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mercredi, 29 décembre 2010

Le code du travail a 100 ans.

Le code du travail a eu 100 ans hier. Gérard Filoche était hier matin sur France-Info pour en parler

 


Gerard FILOCHE et le centenaire du Code du travail
envoyé par FranceInfo. - L'info internationale vidéo.

 

Le "Code du Travail et de la Prévoyance Sociale" a été initialisé par la loi du 28 décembre 1910 portant codification des lois ouvrières.

Pendant la première moitié du XIXe siècle un certain nombre de voix s’élèvent pour critiquer le code civil qui n’a rien prévu pour les ouvriers. On lui reproche surtout l’inégalité des cocontractants dans le contrat de louage de services. A partir de 1830 des libéraux en réclament la révision pour y inclure une législation du travail. Sous la Monarchie de juillet, les socialistes et le parti républicain et démocrate réclament des réformes en faveur des ouvriers. Sous le Second Empire, en 1866 un comité se fonde pour étudier et préparer la refonte du code civil. La question est reprise sous la Troisième République à partir des années 1880.

groussier1.jpgLa question de codification des lois ouvrières est posée pour la première fois en France devant le Parlement par le député socialiste Arthur Groussier, qui dépose le 14 avril 1896 une proposition de résolution chargeant la commission du travail de rassembler et réviser toutes les lois concernant la défense des intérêts des travailleurs et réglant leurs rapports avec leurs employeurs pour en faire un Code du travail.

Arthur Groussier reprend l’idée dans la législature suivante et dépose le 13 juin 1898, une proposition sur le code du travail où il a procédé lui-même à la codification.

La proposition Groussier réglemente la formation du contrat, les obligations qui en résultent, les indemnités qui doivent être allouées en cas de brusque rupture, la fixation et le mode de paiement des salaires. Elle proclame la limitation de la durée du travail effectif à huit heures par jour avec une seule exception : en cas de réparations ou travaux nécessités par un accident grave. Groussier écrivait dans l'exposé des motifs de sa proposition, que la diminution des heures de travail est le seul moyen, dans l'organisation sociale actuelle, d'amoindrir les misères et les souffrances du prolétariat. La proposition contient l'indication des mesures les plus essentielles pour assurer l'hygiène et la sécurité des travailleurs. Près de cent articles sont consacrés aux assurances du travail. Enfin, la proposition envisage la création de deux institutions nouvelles, celle des Chambres de travail qui établiront les statistiques relatives au travail, garantiront le bon fonctionnement de l'inspection et étudieront les questions concernant les rapports des travailleurs et de leurs employeurs, celle des Tribunaux du travail, composés de patrons et d'ouvriers, comme nos Conseils de prud'hommes actuels, mais qui n'auront pas seulement compétence pour trancher les litiges concernant les contrats de travail, mais régleront aussi les contestations ouvertes à la suite, soit d'un accident, soit d'une infraction aux dispositions sur l'hygiène et la sécurité du travailleur. En même temps qu'il comblait les lacunes de la législation sociale, Groussier s'efforçait de mettre en ordre les textes épars concernant les salariés et disséminés dans les nombreuses lois qui se sont succédé au cours du dix-neuvième siècle. "Chaque année, disait-il dans son exposé de motifs, de nouvelles lois viennent s'ajouter, contredisant quelquefois sans les abroger les textes existants. Les dispositions particulières au travail s'enchevêtrent dans des textes d'ordre différent concernant l'assistance, l'hygiène générale, la prévoyance, et ces lois le plus souvent n'intéressent qu'une profession, une catégorie de travailleurs. Aucune vue d'ensemble ne se dégage de leur examen.". Cette proposition n'est pas votée.

En 1900, pour remédier aux lenteurs de l’élaboration d’une législation du travail, le groupe socialiste de la Chambre propose la création d’un Ministère du travail et la mise à l’étude immédiate d’un code ouvrier, synthèse méthodique de toutes les lois votées. Le 26 mars 1901, le député Julien Goujon dépose un nouveau projet de loi codifiant les lois industrielles et ouvrières pour en faire un code du travail. En janvier 1903 le projet socialiste de code du travail est présenté à nouveau au Parlement par le député Victor Dejeante.

