lundi, 22 octobre 2007
La vie à en mourrir
La nuit qui précéda sa mort
Fut la plus courte de sa vie
L'idée qu'il existait encore
Lui brûlait le sang aux poignets
Le poids de son corps l'écœurait
Sa force le faisait gémir
C'est tout au fond de cette horreur
Qu'il a commencé à sourire
Il n'avait pas un camarade
Mais des millions et des millions
Pour le venger Il le savait
Et le jour se leva pour lui.
Paul Eluard
Avis (1942)
Ils s’appelaient Missak MANOUCHIAN, Louis COQUILLET, Henri BAJTSZTOCK, Tony BLONCOUR, René BOMPAIN, Honoré d’ESTIENNE d’ORVES, Léon JOST, Arthur LOUCHEUX, Guy MOQUET, Gabriel PERI ... Ils sont des milliers de résistants, célèbres ou anonymes, fusillés ou guillotinés pendant l’occupation, victimes des Allemands et de Vichy.
Dans l’attente de la mort, ils adressent à leur famille, à l’être aimé, à un(e) ami(e) leur dernière lettre. Ils parlent pour des milliers d’autres massacrés, déportés, victimes d’exécutions sommaires - qui sont morts sans laisser de témoignages écrits. A la dernière heure, ils disent leur amour, affirment leur foi, se soucient de leurs proches. Ils ne regrettent rien. Passés au crible de la censure ou transmis en cachette, leurs mots sont l’ultime acte de la résistance d’hommes restés debout face à leur destin.
Missak Manouchian, de la poésie à la lutte armée
Louis Coquillet alias "René" (1921 – 1942)
Et beaucoup d'autres ...
Ces lettres ont été éditées dans l'ouvrage "La vie à en mourir, Lettres de fusillés 1941-1944", paru aux éditions Tallandier. Lettres choisies et présentées par Guy Krivopissko, conservateur du Musée de la Résistance nationale, préface de François Marcot, post-face de Robert Hossein.
En commandant cet ouvrage par l’entremise du Musée de la Résistance nationale, vous aiderez financièrement au développement de cette association.
Daniel Mermet avait consacré 2 émissions à cet ouvrage en septembre 2003, le tout accompagné par la merveilleuse chanson de Léo, l’affiche rouge.
l’émission du 18 septembre 2003 sur www.la-bas.org
l’émission du 19 septembre 2003 sur www.la-bas.org
Missak Manouchian, responsable des FTP-MOI de Paris (été 1943), est né le 1er septembre 1906 dans une famille de paysans arméniens du petit village d'Adyaman, en Turquie.
Il a huit ans lorsque son père trouvera la mort au cours d'un massacre par des militaires turcs. Sa mère mourra de maladie, aggravée par la famine qui frappait la population arménienne.
La résistance arménienne à la domination turque accentuée par le conflit religieux opposant les deux nations, les premiers étant chrétiens orthodoxes entraîne de terribles massacres par le gouvernement turc. Près de deux millions d'arméniens, hommes et femmes, y ont trouvé la mort (1915-1918).
Agé de neuf ans, témoin de ces atrocités qu'on qualifie aujourd'hui de génocide par référence à celui des Juifs durant la Seconde Guerre mondiale Missak Manouchian en restera marqué pour la vie. De nature renfermée, il deviendra encore plus taciturne ce qui le conduira, vers l'âge de douze ou treize ans, à exprimer ses états d'âme en vers : "Un charmant petit enfant /A songé toute une nuit durant/ Qu'il fera à l'aube pourpre et douce / Des bouquets de roses". Recueilli comme des centaines d'autres orphelins par une institution chrétienne après avoir été hébergé dans une famille kurde, Missak gardera toujours le souvenir du martyre arménien mais aussi de la gentillesse des familles kurdes, ce qui le rapprochera, 25 ans plus tard, de ses camarades juifs de la résistance en France, eux-mêmes confrontés au génocide de leur peuple.
Arrivé en 1924 avec son jeune frère à Marseille, Missak apprendra la menuiserie et s'adonnera à des métiers de circonstance. Il consacrera les journées de chômage aux études, fréquentant les "universités ouvrières" créées par les syndicats ouvriers (CGT). Il fonde successivement deux revues littéraires, Tchank (Effort) puis Machagouyt (Culture). Dès 1937, on le trouvera en même temps à la tête du Comité de secours à l'Arménie, et rédacteur de son journal, Zangou (nom d'un fleuve en Arménie).
