre de sa plume.

Christine de Pizan est née à Venise, vraisemblablement en 1364. Son père, Tommasso di Benvenuto, originaire de Pizzano, près de Bologne, a étudié la médecine dans cette ville et y a enseigné l’astrologie, avant de devenir conseiller de la république de Venise. Peu après la naissance de Christine, il est appelé à Paris par Charles V comme médecin et astrologue. Très en faveur auprès du roi qui rétribue largement ses services, il fait venir sa famille d’Italie vers 1368. Christine reçoit de lui une instruction plus poussée qu’il n’était d’usage, jusqu’à son mariage, en 1379 ou 1380, avec Étienne du Castel, secrétaire du roi. La mort de Charles V, en 1380, affecte gravement la position de Thomas: il meurt dans la gêne vers 1387. Le mari de Christine s’éteint peu après, à l’automne 1390.

Veuve à 25 ans, Christine de Pisan reste seule avec sa mère et ses trois enfants, aux prises avec des débiteurs indélicats, en butte aux attaques des créanciers qui veulent lui enlever les biens hérités de son père, Thomas di Pizzano, et de son mari, Étienne de Castel. Elle se bat courageusement, défend sa famille, et réussit à éviter la ruine complète.

"Je suis veuve, seulette et noir vêtue

A triste vis simplement affublée ;

En grand courroux de manière adoulée

Porte le deuil très amer qui me tue.

De triste coeur, chanter joyeusement

Et rire en deuil, c’est chose forte à faire."

Christine de Pisan ne perd pas courage. Dès la mort de son père, elle cherche à se créer des ressources par ses talents. Le succès des poésies légères qu'elle a composées avec facilité la persuade de s'essayer à des écrits plus sérieux. Mais avant de rien entreprendre, elle se remet, pendant plusieurs années à l'étude des meilleurs auteurs anciens et modernes, qu'elle lit dans leur langue. "Tu ne dois pas te tenir pour malheureuse quand tu as, entre autres biens, une des choses du monde qui te cause le plus de délices et de plaisirs, c’est assavoir le doux goût de science." Ecrit-elle, ou encore "Ce n’est pas à la faiblesse de son esprit, mais à son manque d’instruction que la femme doit son infériorité."

A l’exception des lettres d’Amour d’Héloïse, de quelques oeuvres de nonnes érudites, les ouvrages littéraires écrits par des femmes sont rares. On peut donc dire que Christine de Pisan a été en France la première des femmes savantes et des femmes auteures. C'est d'ailleurs grâce à ses œuvres, riches en confidences autobiographiques, que son existence passablement mouvementée et son parcours littéraire sont relativement bien connus en France. Sa production est considérable. Elle en fait le bilan en 1405, dans le Livre de l’advision : "Depuis l’an 1399 que je commençai jusqu’à cette année 1405 auquel encore je ne cesse, j’ai compilé quinze volumes principaux sans les autres petits dictés, lesquels tout ensemble contiennent environ soixante-dix cahiers de grand volume."

Mais quoique ses diverses productions fussent toujours aussi bien accueillies par la cour et les lettrés, elles suffisent à grand-peine à la subsistance de la famille de Christine de Pisan. Heureusement, elle a nombre de mécènes pour qui elle compose poèmes, éloges et panégyriques. On rapporte aussi que Henri IV d'Angleterre lui offrit de se fixer à sa cour; mais elle ne se laisse pas séduire, et elle préfère rester avec peu d'aisance en France. Mais le premier poème de Christine, l’Épître au dieu d’Amour, écrit en 1399, sera traduit outre-Manche, dès 1402, par Thomas Occleve, lui-même auteur de renom.

pisan_cité dames.jpgEn 1399, le maréchal Jean II Le Maingre (en vieux français , Jehan le Meingre), appelé Boucicaut, fonde l'ordre de chevalerie L'Ecu vert à la Dame blanche un ordre chevaleresque inspiré par l'idéal de l'amour courtois dont la vocation est la défense des femmes. L'année suivante, le duc de Bourgogne, Philippe le Hardi, préside à la création de la fameuse "cour d'Amour" qui débat de casuistique amoureuse et se réunit à la Saint-Valentin pour un tournoi poétique en l'honneur des dames. Au même moment, en 1399, Christine se lance dans la polémique littéraire pour défendre les femmes, qui s'achèvera en 1405 par la rédaction de deux traités, la Cité des dames, suivi du Livre des Trois Vertus (ou Trésor de la Cité des Dames), véritable cours d'éducation à l'usage des femmes où la "dame" est une femme dont la noblesse est celle de l'esprit plutôt que de la naissance. Christine y fait une analyse lucide et précise de la société française, vue du côté féminin, détaillant tous les "états des femmes" et donnant de chacun, depuis celui des princesses jusqu’à celui des femmes de laboureur, une vision réaliste et positive. La première, elle a compris que les femmes ont une place à elles dans la société politique, et avec l'aide de Dame Raison, Droiture, Justice, elle veut construire la Cité imprenable où les femmes seront à l'abri des calomnies

Dans ces ouvrages la narratrice veut combattre les clichés qui circulent sur les femmes et leur infériorité "naturelle", en particulier dans des œuvres misogynes et cyniques comme la seconde partie du Roman de la rose (entre 1275 et 1280) de Jean de Meung, qui s’avère l’antithèse de la première partie écrite par Guillaume de Lorris (vers 1245). La quête amoureuse de la première partie a complètement disparu, en revanche, le mépris de la Femme y est ouvertement affiché et Christine de Pisan estime qu'on est passé d’un culte raffiné de la femme à la conception grossière qui va peu à peu faire d’elle un objet.: "Toutes êtes, serez et fûtes/De fait ou de volonté putes" écrit-il !

Christine de Pisan, qui connaît le latin, a aussi lu Les Lamentations de Matheolus, où l'auteur Matthieu de Boulogne-sur-Mer (vers 1260 – vers 1320) présente sa femme Péronnelle (eh oui, ce serait l'origine du mot ...) sous un jour très noir. Ces œuvres la remplissent d’horreur pour elle-même, "et pour le sexe féminin dans son entier, comme si nous étions des monstres de la nature". Jean Le Fèvre, officier au parlement de Paris qui a traduit les Lamentations de Matheolus, s'est lui aussi insurgé contre les propos misogynes, fréquents dans la littérature et a écrit Le Livre de leesce, sorte d'apologie de ce sexe que l'on dit faible, et qui présente pour la première fois Neuf Preuses,

 

christine_disput_harl4431.jpgLa Cité des dames n’est d'ailleurs pas le premier texte féministe de Christine de Pisan ; elle a déjà rédigé quelques années auparavant une Epistre au Dieu d’Amours (1399), une protestation contre les habitudes discourtoises de la société devenue misogyne, et une tentative de réhabilitation de la Femme comme un être moral : "Que les femmes aient de tels vices je le nie ; Je lève les bras pour les défendre …", et un Dit de la rose (14 février 1401, anc. st.), critique justement de la seconde partie du Roman de la rose, ce qui provoque, entre 1401 et 1405, un "débat sur le Roman de la Rose" avec des secrétaires du roi, Jean de Montreuil, prévôt de Lille, et Gontier Col, secrétaire et conseiller du roi, et des clercs, Pierre Col, frère du précédent et chanoine de Paris et Jean Gerson, chancelier de l'université de Paris.

De ce "débat", on peut citer une lettre de Christine de Pisan adressée à Jean de Montreuil. La lettre répond à l’éloge du Roman de la Rose de Jean de Meung que Jean de Montreuil a écrit et fait circuler dans un petit traité aujourd’hui perdu, Opusculum gallicum. La correspondance qui en résulte provoque le premier débat épistolaire connu dans le monde littéraire français! Prenant le contre-pied de Montreuil, Christine attaque méthodiquement le Roman de la Rose de Jean de Meung comme un ouvrage immoral, misogyne et obscène, l'accusant d'enseigner les moyens de séduire les femmes sous le couvert d'un art d'aimer ... "Une honnête femme est aussi rare qu’un cygne noir" écrit Jean de Meung ! "Le talent de Christine de Pisan aidant, écrit Jean Favier dans sa Guerre de Cent Ans (où Christine n’est citée que trois fois ...), tout Paris se passionnait pour la grande querelle soulevée autour des thèses de l’antiféminisme clérical et du cynisme sentimental formulé au XIIIe siècle par le vieux Roman de la Rose. On était pour le Roman […] ou bien on était contre cette satire acerbe du naturel féminin qui avait fait la joie de générations d’hommes et particulièrement de clercs. Dans son Épître au dieu d’amour, Christine de Pizan se fit, en 1399, la théoricienne d’un équilibre entre les élans du cœur et le plaisir des sens."

querelle.jpgJean de Montreuil obtient le soutien de son collègue Gontier Col qui attaque vivement Christine dans deux épîtres lui demandant ouvertement de retirer ses affirmations qui, d'après lui, constituent une insulte à la plus grande œuvre littéraire contemporaine. "Folle outrecuidance. Parole trop tôt issue sans avis de la bouche d'une femme", s'écrie Pierre Col, le frère de Gontier. Jean de Montreuil, lui, menace : "Si tu continues à mal parler, sache qu'il y a des champions et des athlètes". Dans le débat, Christine peut compter sur l'appui de Jean de Gerson, auteur d'une Vision contre le Roman de la Rose, de Eustache Moel dit Deschamps, conseiller de Louis d'Orléans, de Guillaume de Tignonville, prévot de Paris, mais aussi de la Reine Isabeau de Bavière à qui elle a fait parvenir une lettre lui demandant son soutien. Quelques années plus tard, Mathieu Thomassin lui rendra hommage dans son Registre Delphinal, Martin Le Franc ne tarira pas d'éloge dans son Champion des Dames (1442). Plus tard Jean Boucher composera Le Jugement poétique de l'honneur féminin et sejour des illustres claires & honnestes Dames (1538), et enfin Clément Marot se fera l'interprète des mêmes sentiments dans La vray disant advocate des Dames