Le Ministre en charge du commerce et de l’industrie dans le gouvernement Waldeck-Rousseau, Alexandre Millerand, à la suite d’une autre proposition par Charles Benoist invitant le gouvernement à préparer un code du travail, institue une commission extra-parlementaire, chargée de la codification des lois du travail, mais il interdit à la commission d’introduire dans la législation une seule disposition nouvelle : son mandat unique est de codifier les lois en vigueur. Elle va travailler et aboutir à un projet d’ensemble divisé en six livres, dont elle présente les cinq premiers en avril 1904. Arthur Groussier a très activement collaboré à la rédaction des deux premiers livres, avec un juriste, Paul Sumien.

groussier2.jpgEn février 1905, le gouvernement s’approprie, sans changement, le texte préparé par la commission extraparlementaire, et dépose sur le bureau de la chambre, un projet englobant les livres I à V. La chambre le vote le 15 avril 1905 sans discussion et après de courtes observations du ministre du commerce Fernand Dubief, et des députés Jean Jaurès et Charles Benoist, rapporteur de la loi. Le Sénat est saisi, mais limite son examen au 1er livre malgré le rapport d’ensemble qui lui a été présenté par le sénateur Paul Strauss le 6 mars 1906

Le Sénat fait traîner son étude du texte transmis après le vote de la Chambre ; il disjoint les livres, fait des changements de détail et finalement vote le 7 juin 1910. La Chambre saisie à nouveau, conformément au rapport Groussier, pour accélérer le processus, vote le texte sénatorial qui devient la loi du 28 décembre 1910 qui sera complétée par un décret du 12 janvier 1911. Le livre I du code du travail rentre en vigueur le jour même de la publication du décret, soit le 18 janvier 1911. Ce livre contient 106 articles qui remplacent seize lois.

Seul le livre I est donc adopté ("Des conventions relatives au travail") par la loi du 28 décembre 1910, C’est un texte incomplet, promulgué hâtivement, qui ne change rien à la législation existante, mais qui constitue une "codification des lois ouvrières" dans lequel sont rassemblés tous les textes qui assurent la protection légale des travailleurs, ou qui leur garantissent tant le droit d'association, que la possibilité de faire juger leurs différends par une juridiction professionnelle. Certes, ce code n’a pas créé pour les travailleurs des droits nouveaux, mais ce rassemblement des textes a été fait avec méthode, afin de faire ressortir les insuffisances et les superfétations de la législation existante. Il constitue un document précis, dans lequel employeurs et travailleurs trouvent facilement la définition de leurs droits et devoirs.

Le Livre II traite de la réglementation du travail. C'est dans ce livre que se trouvent codifiées les lois sur la limitation des heures de travail et sur l'hygiène et la sécurité des travailleurs. Il sera adopté en juin 1912

Le Livre III a trait aux Groupements professionnels, livre IV concerne la juridiction et la représentation professionnelles. Les livres IV et III seront adoptés successivement en 1924 et 1927, après avoir perdu entre temps la partie V relative à la "prévoyance sociale".

Le code du travail concerne les salariés sous contrat de travail de droit privé, les salariés de secteur public étant soumis à des statuts particuliers.

Sa première grande refonte a eu lieu en 1973.

Plus récemment le gouvernement a mené entre février 2005 et mai 2008 une réécriture du code, dans le but affiché de le simplifier et de supprimer des dispositions jugées "obsolètes", ce qui a abouti en 2008 ... à doubler le nombre d'articles ! De plus ce Code du travail, a été largement affaibli par la loi TEPA qui vide de sa substance toute référence à une durée légale du travail, et par la réduction des moyens de contrôles de l'inspection du travail.

Des "bruits" courent que, à la demande du Medef, le gouvernement pourrait instituer une nouvelle mission d'étude pour le début d"année prochaine, devant se prononcer sur une nouvelle "simplification"...

vendredi, 24 décembre 2010

Conte de Noël

VanGoghShoes1885.jpgAllez, un autre conte de Noel d'Alphonse Allais ...

 

Ce matin-là, il n’y eut qu’un cri dans tout le Paradis :

— Le bon Dieu est mal luné aujourd’hui. Malheur à celui qui contrarierait ses desseins!

L’impression générale était juste : le Créateur n’était pas à prendre avec des pincettes.

A l’archange qui vint se mettre à sa disposition pour le service de la journée, Il répondit sèchement :

— Zut! fichez-moi la paix!