Le tragique rendez-vous du 16 novembre 1943 à Évry Petit-Bourg Rien à signaler sur les divers fronts. Mais ce matin-là, sous un ciel lourd, aux environs immédiats de la gare d'Évry Petit-Bourg (Essonne), va se jouer un épisode dramatique du " front invisible " où s'affrontent, à armes inégales, les Francs-Tireurs et Partisans immigrés (FTP-MOI) et les Brigades Spéciales de la police française aux ordres de la Gestapo.
"Filé" à partir de son domicile parisien, Missak Manouchian devait rencontrer, sur les berges de la Seine, Joseph Epstein, responsable des Francs-Tireurs Français pour l'Ile-de-France. Ils seront capturés sur la rive gauche après avoir tenté d'échapper aux policiers en civil lancés à leurs trousses. Ainsi a pris fin l'une des plus grandes opérations de police contre la résistance, notamment la formation militaire des volontaires immigrés d'origines juive, italienne, espagnole, arménienne... dont les faits d'armes, dans la capitale même, furent autant de coups portés au prestige de l'occupant. Ce qui leur valut la colère de Berlin qui exigeait de mettre rapidement les "terroristes juifs et étrangers hors d'état de nuire".
Missak Manouchian tombera au Mont-Valérien, avec vingt-et-un de ses camarades, sous les balles de l'ennemi, le 19 février 1944. Également condamnée à mort, la jeune femme, Olga (Golda) Bancic, sera décapitée en Allemagne. Joseph Epstein et vingt-huit autres partisans français seront fusillés le 11 avril 1944. Louis Aragon a écrit sur cet épisode un poème magnifique, chanté avec beaucoup d'émotion par Léo Férré.
Source (http://perso.orange.fr/pcf.evry/manouchian.htm)
Louis, Albert, Jean Coquillet est né le 6 mars 1921, à Saint-Méen-le-Grand (35), d'un père cheminot et d'une mère travaillant aussi à la S.N.C.F. Bon élève, il obtient à 12 ans une mention " bien" à son certificat d'études. Il va ensuite à l'E.P.S., École Primaire Supérieure, puis à l'École Industrielle. Il entre apprenti à l'École des Chemins de Fer de Rennes et devient lui aussi cheminot.
En 1938, il est l'un des dirigeants des Jeunesses Communistes.
Le 21 décembre 1939, comme son père, il devient Sapeur Pompier volontaire de la Ville de Rennes et habite avec sa famille dans le logement du Palais Saint-Georges.
Dès l'entrée des troupes allemandes, le 18 juin 1940, à Rennes, il organise la Jeunesse Communiste, appelle par tracts à lutter contre l'occupant et contre le gouvernement de Vichy. Dès juillet, Louis surnommé "Lizette", prend une part très active à la lutte clandestine, très vite il rentre en contact avec Henri Bannetel, étudiant en Médecine et René Le Herpeux, étudiant en Médecine, dirigeant des étudiants communistes. Autour de lui d'autres noms de la résistance rennaise : André Rouault, Jean Courcier, Robert Barbier, Jean Rolland, Bernard Sidobre, René Even, Raymond Le Cornec, Dinard, Rémy et Jules Le Brun, mais aussi Maurice Hay, Léost et Fourrier (fusillés le 30 décembre 1942, à la Maltière, à Saint-Jacques-de-la-Lande).
Louis Coquillet conduit les premières luttes des jeunes résistants, il est l'un des premiers F.T.P., Franc Tireur Partisan, et assure des liaisons Paris-Bretagne, transportant de grandes quantités d'armes et de tracts.
Fin 1940, il est secrétaire régional des Jeunesses Communistes.
Activement recherché, en août 1941, la police spéciale de Vichy se présente au domicile de la famille Coquillet au Palais Saint-Georges, seul Louis est absent. A son arrivée, il est ceinturé et fouillé, sur lui est trouvée une clef que le commissaire soupçonne être celle du local de fabrications de tracts et de cache d'armes. Sans perdre son sang froid, Louis Coquillet explique que c'est simplement la clef de l'appartement et le prouve sur-le-champ. Il introduit la clef dans la serrure et ferme violemment la porte et enferme tout le monde à l'intérieur. Louis se sauve à toutes jambes, se rend chez des camarades, retrouve ensuite sa fiancée et partent se réfugier tous les deux à Paris.