La querelle s'apaise peu à peu. Dans sa dernière lettre à Pierre Col datée du 2 octobre 1402, elle annonce qu'elle se retire du débat : "Non mie tairé pour doubte de mesprendre quant a oppinion, combien que faulte d'engin et de savoir me toult biau stile, mais mieulx me plaist d'excerciter en autre matiere a ma plaisance" [Je ne me tais pas non plus par peur d'être calomniée à cause de mes opinions, bien que je manque d'intelligence et d'un beau style. Je souhaite simplement me tourner vers un sujet qui me plaît davantage.] Christine sent très clairement que le Débat est une perte de temps pour quelqu'un qui a des affaires plus importantes à traiter. Et Philippe Le Hardi, duc de Bourgogne, qui fait confiance à son talent et son jugement, lui demande en 1404 d’écrire le récit du règne son frère, le Livre des faits et bonnes moeurs du sage roi Charles V.

Mais si dans le Livre de Mutacion de Fortune (1403), Christine de Pisan avoue comment le destin, en la faisant devenir écrivain, l'a fait changer de sexe : "de femelle devins masle", elle n'oubliera cependant jamais qu'elle doit défendre, contre les injustices de la société masculine, la dignité de son sexe. Ainsi, en 1405, paraît le Livre de la Cité des Dames ...

1405 marque une rupture. La situation politique en France devient de plus en plus grave, lucide, Christine voit monter le péril de la guerre civile. Les misères du temps, ravagé par la Guerre de Cent ans, expliquent que Christine de Pizan, Italienne devenue Française, ait senti le besoin d’exprimer son patriotisme, en participant, grâce à ses œuvres, aux douleurs publiques : en 1405 le Livre de la Prudence, paraphrasé de Sénèque, et le Trésor de la cité des dames, également appelé le Livre des trois vertus, dédié à la jeune dauphine de France Marguerite de Bourgogne, et dans lequel elle attire l’attention des femmes sur les conflits perpétuels que les hommes se livrent dans leur royaume, en 1407, le Livre du corps de policie (le mot "policie" désignant celui de politique) emprunté d’Aristote et de Plutarque, en 1410 le Livre des fais d’armes et de chevalerie, traité de guerre traduit principalement de Végèce, de Frontin, mais renfermant toutefois une partie originale, un code du droit des gens dans la société féodale, et Lamentation sur les maux de la France, et en 1413 le Livre de la paix, tous ces ouvrages ont désormais un but, sauver la France des divisions.

Elle emploie aussi d’excellents artistes pour illustrer ses livres, dont un grand recueil de ses oeuvres qui est offert à la reine Isabeau de Bavière en 1414. Ce manuscrit des Œuvres de Christine de Pisan (Londres, British Library, Harley 4431) est l'un des plus somptueux, des plus connus et des plus étudiés parmi ceux qui ont été réalisés à Paris en pleine apogée de l'enluminure parisienne.

Images_Online_025354.jpgLa guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons conduit à l’intervention étrangère. Ainsi, en 1415, c’est la terrible bataille d’Azincourt. Christine écrit une Epître de la prison de la vie humaine, dans laquelle elle déplore les bouleversements de la guerre et le comportement des Anglais, qui massacrent leurs prisonnier. Christine de Pisan fuit Paris, occupé par le parti bourguignon allié aux Anglais, et se réfugie dans un couvent, probablement l’abbaye des dominicaines de Saint-Louis de Poissy où sa fille est religieuse et dont la sœur de Charles VII, Marie, est devenue prieure. Elle consacre alors la fin de sa vie à un ouvrage d'inspiration purement religieuse, Les Heures de contemplation sur la Passion de Notre Seigneur, un livre pour les femmes, accablées comme elle, par les maux du temps. Mais après la prise de Paris par les Bourguignons et le traité de Troyes, elle sort du silence et écrit Les Lamentations sur les maux de la guerre civile (1420) inspiré par l’actualité de la guerre de Cent Ans :.

Retirée depuis une dizaine d'années elle écrit son Ditié de la Pucelle, saluant l’épopée de Jeanne d’Arc qui venait de faire sacrer le roi (1429); ce sont les derniers vers qu'on a d'elle ... Christine de Pizan meurt en 1430.

 

jeanne arc.jpgEstimée des meilleurs écrivains de son temps, Christine de Pisan a joui jusqu’au début du XVIe siècle d’une grande réputation en France et dans plusieurs pays d’Occident, où certaines de ses oeuvres ont été traduites. Par la suite, elle plutôt maltraitée. Au XIXeme siècle, Gustave Lanson, historien de la littérature et critique littéraire, mais aussi témoin par excellence de la misogynie qu’il était de bon ton d’afficher à la fin du XIXe siècle, aura même ce jugement dans son Histoire de la littérature française : "Ne nous arrêtons pas à l’excellente Christine de Pisan, bonne fille, bonne épouse, bonne mère, du reste un des plus authentiques bas-bleus qu’il y ait dans notre littérature, la première de cette insupportable lignée de femmes auteurs, à qui nul ouvrage sur aucun sujet ne coûte, et qui pendant toute la vie que Dieu leur prête, n’ont affaire que de multiplier les preuves de leur infatigable facilité, égale à leur universelle médiocrité"

Certes elle n’a jamais été totalement oubliée, mais son œuvre est bien souvent réduite à la trop célèbre ballade Seulete sui et seulete veuil estre. Il faudra attendre Mathilde Laigle, l'une des premières bachelières françaises et également des premières femmes diplômées de l'enseignement supérieur américain et qui fut la première à avoir publié en 1912 une édition critique du Livre des Trois vertus de Christine de Pisan, Le livre des trois vertus de Christine de Pisan et son milieu historique et littéraire, pour qu'on commence à reconnaître timidement son intérêt historique et politique.

Mathilde Laigle écrit que "Les revendications qu'elle propose par le respect de l'usage, la pratique, les devoirs, le culte de l'honneur, tels qu'une femme sensée et vertueuse les concevait au XVe siècle. Il semble que l'antiféministe le plus convaincu ne pourrait que gracieusement s'incliner devant le féminisme de Christine de Pisan", mais ajoute que Christine de Pisan ne formule aucune des revendications que l'on pourrait à proprement appeler qualifier de féministes : "Le livre des Trois Vertus, tout attaché aux devoirs et non aux droits de la femme, ne porte aucune trace de ces timides protestations, et si Christine nourrissait quelques secrètes velléités de révolte contre le sort injuste réservé à ses sœurs, nous n'en savons rien. Elle n'en parle pas. La Cité des dames nous fournirait aussi bien son contingent d'idées anti-féministes.", ajoutant "Ce que Christine prêche, ce n'est pas le murmure, la rébellion contre les lois ou usages établis, c'est l'énergie personnelle, l'effort constant pour parer au mal : l'éviter, si possible, l'atténuer, si on ne peut l'anéantir, ou le subir avec courage, s'il est plus fort que la volonté humaine.". Pourtant les réactions à ses travaux sont parfois rudes : lors d'une conférence en 1912 à Strasbourg, Mathilde Laigle est interrompue par une personne de l'assistance qui lance à propos de Christine de Pisan : "Elle aurait mieux fait de se trouver un autre mari et de s'occuper des gamins" !

Il faudra donc attendre la seconde moitié du XXeme siècle, la naissance des sentiments féministes et le désir de réhabiliter la femme dans la littérature pour que son œuvre prenne vraiment place dans le milieu des études littéraires.

Certes si elle écrivait aujourd'hui, Christine de Pisan, soucieuse de sauvegarder les vertus féminines plus que de prôner liberté et émancipation, passerait pour une traîtresse à la cause féminine, prompte à ramper sous les fourches caudines du mâle ! En effet, si le discours de Christine de Pisan vise à préserver l'intégrité des femmes en tant que jeunes filles et jeunes femmes, il ne préconise pas vraiment une révolte par rapport à leur condition. Christine de Pisan encourage les femmes à se prendre en main afin de défendre et protéger leur honneur, les hommes n’en étant plus capables. Christine ne défend pas les femmes, mais leur honneur, la réalité de leurs capacités intellectuelles, de leur grandeur morale, de leur vertu. Jamais elle ne remet en cause la distribution des rôles des hommes et femmes dans la société. Il est donc délicat de la considérer comme féministe. Mais Christine de Pisan est surtout originale par le fait même qu'elle a pris la première la parole au nom des femmes, contre le flot de méchancetés que déversaient les écrivains de son temps, une position particulièrement inédite à l'époque, suffisamment provocatrice pour que nombre d'érudits l'aient aussitôt combattu.

En tous les cas, 550 ans avant le fameux "on ne naît pas femme, on le devient" de Simone de Beauvoir, Christine de Pisan attribue l'inégalité entre hommes et femmes non à la nature, mais à l'éducation et aux représentations d'elles-mêmes fournies aux femmes par le discours misogyne dominant.