Puis, Il passa nerveusement Sa main dans Sa barbe blanche, s’affaissa — plutôt qu’il ne s’assit — sur Son trône d’or, frappa la nue d’un pied rageur et s’écria :

— Ah! j’en ai assez de tous ces humains ridicules et de leur sempiternel Noël, et de leurs sales gosses avec leurs sales godillots dans la cheminée. Cette année, ils auront … la peau!

Il fallait que le Père Éternel fût fort en colère pour employer cette triviale expression, Lui d’ordinaire si bien élevé.

— Envoyez-moi le bonhomme Noël, tout de suite ! ajouta-t-Il.

Et comme personne ne bougeait :

— Eh bien! vous autres, ajouta Dieu, qu’est-ce que vous attendez? Vous, Paddy, vieux poivrot, allez me quérir le bonhomme Noël!

(Celui que le Tout-Puissant appelle familièrement Paddy n’est autre que saint Patrick, le patron des Irlandais.)

Et l’on entendit à la cantonade :

— Allo ! Santa Claus! Come along, old chappie!

Le bon Dieu redoubla de fureur :

— Ce pochard de Paddy se croit encore à Dublin, sans doute ! Il ne doit cependant pas ignorer que j’ai interdit l’usage de la langue anglaise dans tout le séjour des Bienheureux!

Le bonhomme Noël se présenta :

— Ah ! te voilà, toi!

— Mais oui, Seigneur!

— Eh bien! tu me feras le plaisir, cette nuit, de ne pas bouger du ciel…

— Cette nuit, Seigneur? Mais Notre-Seigneur n’y pense pas! C’est cette nuit… Noël!

— Précisément! précisément! fit Dieu en imitant, à s’y méprendre, l’accent de Raoul Ponchon.

— Et moi qui ai fait toutes mes petites provisions!…

— Le royaume des Cieux est assez riche pour n’être point à la merci même de ses plus vieux clients. Et puis … pour ce que ça nous rapporte !

— Le fait est !

— Ces gens-là n’ont même pas la reconnaissance du polichinelle… Je fais un pari qu’il y aura plus de monde, cette nuit, au Chat Noir qu’à Notre-Dame de Lorette. Veux-tu parier ?

— Mon Dieu, vous ne m’en voudrez pas, mais parier avec vous, la Source de tous les Tuyaux, serait faire métier de dupe.

— Tu as raison, sourit le Seigneur.

— Alors, c’est sérieux ? insista le bonhomme Noël.

— Tout ce qu’il y a de plus sérieux. Tu feras porter tes provisions de joujoux aux enfants des Limbes. En voilà qui sont autrement intéressants que les fils des Hommes. Pauvres gosses!

Un visible mécontentement se peignait sur la physionomie des anges, des saints et autres habitants du céleste séjour.

Dieu s’en aperçut.

— Ah! on se permet de ronchonner ! Eh bien ! mon petit père Noël, je vais corser mon programme ! Tu vas descendre sur terre cette nuit, et non seulement tu ne leur ficheras rien dans leurs ripatons, mais encore tu leur barboteras lesdits ripatons, et je me gaudis d’avance au spectacle de tous ces imbéciles contemplant demain matin leurs âtres veufs de chaussures.

— Mais… les pauvres ?… Les pauvres aussi ? Il me faudra enlever les pauvres petits souliers des pauvres petits pauvres ?

— Ah ! ne pleurniche pas, toi ! Les pauvres petits pauvres ! Ah! ils sont chouettes, les pauvres petits pauvres ! Voulez-vous savoir mon avis sur les victimes de l’Humanité Terrestre ? Eh bien ! ils me dégoûtent encore plus que les riches !… Quoi ! voilà des milliers et des milliers de robustes prolétaires qui, depuis des siècles, se laissent exploiter docilement par une minorité de fripouilles féodales, capitalistes ou pioupioutesques ! Et c’est à moi qu’ils s’en prennent de leurs détresses ! Je vais vous le dire franchement : Si j’avais été le petit Henry, ce n’est pas au café Terminus que j’aurais jeté ma bombe, mais chez un mastroquet du faubourg Antoine !

Dans un coin, saint Louis et sainte Élisabeth de Hongrie se regardaient, atterrés de ces propos :

— Et penser, remarqua saint Louis, qu’il n’y a pas deux mille ans, il disait : Obéissez aux Rois de la terre ! Où allons-nous, grand Dieu ! où allons-nous ? Le voilà qui tourne à l’anarchie !