Il entre aux "Bataillons de la Jeunesse" de Paris. Le 23 août 1941, sous les ordres du Colonel Fabien, au métro Barbès, il participe à l'exécution d'un officier allemand. Il participe à de nombreuses opérations, comme l'attaque d'une centrale électrique ou l'attaque de la Feldgendarmerie, boulevard des Batignolles à Paris, où un autre officier allemand est tué.
Trop longtemps dans la clandestinité, il décide de se rendre dans un restaurant parisien où il est arrêté au cours d'un banal contrôle d'identité de la Police allemande. On trouvera sur lui un cachet de cyanure qu’il avait pour consigne d’avaler pour ne pas tomber vivant aux mains de la police.
Louis Coquillet est incarcéré à la prison de la Santé où il est torturé. Un procès à lieu à la maison de la chimie de Paris, transformé en tribunal pour la circonstance, 23 hommes dont Louis Coquillet sont condamnés à mort par des militaires allemands.
Louis Coquillet est fusillé, avec ses camarades d'infortunes le 17 avril 1942, au Mont-Valérien à Paris.
Il est titulaire à titre posthume de la Croix de Guerre avec l'étoile d'argent et de la Légion d'Honneur.
Source (http://assoc.orange.fr/memoiredeguerre/biogr/coquillet.htm)
Lire aussi http://www.resistance-ftpf.net/chimie/pages/louis-coquill... et http://www.humanite.fr/2003-09-20_Politique_-Mont-Valerie...
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Un jour sur terre
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samedi, 20 octobre 2007
Que ferons nous de ce mary jaloux?
Je pry a Dieu qu'on le puist escorchier.
Tant se prent il de près garde de nous
Que ne pouons l'un de l'autre approchier
A male hart on le puist atachier,
L'ort, vil, villain, de goute contrefait,
Qui tant de maulz et tant d'anuis nous fait!
Estranglé puist estre son corps des loups,
Qu'aussi ne sert il, mais que d'empeschier!
A quoy est bon ce vieillart plein de toux,
Fors a tencier, rechigner et crachier?
Dyable le puist amer ne tenir chier,
Je le hé trop, l'arné, vieil et deffait,
Qui tant de maulz et tant d'anuis nous fait!
Hé! qu'il dessert bien qu'on le face coux
Le baboïn qui ne fait que cerchier
Par sa maison! hé quel avoir! secoux
Un pou sa pel pour faire aler couchier,
Ou les degrez lui faire, sanz marchier,
Tost avaler au villain plein d'agait,
Qui tant de maulz et tant d'anuis nous fait
Christine De Pisan
Balade LXXVIII
Et en Français d'aujourd'hui ...
Que ferons-nous de ce mari jaloux?
Je prie Dieu qu'on le puisse écorcher.
Il nous surveille de si près
que nous ne pouvons nous approcher l'un de l'autre.
Puisse-t-on le pendre à une mauvaise corde,
l'infâme, l'affreux, le vilain, contrefait par la goutte,
qui tant de maux et tant d'ennuis nous fait !
Qu'il puisse être étranglé par les loups,
vu qu'il ne sert à rien, sauf à être un obstacle!
À quoi est bon ce vieillard plein de toux,
sinon à quereller, grogner et cracher?
Le diable l'aime et le chérisse,
je le hais trop, ce cocu, vieux et laid,
qui tant de maux et tant d'ennuis nous fait!
Hé ! qu'il mérite bien qu'on le fasse cocu,
le babouin qui passe son temps à espionner
dans sa maison ! Ah ! quelle affaire ! Secoue
un peu ses os pour le faire aller coucher,
ou lui faire descendre, sans marcher,
à toute allure l'escalier, à ce vilain plein de ruse,
qui tant de maux et tant d'ennuis nous fait !
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vendredi, 19 octobre 2007
Lendemain de grève
LE TRAIN
Une locomotive suivie de vingt wagons.
Quelques gouttes de pluie claquent comme des balles.
Une femme en bleu qu'étreint un homme en noir.
Des enfants que l'on gifle. Des valises qui s'ouvrent.
Des femmes qui s'insultent.
Des hommes qui s'énervent.
Des paquets qui culbutent et cognent les genoux.
Un vieillard qui prend peur, un infirme qu'on porte.
