vendredi, 08 juin 2007
The night of loveless nights
Il y a les mains terribles
Main noircie d'encre de l'écolier triste
Main rouge sur le mur de la chambre du crime
Main pâle de la morte
Mains qui tiennent un couteau ou un revolver
Mains ouvertes
Mains fermées
Mains abjectes qui tiennent un porte-plume
O ma main toi aussi toi aussi
Ma main avec tes lignes et pourtant c'est ainsi
Pourquoi maculer tes lignes mystérieuses
Pourquoi? plutôt les menottes plutôt te mutiler plutôt, plutôt
Écris, écris car c'est une lettre que tu écris a elle et ce moyen impur est un moyen de la toucher
Mains qui se tendent mains qui s'offrent
Y a-t-il une main sincère parmi elles
Ah je n'ose plus serrer les mains
Mains menteuses mains lâches mains que je hais
Mains qui avouent et qui tremblent quand je regarde les yeux
Y a-t-il encore une main que je puisse serrer avec confiance
Mains sur la bouche de l'amour
Mains sur le cœur sans amour
Mains au feu de l'amour
Mains à couper du faux amour
Mains basses sur l'amour
Mains mortes à l'amour
Mains forcées pour l'amour
Mains tenues sur l'amour
Mains hautes sur l'amour
Mains tendues vers l'amour
Mains d'oeuvre d'amour
Mains heureuses d'amour
Mains à la pâte hors l'amour horribles mains
Mains liées par l'amour éternellement
Mains lavées par l'amour par des flots implacables
Mains à la main c'est l'amour qui rôde
Mains pleines c'est encore l'amour
Mains armées c'est le véritable amour
Mains de maître mains de l'amour
Main chaude d'amour
Main offerte à l'amour
Main de justice main d'amour
Main forte à l'amour !
Mains Mains toutes les mains
Un homme se noie une main sort des flots
Un homme s'en va une main s'agite
Une main se crispe un coeur souffre
Une main se ferme ô divine colère
Une main encore une main
Une main sur mon épaule
Qui est-ce ?
Est-ce toi enfin ?
Il fait trop sombre ! quelles ténèbres !
Je ne sais plus à qui sont les mains
Ce qu'elles veulent
Ce qu'elles disent
Les mains sont trompeuses
Je me souviens encore de mains blanches dans l'obscurité étendues sur une table dans l'attente
Je me souviens de mains dont l'étreinte m'était chère
Et je ne sais plus
Il y a trop de traîtres trop de menteurs
Ah même ma main qui écrit
Un couteau ! une arme ! un outil !
Tout sauf écrire !
Du sang du sang!
Patience! ce jour se lèvera. [...]
Robert Desnos
Robert Desnos est mort le 8 juin 1945 au camp de concentration de Theresienstadt en Tchécoslovaquie
un autre poème de Robert Desnos à l'annexe
12:00 Publié dans peinture, poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
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