Le Grand Architecte de l’Univers avait parlé d’un ton si sec que le bonhomme Noël se le tint pour dit.

Dans la nuit qui suivit, il visita toutes les cheminées du globe et recueillit soigneusement les petites chaussures qui les garnissaient.

Vous pensez bien qu’il ne songea même pas à remonter au ciel cette vertigineuse collection. Il la céda, pour une petite somme destinée à grossir le denier de Saint-Pierre, à des messieurs fort aimables, et voilà comment a pu s’ouvrir, hier, à des prix qui défient toute concurrence, 739, rue du Temple, la splendide maison:

AU BONHOMME NOËL

Spécialité de chaussures d’occasion en tous genres

pour bébés, garçonnets et fillettes.

Nous engageons vivement nos lecteurs à visiter ces vastes magasins, dont les intelligents directeurs, MM. Meyer et Lévy, ont su faire une des attractions de Paris.

 

Alphonse Allais

Deux et deux font cinq 

1895

jeudi, 23 décembre 2010

Le veau - conte de noël pour Sara Salis

veau.jpgIl y avait une fois un petit garçon qui avait été bien sage, bien sage. Alors, pour son petit Noël, son papa lui avait donné un veau.

- Un vrai ?

- Oui, Sara, un vrai.

- En viande et en peau ?

- Oui, Sara, en viande et en peau.

- Qui marchait avec ses pattes ?

- Puisque je te dis un vrai veau

- Alors ?

- Alors, le petit garçon était bien content d'avoir un veau seulement, comme il faisait des saletés dans le salon...

- Le petit garçon ?

- Non, le veau... Comme il faisait des saletés et du bruit, et qu'il cassait les joujoux de ses petites soeurs...

- Il avait des petites soeurs, le veau ?

- Mais non, les petites soeurs du petit garçon... Alors on lui bâtit une petite cabane dans le jardin, une jolie petite cabane en bois...

- Avec des petites fenêtres ?

- Oui, Sara, des tas de petites fenêtres et des carreaux de toutes couleurs... Le soir, c'était le réveillon. Le papa et la maman du petit garçon étaient invités à souper chez une dame. Après dîner, on endort le petit garçon et ses parents s'en vont...

- On l'a laissé tout seul à la maison ?

- Non, il y avait sa bonne... Seulement, le petit garçon ne dormait pas. Il faisait semblant. Quand la bonne a été couchée, le petit garçon s'est levé et il a été trouver des petits camarades qui demeuraient à côté...

- Tout nu ?

- Oh ! non, il était habillé. Alors tous ces petits polissons, qui voulaient faire réveillon comme des grandes personnes, sont entrés dans la maison, mais ils ont été attrapés, la salle à manger et la cuisine étaient fermées. Alors, qu'est-ce qu'ils ont fait ?...

- Qu'est-ce qu'ils ont fait, dis ?

- Ils sont descendus dans le jardin et ils ont mangé le veau...

- Tout cru ?

- Tout cru, tout cru.

- Oh ! les vilains !

- Comme le veau cru est très difficile à digérer, tous ces petits polissons ont été très malades le lendemain. Heureusement que le médecin est venu ! On leur a fait boire beaucoup de tisane, et ils ont été guéris... Seulement, depuis ce moment-là, on n'a plus jamais donné de veau au petit garçon.

- Alors, qu'est-ce qu'il a dit, le petit garçon ?

- Le petit garçon..., il s'en fiche pas mal.

Alphonse Allais (À se tordre - 1891)

mercredi, 22 décembre 2010

demande au Père Noel

Cherche beau jeune homme ayant belles manières

Belles manières qu'on ne trouve plus guère

Ni dans nos villes ni dans nos chaumières.

 

picasso_portraitdejaimesabartes.jpg

 

Bien propre, bien soigné,

Bien astiqué, bien peigné,

Pouvant aller chez les comtesses

Sans pour autant pincer leurs fesses.

 

Poussant l'aveugle dans le noir

Cédant volontiers le trottoir.

Ouvrant la porte de la Mercédès

Au toutou de sa maîtresse.

S'aplatissant dans l'ascenseur

Jusqu'à réduire son épaisseur.

Toujours prêt à porter les bagages

Même si ça le met en nage.

Pressant entre ses mains la main des dames

Quand elles ont des états d'âme.

L'air le plus compréhensif

Devant le facultatif.

Connaissant l'heure des trains

La robe des meilleurs vins.