Un agent qui surprend un voleur qui s'enfuit.
Une aiguille qui saute sur un cadran radieux.
Un cheminot qui vient lorsqu'un postier s'en va.
Deux jeunes qui s'envoient des baisers de la main.
Quelques gouttes de pluie.
Un haut parleur qui parle.
Un homme. Une femme.
Un coup de sifflet qui déchire quelqu'un.
Un signal qui s'allume lorsqu'un autre s'éteint.
Un lourd rugissement.
Un homme qui serre les poings.
La gorge qui fait mal.
Deux mains qui se tendent.
Deux larmes qui coulent et un train qui s'en va...
Marcel Guy
Paroles à musique
Ed. Jupilles (1982)
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jeudi, 18 octobre 2007
Jour de grève
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mercredi, 17 octobre 2007
L'éternelle chanson
Lorsque mes cheveux blonds seront des cheveux blancs,
Au mois de mai, dans le jardin qui s'ensoleille,
Nous irons réchauffer nos vieux membres tremblants.
Comme le renouveau mettra nos cœurs en fête,
Nous nous croirons encore de jeunes amoureux,
Et je te sourirai tout en branlant la tête,
Et nous ferons un couple adorable de vieux.
Nous nous regarderons, assis sous notre treille,
Avec de petits yeux attendris et brillants,
Lorsque tu seras vieux et que je serai vieille,
Lorsque mes cheveux blonds seront des cheveux blancs.
Sur notre banc ami, tout verdâtre de mousse,
Sur le banc d'autrefois nous reviendrons causer,
Nous aurons une joie attendrie et très douce,
La phrase finissant toujours par un baiser.
Combien de fois jadis j'ai pu dire " Je t'aime " ?
Alors avec grand soin nous le recompterons.
Nous nous ressouviendrons de mille choses, même
De petits riens exquis dont nous radoterons.
Un rayon descendra, d'une caresse douce,
Parmi nos cheveux blancs, tout rose, se poser,
Quand sur notre vieux banc tout verdâtre de mousse,
Sur le banc d'autrefois nous reviendrons causer.
Et comme chaque jour je t'aime davantage,
Aujourd'hui plus qu'hier et bien moins que demain,
Qu'importeront alors les rides du visage ?
Mon amour se fera plus grave - et serein.
Songe que tous les jours des souvenirs s'entassent,
Mes souvenirs à moi seront aussi les tiens.
Ces communs souvenirs toujours plus nous enlacent
Et sans cesse entre nous tissent d'autres liens.
C'est vrai, nous serons vieux, très vieux, faiblis par l'âge,
Mais plus fort chaque jour je serrerai ta main
Car vois-tu chaque jour je t'aime davantage,
Aujourd'hui plus qu'hier et bien moins que demain.
Et de ce cher amour qui passe comme un rêve,
Je veux tout conserver dans le fond de mon cœur,
Retenir s'il se peut l'impression trop brève
Pour la re-savourer plus tard avec lenteur.
J'enfouis tout ce qui vient de lui comme un avare,
Thésaurisant avec ardeur pour mes vieux jours ;
Je serai riche alors d'une richesse rare
J'aurai gardé tout l'or de mes jeunes amours !
Ainsi de ce passé de bonheur qui s'achève,
Ma mémoire parfois me rendra la douceur ;
Et de ce cher amour qui passe comme un rêve
J'aurai tout conservé dans le fond de mon cœur.
Lorsque tu seras vieux et que je serai vieille,
Lorsque mes cheveux blonds seront des cheveux blancs,
Au mois de mai, dans le jardin qui s'ensoleille,
Nous irons réchauffer nos vieux membres tremblants.
Comme le renouveau mettra nos cœurs en fête,
Nous nous croirons encore aux jours heureux d'antan,
Et je te sourirai tout en branlant la tête
Et tu me parleras d'amour en chevrotant.
Nous nous regarderons, assis sous notre treille,
Avec de petits yeux attendris et brillants,
Lorsque tu seras vieux et que je serai vieille
Lorsque mes cheveux blonds seront des cheveux blancs
Rosemonde GÉRARD (1871-1933)
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Il y a 50 ans, le gouvernement le plus court !!!
Nommé président du Conseil le 17 octobre 1957, Antoine Pinay ne sera pas investi par l'Assemblée Nationale et il démissionnera le 18. Son gouvernement n'aura duré qu'une journée !!! Le 22 octobre, Guy Mollet lui succédera comme Président du Conseil ... pour 6 jours !