 

Moi, Christine, qui ai pleuré

Onze ans en abbaye fermée,

Ou j'ai toujours demeuré depuis

Que Charles (c'est chose étrange !)

Le fils du roi, si j'ose rappeler ce souvenir,

S'enfuit de Paris, tout droit,

Par suite de la trahison là incluse :

Maintenant pour la première fois je me prends à rire.

 

L'an mil quatre cent vingt neuf

Recommença à luire le soleil ;

Il ramène le temps nouveau

Qu'on n'avait pas vu de l'oeil

Depuis longtemps ; dont plusieurs en deuil

Ont vécu. Je suis de ceux-là ;

Mais de rien je ne me chagrine plus,

Puisque maintenant je vois ce que je veux.

 

Qui vit donc chose advenir

Plus hors de toute atteinte,

Laquelle à noter et de laquelle se souvenir

Est bon en toute région :

C'est à savoir que France, de qui discours,

On faisait qu'à terre était renversée,

Soit par divine mission,

Du mal en si grand bien changée ?

 

Et cela par tel miracle vraiment

Que, si la chose n'était notoire

Et évidents le fait et la manière,

Il n'est homme qui pût le croire :

C'est une chose bien digne de mémoire

Que Dieu par une vierge tendre

Ait précisément voulu (c'est une chose vraie)

Sur la France si grande grâce étendre.

 

O ! Quel honneur à la couronne

De France se voit par divine preuve !

C'est par les grâces qu'il lui donne

Il paraît combien Dieu l'approuve

Et que plus de foi d'autre part il trouve

En la maison royale, dont je lis

Que jamais (ce n'est pas une chose nouvelle)

En la foi errèrent les fleurs de lis.

 

Toi, Jeanne, à une bonne heure née,

Béni soit celui qui te créa !

Pucelle de Dieu envoyée

En qui le Saint Esprit fit rayonner

Sa grande grâce ; et qui eus et as

Toute largesse en son haut don,

Jamais ta requête ne te refusa

Et il te donnera assez grande récompense...

 

Et sa belle vie, par ma foi !

Montre qu'elle est en la grâce de Dieu,

C'est pourquoi on ajoute plus de foi

A son fait ; car, quoi qu'elle fasse,

Toujours à Dieu devant la face,

Qu'elle invoque, sert et prie

En actions, en paroles ; en quelque endroit qu'elle aille,

Elle ne retarde pas ses dévotions.

 

Oh ! comme alors cela bien parut

Quand le siège était à Orléans,

Où en premier lieu sa force apparut !

Jamais miracle, ainsi que je pense,

Ne fut plus clair ; car Dieu aux siens

Vint tellement en aide, que les ennemis

Ne se défendirent pas plus que chiens morts.

Là furent pris ou à mort mis.

 

Hé ! quel honneur au féminin

Sexe ! Que Dieu l'aime il paraît bien,

Quand tout ce grand peuple misérable comme chiens

Par qui tout le royaume était déserté

Par une femme est ressuscité et a recouvré ses forces,

Ce que hommes n'eussent pas fait,

Et les traîtres ont été traités selon leur mérite,

A peine auparavant l'auraient-ils cru.

 

Une fillette de seize ans

(N'est-ce pas une chose au-dessus de la nature ?)

A qui les armes ne sont pesantes,

Mais il semble que son éducation

Ait été faite à cela, tant elle y est forte et dure ;

Et devant elle vont fuyant

Les ennemis, et nul n'y résiste.

Elle fait cela, maint yeux le voyant.

 

Et elle va d'eux débarrassant la France

En recouvrant châteaux et villes,

Jamais force ne fut si grande,

Qu'ils soient par centaines ou par milliers...

lundi, 14 février 2011

Fantasmes de demoiselles ...

14 février, fête des "amoureux". Mais Cupidon n'a pas encore fait chavirer votre cœur, et vous avez beau jouer les célibataires faussement désinvoltes et vous dire que la Saint-Valentin c’est naze, ringard, commercial ... depuis ce matin vous lorgnez sur le parfum super-sexy ou le bouquet de rose qu'on ne vous offrira pas aujourd'hui.

Alors pourquoi ne pas passer quelques petites annonces. Je vous en propose quelques unes émises par des femmes faites et défaites cherchant l'âme sœur, fantasmes de demoiselles recueillies par René de Obaldia. Ce livre est un petit bijou de drôlerie et, mon dieu, de connaissance des femmes !

 

Magritte_Le_fils_de_l-homme.jpgCherche beau jeune homme aimant croquer la pomme

 

Cherche beau jeune homme

Aimant croquer la pomme

Beau comme un troubadour

Quand il me fera l'amour

(La nuit, propice à l'obscurité

Et a moult voluptés)

En son habit de velours

Sa mandoline à côté

Toutes les étoiles se mettront à pleurer

 

botero10.jpgCherche jeune et beau curé

 

Cherche jeune et beau curé

Tout prêt à se défroquer

Quand il me verra passer

Bouleverd Agrippa d'Aubigné

 

 

 

 

 

1971 caniche.jpgCherche beau jeune homme avec caniche

 

Cherche beau jeune homme avec caniche

Tout noir tout frisé

(Pas le jeune homme, mais le caniche)

Haut sur pattes, gueule distinguée

Amoureux de ma personnalité

 

 

 

 

botero_chasse.jpgCherche un garde-chasse

 

Cherche un garde-chasse

Ni beau ni laid

Mais doté d'un membre efficace

Tel l'amant de Lady Chatterley

 

 

 

 

 

Botero%20la%20familia%20%20Presid.jpgCherche un malabar

 

Cherche un malabar

Plaçant très haut la barre :

Trois Porsche, un sous-marin

Hôtel de luxe avec pingouins

Pédicure mexicain

Palanquin à Pékin

Case de bambou a Ouagadougou

Des tonnes et des tonnes de bagages

Et un tueur a gages.

 

Reçu par tous les Présidents

Du plus noir jusqu'au plus blanc

Avec tous les honneurs

Toute la raideur

Dus a son rang.

Et moi, sa ravissante épouse

Des perlouzes, des perlouzes, des perlouzes ...

 

image.axd.jpgCherche une femme exquise

 

Tant les hommes sont cons cherche une femme exquise

Douceur de lait, manière de Marquise

Tempérament de pharaon

 

 

René de Obaldia

Fantasmes de Demoiselles, femmes faites ou défaites cherchant l'âme soeur de (2006) chez Grasset

 

 

Bon, si vous n'avez pas celle qui vous convient, il y a encore quarante-cinq "petites-annonces" !

Et si l'an prochain, il n'est pas sûr que vous y gagniez roses, bijoux, lingerie fine et mots doux, au moins aurez-vous eu pendant un an battements de cœur affolés, soupirs d’extase, étreintes moites et souvenirs brûlants !

jeudi, 03 février 2011

Le 3 février 1851, une loi vote un crédit spécial pour subventionner les lavoirs

lavandiere_2.jpgDepuis les temps les plus reculés, laver le linge est une activité dévolue à la femme.

Une des plus ancienne description de lavage est sans doute extraite du chant VI de l'Odyssée d'Homère (traduction de Leconte de Lisle)

"[...] Et sa mère était assise au foyer avec ses servantes, filant la laine teinte de pourpre marine ; et son père sortait avec les rois illustres, pour se rendre au conseil où l'appelaient les nobles Phaiakiens. Et, s'arrêtant près de son cher père, elle lui dit :

- Cher père, ne me feras-tu point préparer un char large et élevé, afin que je porte au fleuve et que je lave nos beaux vêtements qui gisent salis ? Il te convient, en effet, à toi qui t'assieds au conseil parmi les premiers, de porter de beaux vêtements. Tu as cinq fils dans ta maison royale ; deux sont mariés, et trois sont encore des jeunes hommes florissants. Et ceux-ci veulent aller aux danses, couverts de vêtements propres et frais, et ces soins me sont réservés.

lavandiere_3.jpgElle parla ainsi, n'osant nommer à son cher père ses noces fleuries ; mais il la comprit et il lui répondit :

- Je ne te refuserai, mon enfant, ni des mulets, ni autre chose. Va, et mes serviteurs te prépareront un char large et élevé propre à porter une charge.

Ayant ainsi parlé, il commanda aux serviteurs, et ils obéirent. Ils firent sortir un char rapide et ils le disposèrent, et ils mirent les mulets sous le joug et les lièrent au char. Et Nausikaa apporta de sa chambre ses belles robes, et elle les déposa dans le char. Et sa mère enfermait d'excellents mets dans une corbeille, et elle versa du vin dans une outre de peau de chèvre. La jeune vierge monta sur le char, et sa mère lui donna dans une fiole d'or une huile liquide, afin qu'elle se parfumât avec ses femmes. Et Nausikaa saisit le fouet et les belles rênes, et elle fouetta les mulets afin qu'ils courussent ; et ceux-ci, faisant un grand bruit, s'élancèrent, emportant les vêtements et Nausikaa, mais non pas seule, car les autres femmes allaient avec elle.

lavandiere_4.jpgEt quand elles furent parvenues au cours limpide du fleuve, là où étaient les lavoirs pleins toute l'année, car une belle eau abondante y débordait, propre à laver toutes les choses souillées, elles délièrent les mulets du char, et elles les menèrent vers le fleuve tourbillonnant, afin qu'ils pussent manger les douces herbes. Puis, elles saisirent de leurs mains, dans le char, les vêtements qu'elles plongèrent dans l'eau profonde, les foulant dans les lavoirs et disputant de promptitude. Et, les ayant lavés et purifiés de toute souillure, elles les étendirent en ordre sur les rochers du rivage que la mer avait baignés. Et s'étant elles-mêmes baignées et parfumées d'huile luisante, elles prirent leur repas sur le bord du fleuve. Et les vêtements séchaient à la splendeur de Hèlios."