 

Une manière exquise de sourire

Et de parler pour ne rien dire.

 

René de Obadia de l'Académie française

Fantasmes de Demoiselles

Femmes faites ou défaites cherchant l'âme soeur

lundi, 20 décembre 2010

Il y a 25 ans, ouverture des premiers “ Restos du cœur ”.

Coluche.jpgIl y a 25 ans, le 21 décembre 1985, l'association de lutte contre la pauvreté fondée par le Coluche ouvre ses premiers centres de distribution de vivres dans toute la France.

Une rencontre insolite est à l’origine du concept des Restos du Cœur, celle de Coluche et du député belge au Parlement Européen José Happart. Celui-ci avait introduit une "motion sur la pauvreté" au Parlement de Strasbourg, où il demande que les surplus alimentaires chèrement stockés et détruits soient mis à la disposition de ceux qui en ont besoin. Malheureusement, celle-ci laisse tout le monde indifférent.

Dans les mois qui suivent, Coluche, profitant de l’antenne d’Europe 1, crie la détresse et la misère de certains face au monde, au gaspillage de la société de consommation, à la satisfaction des nantis, au dénuement, au paupérisme des autres. Cette série d’émissions lui vaut nombre d’appels de détresse. C’est à ce moment que lui revient en mémoire l’interpellation du député belge. Et le 26 septembre, Coluche dénonce lui aussi la destruction des surplus agricoles en France et en Europe. "J'ai une petite idée comme ça. Si des fois y'a des marques qui sont intéressées par sponsorer une cantine gratuite qu'on pourrait commencer par faire à Paris, nous on est prêts à aider une entreprise comme ça qui ferait un resto qui aurait comme ambition, au départ, de distribuer 2 000 à 3 000 couverts par jour [...] Quand il y a des excédents de bouffe à droite à gauche, et qu’on les détruit pour maintenir les prix sur le marché, on pourrait les récupérer [...]  et on essaiera de faire un grande cantine pour donner à manger à tous ceux qui ont faim."

 

 

 

 

L’idée des "restos du cœur" est lancée … Plus de 5 000 bénévoles se mettent au service de cette initiative. Jusqu'au 21 mars, au début du printemps, ils distribuent 8,5 millions de repas. Jean-Jacques Goldman crée la Chanson des Restos "Aujourd'hui, on n'a plus le droit, ni d'avoir faim ni d'avoir froid ..." qui va faire un tube et attirer l'attention de tous les médias. Une première émission de télévision est organisée face à l'événement : elle récoltera des millions de francs de dons.

 

 

 

 

Coluche ne veut pas en rester là et entend interpeller un maximum de responsables politiques. Il entre en contact avec José Happart en lui demandant une entrée au Parlement Européen. Happart accepte. En février 86, Coluche plaide la cause des Restos devant le Parlement européen en soulignant que les surplus de nourriture coûtent davantage si on les stocke que si on les distribue gratuitement aux pauvres. Il sera entendu et en 1987 le PEAD (Programme Européen d’Aide aux plus démunis) est institué ... Ces stocks sont distribués par quatre associations dès 1987 : la banque alimentaire de l'abbé Pierre, la Croix-Rouge, le Secours populaire et bien sûr les Restos du Coeur.

Durant l'hiver 1986-1987, une deuxième campagne s’organise, malgré la disparition de Coluche, des associations départementales se créent portant les nom et logo des Restos du Cœur. Ils distribuent 11,5 millions de repas et sont soutenus par 6 000 bénévoles. Le mouvement perdure et s'amplifie : l'année suivante, les Restos du Coeur organisent une autre campagne pour aider les plus démunis tout au long de l'année et non plus seulement en hiver. 22 millions de repas sont distribués par 7 300 bénévoles.

Peu de temps après avoir lancé les Restos du Cœur, Coluche constate que les plus nombreux donateurs sont ceux dont les revenus sont les plus bas. Or, rien ne les avantage fiscalement. Une injustice de plus !