Retour sur l'année 1957 ... Le 7 janvier 1957, le gouvernement français confie au général Jacques Massu les pleins pouvoirs de police sur le Grand Alger. 8 000 hommes de la dixième division parachutiste de retour d’Égypte, où ils ont participé à la campagne de Suez, entrent dans Alger avec pour mission de "pacifier" la ville. La division est commandé par le Général Jacques Massu, à qui Robert Lacoste vient de donner les pleins pouvoirs, assisté des colonels Marcel Bigeard, Roger Trinquier et Yves Godard. Les parachutistes traquent les terroristes dans toute l'agglomération et pratiquent la torture pour faire parler les personnes suspectes d'avoir caché des bombes. Ils se justifient de leurs actes au nom de la nécessité. C'est le début de la "bataille d'alger"
La presse publie des témoignages qui dénoncent la torture, les exécutions sommaires de suspects, les jugements expéditifs par les tribunaux militaires, les centres de détention clandestins, etc. ... le 21 juillet, une commission d'enquête rend un rapport accablant, le quotidien Le Monde le publie le 6 octobre, ce qui lui vaut d'être saisi.
Sur le plan politique, en 1956 le gouvernement de Guy Mollet veut faire progresser l’intégration administrative de l'Algérie en remplaçant le gouverneur général par un ministre résident, en dissolvant l’Assemblée algérienne et en multipliant les communes, les arrondissements et les départements, sans toutefois procéder à des élections pour cause d’insécurité. Mais il propose aussi un nouveau statut à négocier entre le gouvernement français et les futurs élus des Algériens, devant concilier la "personnalité algérienne" et le maintien de "liens indissolubles" avec la France. Les divisions déchirent les partis, provoquent la rupture de la majorité de Front républicain au pouvoir depuis janvier 1956, et le retour à l'instabilité ministérielle des législatures précédentes Abandonné par la droite qui lui reproche sa politique financière et sociale, le gouvernement Mollet, qui lui, détient le record de longévité de la IVe République (16 mois ...) est mis en minorité par l'Assemblée nationale sur des mesures fiscales et démissionne en mai 1957. Il est remplacé par le gouvernement de Maurice Bourgès-Maunoury
Pendant ce temps le ministre résident Robert Lacoste élabore un projet de "loi-cadre", qui maintient l’Algérie sous la souveraineté de la France, mais qui la divise en territoires autonomes fédérés entre eux, dotés d’assemblées territoriales et d’une assemblée fédérative élues au suffrage universel dans un collège unique. Ce projet, approuvé en conseil des ministres le 13 septembre 1957, inquiète les Français d’Algérie et les défenseurs de l’intégration pure et simple. Le 30 septembre le projet est repoussé essentiellement par les communistes, les poujadistes et les gaullistes par 279 voix contre 253 et est refusée par le FLN. Le gouvernement Bourgès-Maunoury démissionne.
Son successeur Félix Gaillard fera adopter le 31 janvier 1958 un projet amendé, qui équilibre les assemblées élues au collège unique par des conseils représentant paritairement deux collèges homogènes suivant le statut civil "de droit commun" ou "de droit local" (musulman ou berbère). Mais cette loi-cadre ne sera jamais appliquée, à cause du renversement de la IVème République.
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mardi, 16 octobre 2007
il y a cinquante ans, le prix Nobel de littérature était attribué à Albert Camus
Après une conférence de presse donnée par Albert Camus à l'Ambassade de France à Stockholm le 9 décembre 1957, au cours de laquelle il évoquera entre autres les raisons de son départ de Combat, son adaptation des Possédés de Dostoïevski, la possibilité d'une communauté franco-musulmane en Algérie, son " optimisme indéracinable ", sa référence à saint Augustin et Pascal à l'égard du " sacré ", à la tradition classique française ; ou bien encore son sentiment de " fraternité " avec Simone Weil et René Char et son admiration pour l'oeuvre d'André Malraux, son discours d'acceptation du prix Nobel 1957 a été prononcé le lendemain, à l'Hôtel de Ville de Stockholm.