Et c'est en rentrant au palais et qu'elles aperçurent Ulysse habillé seulement d'une branche chargée de feuilles ...

 

Mais ce travail n'est pas si paradisiaque ! Le métier de lavandière est un métier très pénible, la blanchisseuse est agenouillée toute la journée dans l'humidité, et l'hiver, il faut casser la glace du lavoir qui est gelé, battre le linge dans le froid et l'eau glacée et l'humidité ... Les lavandières ont souvent "l'onglée" aux doigts.

lavandieres_2_m.jpgDès XIIème siècle, la lessive du gros linge est en usage une fois l'an, puis deux fois l'an, voire trois fois au XIXème siècle et dure deux ou trois jours. A côté de ces temps forts, il y a naturellement des lessives plus modestes, le fameux "jour de lessive" destiné aux vêtements de travail, aux sous-vêtement et aux bas de coton, aux tabliers, aux mouchoirs ...

La lessive est effectuée à partir d'un point d'eau, fontaine, mare, étang, cours d'eau. Sur les bords de la seine, comme sur les rives de toutes les rivières de France, on pouvait donc rencontrer des lavandières qui se servaient d’une planche à laver, d’une petite caisse pour s’agenouiller près de l’eau, d’un planche à frotter et d’un battoir qu'elles transportaient dans leur brouette lourdement chargée. Elles installaient leur selle (sorte de planche sur deux trétaux) et, à genoux, avec des gestes immuables, elles savonnaient, battaient, malaxaient, roulaient et essoraient leur linge sur les bords du fleuve.

« C’est ici, du matin au soir,

Que par la langue et le battoir

On lessive toute la Ville.

On parle haut, on tape fort,

Le battoir bat, la langue mord !

Pour être une laveuse habile,

Il faut prouver devant témoins

Que le battoir est très agile,

Que la langue ne l’est pas moins."

Achille Millien

 

A Paris, les rues des Lavandières (ou encore Lavandières Saint-Jacques) et des avandières Sainte Opportune datent du XIIIème siècle et doivent leur nom aux lavandières que le voisinage de la rivière avait attirées. Une rue des Blanchisseuses fut également ouverte, vers 1810, entre le quai de Billy et la rue de Chaillot.

La Taille de 1292 cite 43 lavandiers ou lavandières, parmi lesquels "Jehanne, lavendière de l'abbaie" de Sainte-Geneviève ; elle habitait la "rue du Moustier" qui est devenue la rue des Prêtres-Saint-Étienne du Mont. Cependant, à cette époque et dans la plupart des communautés, les religieux lavaient eux-mêmes leurs vêtements et leur linge. On faisait chauffer l'eau à la cuisine. Les objets blanchis étaient ensuite étendus soit dans le cloître, soit dans un séchoir spécial.

Jean-Baptiste_Siméon_Chardin_019.jpgChargées de l'entretien du linge des familles aisées, les lavandières font partie du personnel habituel des "hôtels", tout comme les panetiers, les clercs de la paneterie des nappes, les clercs de la paneterie du commun, les charretiers de la paneterie des nappes, les "porte chapes" (ou maîtres traiteurs, du mot chape, couvercle qui sert à couvrir les plats afin de les maintenir chauds), les sommeliers, les gardes-chambre (ou chambellans), les portiers, les portefaix et les valets de la porte, les sommiers ou voituriers ... qui touchent des gages, reçoivent de l'avoine, des chandelles, du bois.

D'autres encore travaillent à la journée au service de particuliers, de maîtres de grandes maisons, de fermiers, de métayers, de notables, pour un maigre salaire en toutes saisons, sauf lorsque le fleuve était pris par les glaces. Une ordonnance du 30 janvier 1350 fixe à "un tournoi en toute saison le prix que pourront demander toutes manières de lavandières de chacune pièce de linge lavé." (source : "La vie privée d'autrefois: arts et métiers, modes, moeurs, usages des parisiens du XIIe au XVIIIe siècle d'après des documents originaux ou inédits). Elles côtoient les ménagères de condition modeste qui viennent laver elles-mêmes leur linge à la rivière. Ces opérations sont décrites ICI, avec un poème bien sympathique, ICI, ICI ou encore LA, avec des photos anciennes...

Bien que jamais érigées en corporation régulière, les blanchisseuses ou lavandières "professionnelles" doivent se plier à partir du XVIIe siècle aux exigences d'une administration parisienne veillant à la bonne hygiène ! Très tôt, les lois et les décrets visant l’existence et l’implantation d’établissements insalubres dans Paris poussent les industries du blanchissage à quitter la capitale pour s’installer dans les communes voisines.

lavandiere.jpgAvec les progrès de l'hygiène, des locaux plus confortables et fonctionnels apparaissent, avec en particulier la construction de lavoirs. Choléra, variole et typhoïde ont marqué le XIXème siècle. Le linge peut véhiculer des germes malsains. Les habitants qui viennent s’approvisionner en eau trouvent l’eau des puits et des rivières souillée par les savons et les saletés. L’édification de lavoirs s’impose. Par la loi du 3 Février 1851, l'Assemblée législative vote un crédit spécial de 600 000 francs pour subventionner, à hauteur de 30 %, la construction d’établissement modèles de bains et lavoirs publics, gratuits ou à prix réduits. Chaque projet est subventionné à hauteur de 20 000 francs. Malgré les sommes à trouver pour compléter la subvention, de nombreuses communes, même modestes, engagent les travaux. La construction est commandée par les municipalités sous le contrôle de l'administration départementale. Les travaux sont mis alors en adjudication sur rabais à la chandelle, d'où une certaine similitude de conception et de matériaux. Il y a au moins un lavoir par village ou hameau et l'on peut estimer l'importance du village au nombre de ses lavoirs. Certains possèdent même un dispositif pour chauffer des lessiveuses et produire de la cendre qui blanchit le linge ... Les lavoirs seront utilisés jusqu'à l’arrivée de l’eau courante dans les maisons.

Lieu de convivialité, le lavoir est également un lieu de chant ; on y fredonne quelques airs à la mode et parfois on y va de ses  commérages : "Au lavoir, on lave le linge, mais on salit les gens" dit-on !

 

A Paris et dans de nombreuses villes traversées par un fleuve, est-ce parce que les lavandières étaient réputées de mœurs légères et que les mauvais garçons se mêlaient souvent aux lessives que l'on décida de créer des endroits où les jeunes filles et les femmes honnêtes des classes populaires pourraient laver leur linge en toute tranquillité, les fameux bateaux-lavoirs ?

 

" Ô Lavandière "

 

Sachez qu'hier, de ma lucarne,

J'ai vu, j'ai couvert de clins d'yeux,

Une fille qui dans la Marne

Lavait des torchons radieux

 

Je pris un air incendiaire

Je m'adossais contre un pilier

Puis le lui dis " Ô Lavandière "

Blanchisseuse étant familier

 

La blanchisseuse gaie et tendre

Sourit et, dans la hameau noir

Au loin, sa mère cessa d'entendre

Le bruit vertueux du battoir.

 

Je m'arrête. L'idylle est douce

Mais ne veut pas, je vous le dis,

Qu'au delà du baiser on pousse

La peinture du paradis.

 

Victor Hugo

 

L'origine des bateaux-lavoirs remonterait au XVIIe siècle. Le 16 septembre 1623, un traité assure à un entrepreneur, Jean de la Grange, secrétaire du roi Louis XIII, divers droits à conditions qu'il poursuive l'aménagement de l'Ile Notre-Dame et de l'Ile aux vaches, dont celui de mette à perpétuité sur la Seine "des bateaux à laver les lessives, en telle quantité qu'il feroit avisé & en tel endroit qu'il jugerroit à propos; pourvû que ce fût sans empêchement de la navigation, ni que le bruit pût incommoder les maisons du Cloître Notre-Dame". (source : "traité de la police" de M.De la mare, volume 1 - page 100 de l'édition de 1722).

Bateau-lavoir-2.jpgMais c'est surtout au XIXème siècle que les bateaux-lavoirs se développent partout en France, un mouvement qu’accélère la loi du 3 février 1851. Un lavoir flottant établi à Paris même, la Sirène, propose déjà les appareils les plus perfectionnés de l’époque. Il a été détruit par les glaces durant les grands froids de 1830. Les lavoirs flottants sont pourvus de buanderies à partir de 1844 afin de lutter contre la forte concurrence des lavoirs publics et des grandes buanderies de banlieue qui ne cessent de se créer, véritables usines à laver qui mettent à disposition des laveuses eau chaude, essoreuses, séchoirs à air chaud et à air libre, réfectoire et même parfois salle de garde pour les enfants en bas âge. 25 à 30 mètres de long; au premier niveau se trouvent les postes des blanchisseuses et, au milieu, deux rangées de chaudières posées sur des briques. L’étage se partage entre l’habitation du patron et le séchoir.