Coluche décide de faire étudier le problème par des fiscalistes, et lance son idée au cours d'une émission télévisée réalisée en janvier 1986 sur TF1, quelques mois avant les élections législatives de décembre. Tous les leaders politiques, de la gauche à la droite, l'assurent alors de leur soutien à cette proposition de loi. Malheureusement, le 19 juin 1986 prive les partisans de ce texte de leur principal aiguillon, et un nouveau gouvernement oublie les engagements du précédent ... jusqu'en 1988, où Michel Charasse inscrit dans la Loi de Finances 1989 un texte proche de celui initialement proposé par Coluche. Et c'est à l'unanimité du Parlement que la "Loi Coluche" est votée en 1988, en référence au fondateur des Restaurants du Cœur. Son nom officiel est article 238 bis du Code Général des Impôts. Elle crée une réduction d'impôts supplémentaire pour les associations caritatives et humanitaires qui viennent en aide aux personnes en difficultés en fournissant de la nourriture, des soins ou un logement aux personnes dans la précarité. Comme le répondait Coluche à certains qui s'inquiétaient qu'il leur fasse de l'ombre : "Mais non ! Je vais vous faire du soleil !".

Cette même année, 25 millions de repas sont distribués par 8 500 bénévoles.

En 1989 a lieu la première tournée des Enfoirés, suivie d’un premier disque au profit de l’association.

affiche-resto-du-coeur.jpgAprès les Restos du Coeur, sont créés les Relais du Coeur destinés à aider les personnes dans leur démarche de réinsertion, les Camions du Coeur, quant à eux, vont dans les rues de Paris pour servir des repas chauds aux sans-abri. Mais la situation en France ne fait qu'empirer et les Restos doivent ouvrir les Toits du Coeur afin d'héberger des personnes en cours de réinsertion. Les chiffres des repas distribués et le nombre de bénévoles ne cessent d'augmenter année après année. Sont ensuite créés les Ateliers et les Jardins du Coeur pour redonner une vie sociale, un rythme de vie et un savoir-faire aux plus démunis. Les actions ne s'arrêtent pas là. Une maison de vacances est organisée à Châtellerault, les premiers relais bébés ouvrent leurs portes, la Péniche du Coeur est installée à Paris ainsi que des résidences sociales à Poissy, au Mans, à Dijon, etc ... des ateliers de lutte contre l'illettrisme sont mis en place ...

Aujourd'hui, la loi accorde aux particuliers qui font un don au profit de n'importe quelle association ou fondation, une réduction fiscale qui est fixée à 66% de la somme versée dans la limite de 20% du revenu imposable. L'amendement Coluche porte cette réduction d'impôt à 75% lorsque ces dons bénéficient aux associations comme les Restos du Coeur "qui procèdent à la fourniture gratuite de repas à des personnes en difficulté, qui contribuent à favoriser leur logement ou qui procèdent, à titre principal, à la fourniture gratuite de soins à des personnes en difficulté." (Art. 200-1 ter du code général des impôts).

Le consensus politique lors du vote de cette loi ne devait pourtant pas empêcher certains de la remettre en cause, comme ce fut le cas lors de l’examen de la loi sur le mécénat en plein mois d’août 2003 ... Mais grâce à l’intense mobilisation des bénévoles des Restos, la loi Coluche fut finalement sauvée et renforcée par les votes unanimes de l'Assemblée Nationale et du Sénat. Cette année encore, en septembre, dans un entretien aux Echos, le ministre du budget François Baroin ... dont la compagne, Michèle Laroque, ne cesse pourtant depuis des années de solliciter la générosité publique pour le Financement des Restos du Cœur avec Les Enfoirés … évoquait la possibilité de retoucher la loi "Coluche" sur les dons aux associations, alors que déjà les dons ont piqué du nez à cause de la crise économique ! Cette défiscalisation, est pourtant un moyens, pour les particuliers, de financer la vie associative, et notamment de soutenir des actions menées par les association suite au désengagement ou au désintérêt de l’état ! Et "la crise" a bien failli être le prétexte pour condamner a coup sûr l’ensemble des associations de Solidarité et d’entraide ! Alors que le slogan des Restos du Coeur est de plus en plus d'actualité ...

"On compte sur vous !"

Finalement le gouvernement a fait machine arrière ... mais pour combien de temps ?

mercredi, 15 décembre 2010

Le secret

arc_en_ciel_copie_m.jpgAllez, encore une petite "innocentine" ! quand on aime, on compte pas ...

 

Sur le chemin près du bois

J’ai trouvé tout un trésor :

Une coquille de noix

Une sauterelle en or

Un arc-en-ciel qu’était mort.

 

À personne je n’ai rien dit

Dans ma main je les ai pris

Et je l’ai tenue fermée

Fermée jusqu’à l’étrangler

Du lundi au samedi.