Sire, Madame, Altesses Royales, Mesdames, Messieurs,
En recevant la distinction dont votre libre Académie a bien voulu m'honorer, ma gratitude était d'autant plus profonde que je mesurais à quel point cette récompense dépassait mes mérites personnels. Tout homme et, à plus forte raison, tout artiste, désire être reconnu. Je le désire aussi. Mais il ne m'a pas été possible d'apprendre votre décision sans comparer son retentissement à ce que je suis réellement. Comment un homme presque jeune, riche de ses seuls doutes et d'une œuvre encore en chantier, habitué à vivre dans la solitude du travail ou dans les retraites de l'amitié, n'aurait-il pas appris avec une sorte de panique un arrêt qui le portait d'un coup, seul et réduit à lui-même, au centre d'une lumière crue ? De quel cœur aussi pouvait-il recevoir cet honneur à l'heure où, en Europe, d'autres écrivains, parmi les plus grands, sont réduits au silence, et dans le temps même où sa terre natale connaît un malheur incessant ?
J'ai connu ce désarroi et ce trouble intérieur. Pour retrouver la paix, il m'a fallu, en somme, me mettre en règle avec un sort trop généreux. Et, puisque je ne pouvais m'égaler à lui en m'appuyant sur mes seuls mérites, je n'ai rien trouvé d'autre pour m'aider que ce qui m'a soutenu tout au long de ma vie, et dans les circonstances les plus contraires : l'idée que je me fais de mon art et du rôle de l'écrivain. Permettez seulement que, dans un sentiment de reconnaissance et d'amitié, je vous dise, aussi simplement que je le pourrai, quelle est cette idée.
Je ne puis vivre personnellement sans mon art. Mais je n'ai jamais placé cet art au-dessus de tout. S'il m'est nécessaire au contraire, c'est qu'il ne se sépare de personne et me permet de vivre, tel que je suis, au niveau de tous. L'art n'est pas à mes yeux une réjouissance solitaire. Il est un moyen d'émouvoir le plus grand nombre d'hommes en leur offrant une image privilégiée des souffrances et des joies communes. Il oblige donc l'artiste à ne pas se séparer ; il le soumet à la vérité la plus humble et la plus universelle. Et celui qui, souvent, a choisi son destin d'artiste parce qu'il se sentait différent apprend bien vite qu'il ne nourrira son art, et sa différence, qu'en avouant sa ressemblance avec tous. L'artiste se forge dans cet aller retour perpétuel de lui aux autres, à mi-chemin de la beauté dont il ne peut se passer et de la communauté à laquelle il ne peut s'arracher. C'est pourquoi les vrais artistes ne méprisent rien ; ils s'obligent à comprendre au lieu de juger. Et s'ils ont un parti à prendre en ce monde ce ne peut être que celui d'une société où, selon le grand mot de Nietzsche, ne règnera plus le juge, mais le créateur, qu'il soit travailleur ou intellectuel.
Le rôle de l'écrivain, du même coup, ne se sépare pas de devoirs difficiles. Par définition, il ne peut se mettre aujourd'hui au service de ceux qui font l'histoire : il est au service de ceux qui la subissent. Ou sinon, le voici seul et privé de son art. Toutes les armées de la tyrannie avec leurs millions d'hommes ne l'enlèveront pas à la solitude, même et surtout s'il consent à prendre leur pas. Mais le silence d'un prisonnier inconnu, abandonné aux humiliations à l'autre bout du monde, suffit à retirer l'écrivain de l'exil chaque fois, du moins, qu'il parvient, au milieu des privilèges de la liberté, à ne pas oublier ce silence, et à le relayer pour le faire retentir par les moyens de l'art.
Aucun de nous n'est assez grand pour une pareille vocation. Mais dans toutes les circonstances de sa vie, obscur ou provisoirement célèbre, jeté dans les fers de la tyrannie ou libre pour un temps de s'exprimer, l'écrivain peut retrouver le sentiment d'une communauté vivante qui le justifiera, à la seule condition qu'il accepte, autant qu'il peut, les deux charges qui font la grandeur de son métier : le service de la vérité et celui de la liberté. Puisque sa vocation est de réunir le plus grand nombre d'hommes possible, elle ne peut s'accommoder du mensonge et de la servitude qui, là où ils règnent, font proliférer les solitudes. Quelles que soient nos infirmités personnelles, la noblesse de notre métier s'enracinera toujours dans deux engagements difficiles à maintenir : le refus de mentir sur ce que l'on sait et la résistance à l'oppression.