3309-14.jpgEn 1852, il existe dans Paris 93 lavoirs et buanderies, principalement répartis dans les divers quartiers pauvres, comme le Lavoir Moderne Parisien dans le quartier de la Goutte d'Or; les bateaux-lavoirs stationnant sur le canal Saint-Martin sont au nombre de 17, ceux sur la Seine s'élèvent à 64 ( source : Dictionnaire historique des rues et monuments de Paris en 1855 de Félix et Louis Lazare, page 111 et suivantes) Mais pour beaucoup de familles pauvres, l’usage des bateaux-lavoirs est trop onéreux et, depuis les quartiers éloignés, il est bien pénible de porter son linge aux bateaux-lavoirs sur une brouette … et bientôt le nombre des bateaux-lavoirs parisiens est en constante perte de vitesse. En 1880, il n'y a plus en Ile-de-France que 64 bateaux-lavoirs offrant 3800 places de laveuses. Vingt-trois de ces lavoirs flottants sont à Paris même, dont six sur le canal Saint-Martin et trente-cinq se répartissent en banlieue sur la Seine, la Marne et l’Oise. À la fin du XIXe siècle, la plupart de ces bateaux-lavoirs sont la propriété d’une seule famille en vertu d’un bail qui lui a été consenti, en 1892, par la Société du Canal Saint-Martin. Mais, les bateaux-lavoirs disparaissent inéluctablement dans la première moitié du XXe siècle.

Les 4 derniers bateaux-lavoirs sur la Seine disparaissent pendant la dernière guerre mondiale, sur ordre des allemands, pour faciliter la navigation : une vidéo de l'INA annonce cette décision ...

retrouver ce média sur www.ina.fr

 

Au fait, vous souvenez-vous qu'une des insultes du capitaine Haddock est "Amiral de bateau-lavoir" ?

 

Emile Zola a décrit le travail des lavandières dans plusieurs de ses écrits :

"Un grand hangar, monté sur piliers de fonte, à plafond plat, dont les poutres sont apparentes. Fenêtres larges et claires. En entrant, à gauche, le bureau, où se tient la dame; petit cabinet vitré, avec tablette encombrée de registres et de papiers. Derrière les vitres, pains de savon, battoirs, brosses, bleu, etc. A gauche est le cuvier pour la lessive, un vaste chaudron de cuivre à ras de terre, avec un couvercle qui descend, grâce à une mécanique.  A côté est l'essoreuse, des cylindres dans lesquels on met un paquet de linge, qui y sont pressés fortement, par une machine à vapeur. Le réservoir d¹eau chaude est là. la machine est au fond, elle fonctionne tout le jour, dans le bruit du lavoir; son volant  ; on voit le pied rond et énorme de la cheminée, dans le coin. Enfin, un escalier conduit au séchoir, au-dessus du lavoir, une vaste salle fermée sur les deux côtés par des persiennes à petites lames ; on étend le linge sur des fils de laiton. A l'autre bout du lavoir, sont d'immenses réservoirs de zinc, ronds. Eau froide.

Le lavoir contient cent huit places. Voici maintenant de quoi se compose une place. On a, d¹un côté, une boite placée debout, dans laquelle la laveuse se met debout pour garantir un peu ses jupes. Devant elle, elle a une planche, qu'on appelle la batterie et sur laquelle elle bat le linge ; elle a à côté d'elle un baquet sur pied dans lequel elle met l'eau chaude, ou l'eau de lessive. Puis derrière, de l¹autre côté, la laveuse a un grand baquet fixé au sol, au-dessus duquel est un robinet d'eau froide, un robinet libre ; sur le baquet passe une planche étroite où l'on jette le linge; au-dessus; il y a deux barres, pour prendre le linge et l'égoutter. Cet appareil est établi pour rincer. La laveuse a encore un petit baquet sur pied pour placer le linge, et un seau dans lequel elle va chercher l'eau chaude et l'eau de lessive.

on a tout cela pour huit sous par jour. La ménagère paie un sou l'heure. L'eau de javel coûte deux sous le litre. Cette eau, vendue en grande quantité,est dans des jarres. Eau chaude et eau de lessive, un sou le seau. On emploie encore du bicarbonate - de la potasse pour couler. Le chlore est défendu."

Carnets d'enquêtes - La Goutte d'Or 1875

Sur le boulevard, Gervaise tourna à gauche et suivit la rue Neuve-de-la-Goutte-d'Or. En passant devant la boutique de Mme Fauconnier, elle salua d'un petit signe de tête. Le lavoir était situé vers le milieu de la rue, à l'endroit où le pavé commençait à monter. Au-dessus d'un bâtiment plat, trois énormes réservoirs d'eau, des cylindres de zinc fortement boulonnés, montraient leurs rondeurs grises ; tandis que, derrière, s'élevait le séchoir, un deuxième étage très haut, clos de tous les côtés par des persiennes à lames minces, au travers desquelles passait le grand air, et qui laissaient voir des pièces de linge séchant sur des fils de laiton. A droite des réservoirs, le tuyau étroit de la machine à vapeur soufflait, d'une haleine rude et régulière, des jets de fumée blanche. Gervaise, sans retrousser ses jupes, en femme habituée aux flaques, s'engagea sous la porte, encombrée de jarres d'eau de javel. Elle connaissait déjà la maîtresse du lavoir, une petite femme délicate, aux yeux malades, assise dans un cabinet vitré, avec des registres devant elle, des pains de savon sur des étagères, des boules de bleu dans des bocaux, des livres de bicarbonate de soude en paquets. Et, en passant, elle lui réclama son battoir et sa brosse, qu'elle lui avait donnés à garder, lors de son dernier savonnage. Puis, après avoir pris son numéro, elle entra. C'était un immense hangar, à plafond plat, à poutres apparentes, monté sur des piliers de fonte, fermé par de larges fenêtres claires. Un plein jour blafard passait librement dans la buée chaude suspendue comme un brouillard laiteux. Des fumées montaient de certains coins, s'étalant, noyant les fonds d'un voile bleuâtre. Il pleuvait une humidité lourde, chargée d'une odeur savonneuse, une odeur fade, moite, continue ; et, par moments, des souffles plus forts d'eau de javel dominaient. Le long des batteries, aux deux côtés de l'allée centrale, il y avait des files de femmes, les bras nus jusqu'aux épaules, le cou nu, les jupes raccourcies montrant des bas de couleur et de gros souliers lacés. Elles tapaient furieusement, riaient, se renversaient pour crier un mot dans le vacarme, se penchaient au fond de leurs baquets, ordurières, brutales, dégingandées, trempées comme par une averse, les chairs rougies et fumantes. Autour d'elles, sous elles, coulait un grand ruissellement, les seaux d'eau chaude promenés et vidés d'un trait, les robinets d'eau froide ouverts, pissant de haut, les éclaboussements des battoirs, les égouttures des linges rincés, les mares où elles pataugeaient s'en allant par petits ruisseaux sur les dalles en pente. Et, au milieu des cris, des coups cadencés, du bruit murmurant de pluie, de cette clameur d'orage s'étouffant sous le plafond mouillé, la machine à vapeur, à droite, toute blanche d'une rosée fine, haletait et ronflait sans relâche, avec la trépidation dansante de son volant qui semblait régler l'énormité du tapage."

L'Assommoir

 

lina bill_lavandière en provence.jpegA partir du XIXème siècle, la lessive se fait aussi "chez soi". En vue de ces lessives, on conserve la cendre de bois des cendriers et on la passe au tamis fin pour obtenir une poudre gris clair, fine et soyeuse au toucher. On chauffe de l'eau puis on la verse dans un cuvier chargé de linge recouvert de ces cendres, qui alors libèrent des sels de potasse qui traversent le linge. La première passe se fait avec de l'eau chaude, mais pas bouillante, pour ne pas "cuire les taches". ("coulage à froid"). L'eau qui s'écoule est récupérée, remise à chauffer et on recommence ainsi de suite pendant des heures ("coulage à chaud"). Le linge est alors sorti brûlant du cuvier avec de longues pincettes de bois et brossé ("lessivage") puis et mis à égoutter sur des tréteaux. Ensuite, le linge est rincé à la rivière ou au lavoir ("retirage"). Suit le tordage (le linge est frappé et tordu) et le séchage. S´il fait beau il est posé sur l´herbe pour y être azuré ("la mise au pré") ...

museeagricole.botans.free.fr_automne2005_IMG_2162 B.jpgL'arrivée de l'eau courante dans les foyers achèvera l'histoire des lavoirs. L'"eau courante" dans les maisons se généralise vers 1950 dans les villes puis lentement dans les campagnes. On fait la lessive dans la buanderie où l'on ne craint pas de répandre de l'eau. Même si les machines à laver semi-automatiques existaient déjà depuis plus de 20 ans, elles étaient rares dans les familles et j'ai assisté dans mon enfance à ces séances de lavage, à peine modernisées ! On n'utilisait bien sûr plus de cuvier mais une lessiveuse "à champignon", la cendre était remplacée par du perborate acheté à la pharmacie. La lessiveuse était une grande marmite qui servait à faire bouillir le linge. Au fond se trouvait un double-fond, d'où remontait un tuyau avec, au bout, un pommeau. Après avoir été savonné sur la planche à laver, le linge était disposé dans la lessiveuse. On allumait le feu dans un petit poêle en dessous, et la chaleur faisant monter l'eau dans le tuyau et le pommeau qui arrosait le linge d'eau bouillante. L'eau redescendait en traversant le linge et retombait au fond pour remonter à nouveau ... ça sentait mauvais et il faisait une chaleur moite étouffante dans la buanderie. Ensuite ma mère laissait refroidir un peu la lessiveuse et une femme de ménage venait l'aider à la vider petit à petit dans un grand bac où le linge était rincé à l'eau froide. C'est ensuite toute la maison qui était mise à contribution pour essorer les grosses pièces que l'on prenait à chaque bout pour les tordre.Je me souviens toutefois d'une essoreuse électrique que mes parents avaient achetée à des américains d'un camp de l'OTAN  ... Au milieu des années 60, le départ à la retraite de notre "lavandière" rendit nécessaire l'achat d'une machine à laver.

meredenis.jpg

La deuxième partie du XXème siècle pensait en avoir fini avec les lavandières quand le fabricant de lave-linge Vedette se choisit la Mère Denis pour raviver un mythe forgé au cours des siècles autour de ce métier. Un petit chemin qui descend au lavoir, une brouette de linge, un battoir, une brosse et l'amour du travail bien fait.d eux bonnes grandes mains de lavandière et l'amour du travail bien fait ... Vedette mérite votre confiance, "C'est ben vrai ça!"

samedi, 08 mai 2010

8 mai 1945 ... le retour, enfin !