 

Le dimanche l’ai rouverte

Mais il n’y avait plus rien !

 

Et j’ai raconté au chien

Couché dans sa niche verte

Comme j’avais du chagrin.

 

Il m’a dit sans aboyer :

" Cette nuit, tu vas rêver. "

La nuit, il faisait si noir

Que j’ai cru à une histoire

Et que tout était perdu.

 

Mais d’un seul coup j’ai bien vu

Un navire dans le ciel

Traîné par une sauterelle

Sur des vagues d’arc-en-ciel !

 

René de Obaldia, in Innocentines, Poèmes pour enfants et quelques adultes.

mardi, 14 décembre 2010

Ca ne vient pas de weakileak, mais ...

126.jpg 

 

 

Coq au vin

 

Au cours d’un grand dîner, la marquise, sans cause apparente, rendit son coq au vin sur le plastron de l’ambassadeur. L’assemblée voulut ne rien remarquer : elle était composée de nombreux diplomates.

Jusqu’ici, la marquise, jeune et singulièrement troublante, abreuvait de joie l’ambassadeur. Comment ce dernier aurait-il soupçonné que d’une bouche aussi divine, d’une telle voix de cristal, pussent jaillir des quartiers de coq, arrosés de ce liquide violet et généreux ?

Cela va attirer des complications avec la Russie, pensa le Turc qui faisait face à la marquise. Et, de satisfaction, il lissa sa fine moustache. L’Angleterre, voisin de la beauté et heureux pendant de l’ambassadeur, ramena son genou à bâbord. Son désir de coloniser la marquise se trouva quelque peu refroidi. Wang-Wei-Tchou en profita pour soulever la question de l’Antarctique. Les points de vue échangés témoignèrent de l’intelligence des hommes d’Etat, ainsi que de leur amour réciproque pour les Esquimaux.

La France restera toujours fidèle à sa tradition chevaleresque, claironna le général Beauchamp de Bompierre de Prepucet. C’est à cet instant qu’une deuxième vague de coq au vin atteignit le Turc, un peu trop souriant, en pleine ceinture.

L’on craignit pour les Dardanelles. L’Amérique étala ses pieds sur la table. Un hobereau donna de la crête. Plus éthérée que jamais, la marquise souriait à tous et se jeta sur la glace à la vanille. L’Angleterre prit nettement le large. Tout de même, la paix fut sauvegardée dans le monde quelques mois encore.

 

René De Obaldia  in « Les richesses naturelles »

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lundi, 13 décembre 2010

Chez moi

 

1302294_cc049.jpg

Chez moi, dit la petite fille

On élève un éléphant.

Le dimanche son œil brille

Quand papa le peint en blanc

 

Chez moi, dit le petit garçon

On élève une tortue.

Elle chante des chansons

En latin et en laitue.

 

Chez moi, dit la petite fille

Notre vaisselle est en or.

Quand on mange des lentilles

On croit manger un trésor.

 

Chez moi, dit le petit garçon

Nous avons une soupière

Qui vient tout droit de Soissons

Quand Clovis était notaire.

 

Chez moi, dit la petite fille

Ma grand-mère a cent mille ans.

Elle joue encore aux billes

Tout en se curant les dents.

 

Chez moi, dit le petit garçon

Mon grand-père a une barbe

Pleine pleine de pinsons

Qui empeste la rhubarbe.

 

Chez moi, dit la petite fille

Il y a trois cheminées

Et lorsque le feu pétille

On a chaud de trois côtés.

 

Chez moi, dit le petit garçon

Passe un train tous les minuits.

Au réveil mon caleçon

Est tout barbouillé de suie.

 

Chez moi, dit la petite fille

Le pape vient se confesser.

Il boit de la camomille

Une fois qu’on l’a fessé.

 

Chez moi, dit le petit garçon

Vit un Empereur chinois.

Il dort sur un paillasson

Aussi bien qu’un Iroquois.

 

Iroquois ! dit la petite fille

Tu veux te moquer de moi !

Si je trouve mon aiguille

Je vais te piquer le doigt !

 

Ce que c’est d’être une fille !

Répond le petit garçon.

Tu es bête comme une anguille

Bête comme un saucisson.

 

C’est moi qu’ai pris la Bastille

Quand t’étais dans les oignons.

Mais à une telle quille

Je n’en dirai pas plus long !

 

René de Obaldia (Innocentines")