Pendant plus de vingt ans d'une histoire démentielle, perdu sans secours, comme tous les hommes de mon âge, dans les convulsions du temps, j'ai été soutenu ainsi : par le sentiment obscur qu'écrire était aujourd'hui un honneur, parce que cet acte obligeait, et obligeait à ne pas écrire seulement. Il m'obligeait particulièrement à porter, tel que j'étais et selon mes forces, avec tous ceux qui vivaient la même histoire, le malheur et l'espérance que nous partagions. Ces hommes, nés au début de la première guerre mondiale, qui ont eu vingt ans au moment où s'installaient à la fois le pouvoir hitlérien et les premiers procès révolutionnaires, qui furent confrontés ensuite, pour parfaire leur éducation, à la guerre d'Espagne, à la deuxième guerre mondiale, à l'univers concentrationnaire, à l'Europe de la torture et des prisons, doivent aujourd'hui élever leurs fils et leurs œuvres dans un monde menacé de destruction nucléaire. Personne, je suppose, ne peut leur demander d'être optimistes. Et je suis même d'avis que nous devons comprendre, sans cesser de lutter contre eux, l'erreur de ceux qui, par une surenchère de désespoir, ont revendiqué le droit au déshonneur, et se sont rués dans les nihilismes de l'époque. Mais il reste que la plupart d'entre nous, dans mon pays et en Europe, ont refusé ce nihilisme et se sont mis à la recherche d'une légitimité. Il leur a fallu se forger un art de vivre par temps de catastrophe, pour naître une seconde fois, et lutter ensuite, à visage découvert, contre l'instinct de mort à l'œuvre dans notre histoire.
Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu'elle ne le refera pas. Mais sa tâche est peut-être plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde se défasse. Héritière d'une histoire corrompue où se mêlent les révolutions déchues, les techniques devenues folles, les dieux morts et les idéologies exténuées, où de médiocres pouvoirs peuvent aujourd'hui tout détruire mais ne savent plus convaincre, où l'intelligence s'est abaissée jusqu'à se faire la servante de la haine et de l'oppression, cette génération a dû, en elle-même et autour d'elle, restaurer, à partir de ses seules négations, un peu de ce qui fait la dignité de vivre et de mourir. Devant un monde menacé de désintégration, où nos grands inquisiteurs risquent d'établir pour toujours les royaumes de la mort, elle sait qu'elle devrait, dans une sorte de course folle contre la montre, restaurer entre les nations une paix qui ne soit pas celle de la servitude, réconcilier à nouveau travail et culture, et refaire avec tous les hommes une arche d'alliance. Il n'est pas sûr qu'elle puisse jamais accomplir cette tâche immense, mais il est sûr que partout dans le monde, elle tient déjà son double pari de vérité et de liberté, et, à l'occasion, sait mourir sans haine pour lui. C'est elle qui mérite d'être saluée et encouragée partout où elle se trouve, et surtout là où elle se sacrifie. C'est sur elle, en tout cas, que, certain de votre accord profond, je voudrais reporter l'honneur que vous venez de me faire.
Du même coup, après avoir dit la noblesse du métier d'écrire, j'aurais remis l'écrivain à sa vraie place, n'ayant d'autres titres que ceux qu'il partage avec ses compagnons de lutte, vulnérable mais entêté, injuste et passionné de justice, construisant son œuvre sans honte ni orgueil à la vue de tous, sans cesse partagé entre la douleur et la beauté, et voué enfin à tirer de son être double les créations qu'il essaie obstinément d'édifier dans le mouvement destructeur de l'histoire. Qui, après cela, pourrait attendre de lui des solutions toutes faites et de belles morales ? La vérité est mystérieuse, fuyante, toujours à conquérir. La liberté est dangereuse, dure à vivre autant qu'exaltante. Nous devons marcher vers ces deux buts, péniblement, mais résolument, certains d'avance de nos défaillances sur un si long chemin. Quel écrivain, dès lors oserait, dans la bonne conscience, se faire prêcheur de vertu ? Quant à moi, il me faut dire une fois de plus que je ne suis rien de tout cela. Je n'ai jamais pu renoncer à la lumière, au bonheur d'être, à la vie libre où j'ai grandi. Mais bien que cette nostalgie explique beaucoup de mes erreurs et de mes fautes, elle m'a aidé sans doute à mieux comprendre mon métier, elle m'aide encore à me tenir, aveuglément, auprès de tous ces hommes silencieux qui ne supportent, dans le monde, la vie qui leur est faite que par le souvenir ou le retour de brefs et libres bonheurs.