450px-Perelachaise-Ravensbruck-p1000378.jpgLe 7 mai 1945, à 2 h 41, la reddition de l'armée allemande est signée à Reims ... Cette date correspond donc à la fin des combats en Europe de l'Ouest. Les journalistes occidentaux répandirent prématurément la nouvelle de la capitulation, précipitant ainsi les célébrations. Les combats continuèrent cependant sur le front de l'Est jusqu'à ce que les Allemands signent à nouveau un acte de capitulation spécifique avec les Soviétiques à Berlin. C'est donc peu avant minuit, le 8 mai, qu'une seconde reddition sans condition fut signée dans la banlieue Est de Berlin. Les représentants de l'URSS, de la Grande-Bretagne, de la France et des États-Unis arrivèrent peu avant minuit. Après que le maréchal Georgi Joukov eut ouvert la cérémonie, les représentants du Haut commandement allemand, emmenés par le maréchal Wilhelm Keitel, furent invités à signer l'acte de capitulation entrant en vigueur à 23 h 01, heure d'Europe centrale.


Per me si va nielle cita dolente,

Per me si va nell'eterno dolore,

Per me si va alla perduta gente.

Lasciate ogni speranza voi ch'entrate !


Par moi on pénètre dans la cité de la souffrance ;

Par moi on entre dans l'éternelle douleur,

Par moi, on marche vers le peuple des perdus.

Vous qui entrez ici, abandonnez toute espérance !

 

Dante Alighieri, La divine comédie, 1472.

 


 

franceaudoul_kommandotragique4445.JPG

Le lundi 7 mai 1945, le convoi ramenant Granny de Hanovre, via la Belgique, passait la frontière française, non loin de Lille. Le 8 mai à 9h, elle était à Paris ...

Une de ses amies, Simonne Rohner, déportée comme elle, a fait le récit de leur déportation à son retour. Ce récit, dont j'ai gardé précieusement une copie, je l'ai retrouvé un jour sur internet ...

Granny, c'est "Madeleine" - matricule 38990 - partie comme Simonne le 13 mai 1944 par le convoi I.212 qui ne transportait que des femmes, 552 en tout, et qui arriva à Ravensbrück le 18 mai 1944.  Près des deux tiers de ces femmes ne restent pas dans ce camp de concentration, et sont ensuite transférées dans des Kommandos de travail, ("camp annexe" en allemand) souvent éloignés, produisant pour l'économie de guerre du Reich et dépendant d'autres camps. Simonne et Granny sont ainsi transférées le 21 Juin 1944 dans un "kommando" de travail, le Lager-Arbeit de Limmer près de Hanovre, dépendant du KL Neuengamme, pour y fabriquer des masques à gaz.

Libérées le 23 avril 1945 par la Croix-Rouge, leur retour, d'abord prévu en avion, se fit en fait en camion jusqu'à Clèves, sur des routes allemandes défoncées par les bombardements et la guerre, et enfin en train à travers la Hollande et la Belgique. Voilà le récit que Simone fit de la fin du voyage :

"Le train repartit, la plupart des camarades dormaient. Hélène et moi, enveloppées dans nos couvertures étions restées sur le marchepied, scrutant la nuit noire, nous étions silencieuses, toutes à nos pensées intimes. A chaque station, nous posions la question :

- Est-ce là la FRANCE ?

- Pas encore, bientôt !

A une toute petite station, le chef de gare nous dit :

- Vous en êtes à quelques kilomètres...

Comme nos coeurs battaient !

A l'arrêt suivant, des employés de la S.N.C.F. nous accueillirent, un grand cri s'éleva de tout le convoi :

- Nous sommes en FRANCE !

Personne ne pensait plus à dormir, on s'embrassait, on riait, on chantait et bientôt le train ralentit. Nous étions à LILLE, dans une gare de triage. Il était 3 h du matin. Des Officiers nous attendaient et nous firent le salut militaire puis nous partîmes en camions au travers de la ville endormie. Comme tout était calme, silencieux. On nous conduisit dans un ancien séminaire où un repas nous attendait. Nous n'avions guère faim, mais malgré tout nous fîmes honneur au saucisson, à la tranche de viande froide, pommes de terre et gâteaux, plus un grand verre de vin rouge, le premier depuis notre libération.

Des scouts, des dames de la CROIX-ROUGE nous entouraient s'informant de nos moindres désirs. Nous étions plus de mille. Tout à coup un soldat se leva et réclama la"MARSEILLAISE". Celle-ci fut chantée d'une voix vibrante, nous étions tous profondément émus. Quelques soldats chantèrent des chansons de camps et nous, nous entonnâmes le chant des"MARAIS". Lorsque nous eûmes terminées un silence de mort plana sur la salle, la plupart des soldats pleuraient, cette vision était bouleversante.

Enfin, l'ordre d'aller nous reposer quelques heures arriva et on nous conduisit dans des petites chambres où des lits bien blancs nous attendaient. Nous n'en pouvions plus d'émotion, de fatigue, de joie et le sommeil nous terrassa immédiatement.

Le soleil brillait déjà haut dans le ciel, lorsque nous ouvrîmes les yeux. On nous fit savoir que nous devions aller à la sécurité militaire, ainsi qu'à la visite médicale. Trois Officiers nous interrogeaient, compulsaient des fiches puis nous remirent nos feuilles de Rapatriés. Ensuite nous reçûmes une prime de 1 500 francs, plus une somme de 1 000 francs, offerte en réalité par les prisonniers porteurs de marks. Je remis ces 1 000 francs à Nicole, car je n'ignorais pas qu'elle était dans le plus grand dénuement, les Boches lui ayant tout pris. On nous fit prendre une douche, on nous vaccina, puis les Majors nous examinèrent, radioscopie, radio tirée ; je tombais sur un phénomène qui me demanda candidement :

- Vous n'avez pas été malheureuse en ALLEMAGNE ?

- Oh ! non, lui répondis-je en riant, c'était le paradis !"

[...]A midi 1/2, on nous fit remonter en camions et nous prîmes la direction de la gare. Les civils nous regardaient avec des airs méfiants, quelques huées furent lancées à notre adresse. Nous nous regardions surprises. Quoi ? La FRANCE ignorait-elle les déportés ? Nos costumes de bagnardes n'expliquaient donc rien ? A la gare ce fut pire, nous eûmes à subir des paroles cinglantes, nous en pleurions de rage. Où était l'ambiance la gentillesse des Hollandais, des Belges !

Nous recevions un accueil hostile, nous étions déroutées. Sur le quai, Alice avisa un jeune homme et le pria d'aider une de nos camarades qui n'arrivait plus à traîner son baluchon, il répondit brutalement :

- Elle est bien capable de le porter elle-même !

- Salaud ! lui cria Alice, elle écumait de colère. Ah ! on m'y reprendra de faire de la Résistance, ah ! les salauds ! être reçue de cette façon dans notre pays. Ah ! non, jamais je n'oublierai cela, après avoir souffert ce que nous avons souffert, c'est un peu violent !

Un des Officiers alla au haut-parleur et s'adressant aux civils, il prononça des paroles dures, blâmant une pareille attitude à notre égard. Le train démarra, nous étions installées dans un grand wagon de seconde classe à couloir central, affalées sur nos banquettes, silencieuses, le coeur lourd de larmes.

Peu de temps après le départ, un jeune homme et une jeune femme vinrent vers nous :

- Tout le monde a compris, dirent-ils, et nous venons chercher quelques-unes d'entre vous pour parcourir les wagons, nous avons organisé une collecte à votre profit !

En effet, un peu plus tard, elles revinrent toutes joyeuses, tenant dans leur robe de nombreux billets, lorsque le partage fut fait, nous reçûmes chacune 187,50 Frs... Alice riait aux larmes :

- J'empoche, dit-elle, car jusqu'à PARIS, je reste cloche et vis de la mendicité publique, cela me paiera mon métro !

La gaieté reparut et nous chantions à tue-tête.

A ARRAS, il y eut arrêt.

Des infirmières nous distribuèrent un casse-croûte et du vin. La ville était très abîmée, je la retrouvais comme en 1919... Puis le train roula, roula à travers la plaine de l'ARTOIS, de la SOMME, pays plat, riche en cultures, mes yeux se souvenaient de tous ces coins que j'avais parcouru chaque année lorsque nous allions sur la tombe de papa.

Nous approchâmes de CREIL, arrêt, puis la forêt de CHANTILLY avec ses frondaisons de printemps. Nous longions l'OISE où ses ponts sautés, ses villas endommagées nous montraient encore la figure sinistre de la guerre. Enfin, la banlieue avec ses petites maisons, puis le Sacré-Coeur se dessina et nous entrâmes en gare du Nord, il était 8 heures !

PARIS !

Nous étions enfin à PARIS...

Les employés nous aidèrent à descendre, nous souriaient, nous interrogeaient. Les scouts se précipitèrent et on nous entraîna dans une grande salle aménagée en Centre d'Accueil, personne n'avait faim. [...]

Je piétinais dans l'attente des autobus qui devaient venir nous chercher, les Officiers m'empêchèrent de rentrer par mes propres moyens :

- Vous devez passer par LUTETIA pour le contrôle !

Enfin, vers 9 heures, ils arrivèrent ornés de drapeaux, je restais sur la plate-forme avec Hélène, Nicole et Henriette.

Tout PARIS était dehors, les fenêtres étaient pavoisées et dans le ciel deux faisceaux lumineux formaient un grand V symbolique. Je ne retrouvais pas la liesse de BRUXELLES, ni le souvenir de la joie débordante de 1918, c'était autre chose, une joie presque grave. Le long du parcours, les gens nous saluaient, nous envoyaient des baisers, agitaient les mains et nos camarades criaient :

- Bonjour la FRANCE ! Bonjour PARIS !

PARIS intact, toujours beau sous son ciel de Mai, la nuit tombait poudrant tout d'une douceur inconnue en ALLEMAGNE. Je dévorais des yeux tous ces coins si connus, si aimés.

PARIS !

Mon PARIS, je le retrouvais... Combien de fois avais-je rêvé à lui, pendant les nuits d'usine où seule avec mes souvenirs, je voyais défiler toutes ses rues, ses boulevards, ses quartiers où j'avais laissé tant de moi-même, bons ou mauvais souvenirs.

Qu'importe, je l'aimais mon PARIS...

A LUTETIA, une foule attendait, visages crispés, torturés, des gens se précipitèrent, nous entourèrent, nous interrogèrent, il fallut que les scouts et les agents s'interposent pour nous laisser entrer. Nouveau contrôle militaire, puis enfin, je vis arriver Jo et Suzanne, après nous être embrassé en pleurant de joie, je les interrogeai avidement.

- Père et Jacques n'ont pas pu venir, ils sont très fatigués, mais ce ne sera rien, un peu de repos suffira !

Je pressais le pas, courant presque, une hâte d'arriver, de les voir. Lorsque la porte s'ouvrit, je vis Tito... hâve, décharné, semblable aux photos vues à HANOVRE. Il vint vers moi :

- Tu vois, me dit-il, ce que je suis devenu ?

Quel reproche dans sa voix... Je me sentis glacée.

- Où est Jacques ?

- Là-haut, il t'attend !

Je grimpais les escaliers en courant et bondis dans la petite chambre, un cadavre m'attendait. Il tourna les yeux vers moi et un pauvre sourire se dessina sur ses lèvres :

- Ah ! te voilà maman ! Tu es revenue toi aussi... Il referma les yeux, je posais mes lèvres sur sa face ruisselante de sueur, il ouvrit à nouveau les yeux et me dit :

- Ils ne m'ont pas eu les vaches !...

Puis il tourna la tête d'un air las.

Je restais près de lui, tenant sa main fiévreuse, effondrée devant la réalité brutale, une nouvelle lutte à soutenir m'attendait, lutte contre la mort que l'on sentait rôder dans la petite pièce étouffante.

 

Lorsque je gagnais mon lit, ce fut une nuit terrible, pleine de larmes et de sanglots. Ah ! ce n'était pas cela que j'avais rêvé... comme retour.

La vie me pesait.

Toute joie avait disparu de mon coeur.

Le cortège de soucis, d'angoisse, de lutte recommençaient.

C'était le 8 Mai 1945..."

 

 

A voir ! les dessins de l'article " l'art et les camps" http://pagesperso-orange.fr/d-d.natanson/art_et_camps

 

mardi, 15 juillet 2008

Le sexisme multi-récidiviste du Conseil Général des Yvelines !

WeCanDoItPoster.jpgVous vous souvenez peut être de la campagne sexiste de juillet 2007 du Conseil général des Yvelines "I love techno" ? Eh bien le Conseil Général des Yvelines présidé par Monsieur (mérite-t-il ce titre ?) Pierre Bédier, persiste encore plus lourdement encore ! Mais pourquoi se gêner, la Ministre Valérie Pécresse n'y avait trouvé rien à redire ...

Cette fois-ci il s’agit de plusieurs visuels destinés aux diplômé(e)s des grandes écoles à coup de jeux de mots sexistes et de mauvais goût qui font penser à un quelconque "Éros center" plutôt qu'à une grande école.

Cette nouvelle utilisation sexiste, vulgaire et ringarde d'une image de femme prouve encore une fois le mépris dans lequel Bédier tient la moitié des habitants de son département !

En effet cette publicité réduit la femme à un objet sexuel, faisant oublier qu’elle a intellectuellement les mêmes capacités que les hommes. Ensuite, elle suggère que les diplômés des grandes écoles sont attirés par les femmes et donc que les diplômés des grandes écoles sont forcément des hommes ! Par cette publicité il contribue à faire perpétuer des préjugés malheureusement largement partagés qui suggèrent que les femmes n’ont pas la même légitimité à faire des études et à diriger des entreprises que les hommes. C’est d’autant plus regrettable que cette publicité s’adresse à des populations comportant de nombreuses personnes en situation de responsabilité, arbitres des promotions des femmes à l’intérieur des entreprises et des administrations.

Cette publicité est également une apologie du viol, puisqu'un de ces slogans suggère "hacke moi si tu peux" or, "hacker" c'est pénétrer par effraction !

Et bien entendu cette campagne est payée par les habitants du département qui, pour moitié, sont des femmes ... mais on saura s'en souvenir avec nos bulletins de vote ! we can do it!

 

Vous voulez voir ces nouveaux visuels ? rendez-vous ici 

Vous avez envie de protester ? Chaque geste compte !

Envoyez votre protestation au président du Conseil Général des Yvelines, Monsieur Pierre Bédier à cette adresse : communication@cg78.fr

ou par courrier (c’est plus efficace) à M. Pierre Bédier, président du Conseil Général des Yvelines, 2 Place André Mignot 78012 VERSAILLES Cedex

Et si ça vous tente, vous pouvez aller faire un tour sur le site des Yvelines. Il a un livre d’or qui ne dit que du bien. Certes, il est modéré … mais si vous voulez y déposer votre avis …

 

Et si vous voulez lire des réactions, allez sur le site de la Meute contre la pub sexiste : celles de 2008 sont en bas de la page ...

 

Serrons-nous les coudes !

mercredi, 18 juin 2008

"DU MARIAGE" selon Léon Blum

04.-blum-la-mariee.jpgC’est un essai contre l’inégalité entre l’homme et la femme, pour le bonheur du couple… Publié en 1907, le texte sera republié en 1937 et fera scandale…La relecture de l’ouvrage vient à point en ces temps de polémiques autour de l’annulation du mariage de Lille ...

"L’essence même du mariage, tel qu’il est institué dans nos mœurs est d’unir une jeune fille vierge à un homme déjà fait, et de remettre à l’expérience de l’homme l’éducation de la vierge. A la base du système se trouve le principe ou, selon moi, le préjugé de la virginité des filles. Mais en accordant que les filles doivent parvenir au mariage dans cet état de fraîcheur et d’ignorance, encore faudrait-il que ces novices y trouvassent de bons maîtres, et que leur préparation conjugale fût confiée à de sûres mains. Le système actuel interdit aux filles d’acquérir avant le mariage une expérience même théorique de l’amour. Et d’autre part, par un effet détourné, il empêche la plupart des hommes de se procurer dans des conditions convenables cette expérience qu’il faut bien pourtant qu’un des deux époux possède. Si les jeunes garçons pendant la période de liberté qui précède le mariage sont contraints de requérir les leçons de prostituées, est-ce de leur part un libre choix, une préférence ? Ne préféreraient-ils pas, au contraire, trouver à leur portée, dans leur connaissance intime, la maîtresse qu’ils sont obligés de demander au hasard ? Au lieu de monnayer, dans des rencontres brèves et furtives, l'ardeur de leur jeunesse, ne préféreraient-ils pas l’apporter toute à une amie qui soit leur égale, qu’une tendresse commune aurait comme eux préparée à la connaissance et à l’échange du désir ? Or, c’est là précisément ce qu’une convention sociale leur interdit comme l’acte le plus répréhensible et le plus lâche, et si cette convention se justifie évidemment dans l’état des mœurs, n’a-t-elle point cependant pour suite nécessaire de rejeter les jeunes gens au plaisir vénal, aux louches contacts, aux habitudes vicieuses, à l’ignoble passivité que ce mode de plaisir comporte ? Sous les peines les plus sévères, vous défendez aux jeunes filles d’arriver au mariage déjà instruites de l’amour, mais du même coup vous leur gâtez leurs futurs maîtres. C’est commettre trop de fautes à la fois." (Du mariage, Léon Blum, éd. Albin Michel, 1937)

image : Caricature de Léon Blum par Sennep

lundi, 17 décembre 2007

Yeux ouverts

b5d90669ad970899aa336b9dd73354b1.jpg"Nous sommes tous solitaires, solitaires devant la naissance (comme l'enfant qui naît doit se sentir seul!); solitaires devant la mort; solitaires dans la maladie, même si nous sommes convenablement soignés; solitaires au travail car même au milieu d'un groupe, même à la chaîne, comme le forçat ou l'ouvrier moderne, chacun travaille seul. Mais je ne vois pas que l'écrivain soit plus seul qu'un autre. Considérez cette maison: il s'y fait presque continuellement un va-et-vient d'êtres: c'est comme une respiration. Ce n'est qu'à de très rares périodes de ma vie que je me suis sentie seule, et encore jamais tout à fait. Je suis seule au travail, si c'est être seule qu'être entourée d'idées ou d'être nés de son esprit; je suis seule, le matin, de très bonne heure quand je regarde l'aube de ma fenêtre ou de la terrasse; seule le soir quand je ferme la porte de la maison en regardant les étoiles. Ce qui veut dire qu'au fond je ne suis pas seule.