Ramené ainsi à ce que je suis réellement, à mes limites, à mes dettes, comme à ma foi difficile, je me sens plus libre de vous montrer pour finir, l'étendue et la générosité de la distinction que vous venez de m'accorder, plus libre de vous dire aussi que je voudrais la recevoir comme un hommage rendu à tous ceux qui, partageant le même combat, n'en ont reçu aucun privilège, mais ont connu au contraire malheur et persécution. Il me restera alors à vous en remercier, du fond du cœur, et à vous faire publiquement, en témoignage personnel de gratitude, la même et ancienne promesse de fidélité que chaque artiste vrai, chaque jour, se fait à lui-même, dans le silence.
Et aussi, un autre merveilleux discours, avec la voix de l'écrivain
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lundi, 15 octobre 2007
Mata Hari ou la romance interrompue
Quand fleurissait la verveine
Au petit jour, les yeux bandés,
Au poteau l'espionne est placée
Et celle qu'on va fusiller
C'est elle ! C'est sa bien-aimée !
Fermant les yeux pour ne pas voir
Il cria : " Feu ! " C'était son devoir !
Dans les fossés de Vincennes
Le soleil se lève à peine
Sous les murs du fort
A passé la mort.
Et l'espionne a subi sa peine !
Et lui, brisé par l'effort,
Le cœur pris de folie soudaine
Eclate d'un grand rire alors
Dans les fossés de Vincennes !
Complainte écrite par Cami, chantée par Georgel, et fredonnée par toutes les lèvres à l'automne de 1917 et transcrite dans un article du Magazine littéraire de 1970
Il y a 90 ans, le 15 octobre 1917, Mata Hari était fusillée pour espionnage dans les fossés de la forteresse de Vincennes. Selon la légende, elle se serait écrié : " Quelle manie ont les Français de fusiller les gens à l'aube. J'aurais mieux aimé aller à Vincennes dans l'après-midi après un bon déjeuner " et aurait refusé le bandeau qu'on lui proposait et aurait lancé un dernier baiser aux soldats de son peloton d'exécution. Sa famille ne réclama pas le corps, qui fut confié au département d'anatomie de la faculté de médecine de Paris pour des recherches médicales.
Greta Garbo puis Jeanne Moreau et Maruschka Detmers ont immortalisé sa légende respectivement dans Greta Garbo, film américain réalisé par George Fitzmaurice, sorti en 1931, dans Mata-Hari, agent H 21, production franco-italienne réalisée par Jean-Louis Richard en 1964, sur un scénario de Jean-Louis Richard et François Truffaut, et dans Mata Hari, la vraie histoire, film d'Alain Tasma sorti en 2003
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vendredi, 12 octobre 2007
Octobre 2007 : 14ème édition de la campagne “Le cancer du sein, Parlons-en!”
En octobre 2007, pour la quatorzième année consécutive la campagne de lutte contre le cancer du sein et organisée par l'association "Le Cancer du Sein, Parlons-en !" nous propose de lutter contre le cancer du sein en nous informant et en dialoguant.
Convaincre les femmes du rôle primordial du dépistage précoce et faire progresser la recherche, telle est la vocation de cette campagne et de l'Association !
Dans mon cas, une sorte de malédiction familiale semblait s'acharner sur ma famille, touchant les femmes jeunes, et même les hommes (eh oui, qui sait que le cancer du sein existe aussi chez l'homme ? même des médecins l'ignorent ...). En 1992, on a identifié deux gènes (BRCA1 et BRCA2) qui sont associés à un risque élevé de cancer du sein. (et éventuellement d'autre types de cancer également).
J'ai donc subi des tests ADN à Villejuif, où l'on a pu mettre en évidence que j'étais moi aussi porteuse de l'anomalie. Depuis, on m'a proposé une prise en charge adaptée : mammographie et échographie tous les 6 mois, IRM tous les ans, et comme le risque d'un cancer des ovaires est également important, j'ai décidé une opération à titre préventif ... Mieux vaut prévenir que guérir !!! Me voilà maintenant rassurée pour moi. Ma fille et ma sœur qui ont fait le test ne sont pas porteuse, leurs enfants ne le seront pas ! reste à convaincre mon fils et mon frère de faire aussi le test !
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