Mais dans la vie courante, de nouveau, nous dépendons des êtres et ils dépendent de nous. J'ai beaucoup d'amis dans le village; les personnes que j'emploie et sans lesquelles j'aurai du mal à me maintenir dans cette maison après tout assez isolée, et manquant du temps et des forces physiques qu'il faudrait pour faire tout le travail ménager et celui du jardin, sont des amies; sans quoi elles ne seraient pas là. Je ne conçois pas qu'on se croie quitte envers un être parce qu'on lui a donné (ou qu'on en a reçu) un salaire; ou, comme dans les villes, qu'on ait obtenu de lui un objet (un journal mettons) contre quelques sous, ou des aliments contre une coupure. (C'est d'ailleurs l'idée de base de Denier du rêve1: une pièce de monnaie passe de main en main, mais ses possesseurs successifs sont seuls). Et c'est ce qui me fait aimer la vie dans les très petites villes ou au village. Le marchand de comestibles, quand il vient livrer sa marchandise, prend un verre de vin ou de cidre avec moi, quand il en a le temps. Une maladie dans la famille de ma secrétaire m'inquiète comme si cette personne malade que je n'ai jamais vue, était ma parente; j'ai pour ma femme de ménage autant d'estime et de respect qu'on pourrait en avoir pour une sœur. L'été, les enfants de l'école maternelle viennent de temps en temps jouer dans le jardin; le jardinier de la propriété d'en face est un ami qui me rend visite quand il fait froid pour boire une tasse de café ou de thé. Il ya aussi bien entendu, hors du village, des amitiés fondées sur des goûts en commun (telle musique, telle peinture, tels livres), sur des opinions ou des sentiments en commun, mais l'amitié, quelles qu'en soient les autres raisons, me paraît surtout née de la sympathie spontanée, ou parfois lentement acquise, envers un être humain comme nous, et de l'habitude de se rendre service les uns aux autres. Quand on accueille beaucoup les êtres, on n'est jamais ce qui s'appelle seul. La classe (mot détestable, que je voudrais voir supprimer comme le mot caste) ne compte pas; la culture, au fond, très peu: ce qui n'est certes pas dit pour rabaisser la culture. Je ne nie pas non plus le phénomène qu'on appelle «la classe», mais les êtres sans cesse le transcendent."

Marguerite Yourcenar, Yeux Ouverts, entretiens avec Matthieu Galley

 

Il y a 20 ans, le 17 décembre 1987 mourrait à Mount-Desert (États-Unis), Marguerite de Crayencour, plus connue sous l’anagramme de Marguerite Yourcenar.

dimanche, 09 décembre 2007

Maillol, la peinture, la sculpture et Marly-le-Roi

dc2d1947e72c3c4966a461613669f362.jpgJ'aime bien quelques uns des sites qui nous racontent l'histoire au jour le jour. Je visite souvent le site "Hérodote" mais aussi une éphéméride sur l'art, assez "rustique" mais efficace, avec plein de liens sur des reproductions des tableaux dont parlent les articles ! A partir de là, je me promène ensuite sur internet à la recherche d'infos sur tel ou tel évènement, tel ou tel artiste, bref je continue à m'instruire !!!

Et hier, j'ai donc découvert que le sculpteur Maillol, né le 8 décembre 1861 (le même jour que Méliès), et dont on admire les sculptures monumentales de nus féminin au jardin des tuileries ou ailleurs, avait son atelier à Marly-le-Roi, dans les Yvelines, pas loin de chez moi donc !!! J'ai habité à Marly et je ne la savais pas ... Il faut dire qu'à l'époque mes promenades dans Marly se résumaient souvent à une ballade dans le parc avec le tricycle de mon fils alors bambin !!!

3c1c127d227c5041d42f02ea508e75f0.jpgJ'ai ainsi appris qu'Aristide Maillol avait commencé par peindre, se lia avec Gauguin et qu'un temps il fut très proche de Maurice Denis, Vuillard, Bonnard ... même s'il ne s'intégra jamais complètement au groupe des Nabis. Il fut aussi "designer" de tapisserie et son travail reflète sa grande admiration pour les Nabis, et l'utilisation de grands aplats de couleurs "sorties du tube", qui caractérisait leurs œuvres, se prêtait bien à une telle utilisation. J'ai découvert un site où l'on peut admirer plein de photos de ses peintures et tapisseries (http://pintura.aut.org/BU04?Autnum=12.889). J'ai ainsi pu ajouter une "femme lisant" à ma série !!!

Passionné d'art, Maillol et surtout sa muse et amie Dina Vierny avaient constitué une collection de tableaux des artistes qu'ils côtoyaient, Bonnard, Gauguin, Rousseau ... ainsi que de nombreux dessins de Suzanne Valadon, Picasso, Degas, Foujita ... que l'on peut admirer au Musée qui porte son nom.

d9ff43b87ca0c043480b03eb9220821b.jpgIl avait presque 40 ans quand une maladie d'oeil le poussa à devenir plutôt sculpteur, mais il n'abandonna jamais la peinture. C'est en 1905 seulement, après la parution d'articles d'Octave Mirbeau, de Gide et de Maurice Denis dans La Revue en avril 1905, et le Salon d'automne où était présenté le plâtre de la Méditerranée, que Maillol s'imposa comme un sculpteur. "La Méditerranée" attira alors l'attention autant par la perfection et la sobriété des formes que par son "silence" (Gide). Refusant le pathétique, les attitudes lisses, "sereines" de ses nus féminins rompent avec le lyrisme et les représentations fortement émotionnelles, déchirées de son contemporain Auguste Rodin, et sa représentation du mouvement, plus figé, qui essaie de préserver et même d'épurer la tradition de sculpture tirée de la Grèce classique et de Rome, s'apparente parfois à un art primitif.

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Je vous recommande le site de l'encyclopédie Insecula  ainsi que quelques photos des nus du Carrousel sur le blog "l'echo de mes pensées"  et sur un site australien 

Je vous recommande aussi de lire sur l'histoire d'une des sculptures de Maillol, "L'action enchaînée : hommage à Blanqui", superbe statue de bronze placée à l'origine en face de l’église de Puget-Théniers et maintenant exilée dans un petit square étriqué pour ne pas choquer les bien-pensants par sa nudité !!! une autre version de cette statue fait partie des 18 du Carrousel ...

Enfin, un itinéraire de promenade à Marly-le-Roi

mardi, 11 septembre 2007

Une grande dame nous a quitté

b934666257c2b5a65fab16f4f3de3f33.jpgEn allant visiter le blog de ma camarade Marie-Noelle Lienemann, j'apprends qu'Yvette Chassagne, première femme préfète en France, est décédée il y a une semaine, à l'âge de 85 ans.

Rien, aucun communiqué sur le site national de son parti, mon parti ! dommage qu'on n'y parle de la cause des femmes qu'au moment des élections ! 

C'est vrai j'ai raté  les articles de presse dans la rubrique "nécrologie", tel celui du Monde, daté du 9 septembre, qui saluait cette femme brillante qui, "toute son existence (elle) a joué les pionnières, n'hésitant pas à bousculer les préjugés et le machisme de l'administration française. Première femme "sous-directeur" au ministère des finances, première "conseiller maître" à la Cour des comptes, et enfin première "préfet" en 1981". Et je n'ai rien entendu aux infos, à la radio comme à la télé, trop occupés qu'ils étaient à nous parler du prix du cahier ou de la santé des rugbymen !!

Mais ce n'est pas tant à la socialiste, militante de la cause féminine, que je veux rendre hommage, mais à ma "payse", Yvette Brunetière, rédactrice auxiliaire à la préfecture de Bordeaux en 43-44 durant l'occupation allemande, qui fabriquait des faux papiers qu’elle transportait dans un sac à main à double fond, au nez de Maurice Papon, alors Préfet de la Gironde qui officiait quelques étages plus bas !!!

Heureusement, il y a quelques blogueuses, telle son amie Geneviève Tapié pour parler d'elle !

 

 

 

Sur la photo, on voit Yvette Chassagne en habit de préfète en 1981 (photo Richard Melloul/sygma/corbis reprise dans le Monde du 9 septembre)