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lundi, 07 décembre 2009

Te recuerdo Amanda

Il est des hommes dont la voix et l’engagement politique font vibrer les coeurs et les mémoires bien au-delà de leur mort. Le chanteur Victor Jara est de ceux-là au Chili. 36 ans après avoir été torturé et exécuté lors du coup d‘état d’Augusto Pinochet, il a été enterré dignement hier après trois jours d’hommage national.

“Son corps, détruit par la torture va retourner à la terre, entouré de l’amour de ses filles et de sa femme, et dans l’immense amour que son peuple et le monde ont exprimé,” a déclaré la fille du chanteur, Manuella Jara. Victor Jara avait été enterré à la sauvette en 1973. Sa dépouille a été exhumée en juin dernier pour des examens médico-légaux. Le dossier des morts et disparus de la dictature est loin d‘être clos. “Victor peut enfin reposer en paix après 36 ans, a souligné la présidente du Chili Michelle Bachelet. Mais beaucoup d’autres familles” aimeraient aussi retrouver la paix”. “Il est important de poursuivre la quête de justice et de vérité”. Un souhait partagé par la femme de Victor Jara. Son mari fut détenu dans le stade de Santiago avec 5000 autres prisonniers politiques en 1973. Ses bourreaux s’acharnèrent sur ses doigts de guitariste. Ils les brisèrent avant d’exécuter à la mitraillette le chanteur dont la voix, elle, continue de rimer avec résistance.

http://fr.euronews.net/2009/12/06/chili-enterrement-solen...

 

Te recuerdo Amanda

La calle mojada

Corriendo a la fábrica

Donde trabajaba Manuel.

La sonrisa ancha

La lluvia en el pelo,

No importaba nada

Ibas a encontrarte,

Con él, con él, con él

Son cinco minutos,

La vida es eterna

En cinco minutos.

Suena la sirena

De vuelta al trabajo,

Y tu caminando

Lo ilumina todos

Los cinco minutos

Te hacen florecer

Te recuerdo Amanda

La calle mojada

Corriendo a la fábrica

Donde trabajaba Manuel.

La sonrisa ancha

La lluvia en el pelo,

No importaba nada

Ibas a encontrarte,

Con él, con él, con él,

Que partió a la sierra

Que nunca hizó daño

Que partió a la sierra

Y en cinco minutos

Quedó destrozado.

Suena la sirena

De vuelta al trabajo ;

Muchos no volvieron,

Tampoco Manuel.

Te recuerdo Amanda…

Victor Jara (1968)

Je me souviens de toi, Amanda.

Les rues qui se mouillaient

tandis que tu marchais vers l'usine

où travaillait Manuel.

Un large sourire,

la pluie sur ton visage,

rien n'avait d'importance

car tu allais te retrouver avec lui,

avec lui, avec lui, avec lui...

Cinq minutes seulement.

La vie est éternelle

Pendant ces cinq minutes.

La sirène sonne,

La reprise du travail.

et toi tu marchais

en illuminant tout ce qui t'entourait.

Ces cinq minutes

t'avaient fait fleurir.

Je me souviens de toi, Amanda.

Les rues qui se mouillaient

tandis que tu marchais vers l'usine

où travaillait Manuel.

Un large sourire,

la pluie sur ton visage,

rien n'avait d'importance

car tu allais te trouver avec lui,

avec lui, avec lui, avec lui

qui est parti à la montagne,

qui ne faisait aucun mal,

qui est parti à la montagne

et qui en cinq minutes

a été déchiqueté.

La sirène sonne,

La reprise du travail.

Beaucoup d'entre eux ne sont pas revenus,

Manuel non plus.

Je me souviens de toi, Amanda.

Les rues qui se mouillaient

tandis que tu marchais vers l'usine

où travaillait Manuel.

 

mardi, 20 octobre 2009

Me lo decía mi abuelito

ns091008.JPGCes derniers jours, l'affaire de Jean Sarkozy et de sa nomination à l'EPAD (car je n'ose pas parler d'élection !) j'ai repensé à cette chanson de Paco Ibañez, dont j'ai trouvé la traduction ici ... Le texte est à l'origine un poème de Jose Agustin GOYTISOLO, écrivain et poète catalan. La traduction est du chanteur provençal Pierre Pascal, ami de Paco Ibanez qui traduit pour lui en espagnol les chansons de Georges Brassens.

 



podcast

 

Me lo decía mi abuelito,

me lo decía mi papá,

me lo dijeron muchas veces

y lo olvidaba muchas más.


Trabaja niño, no te pienses

que sin dinero vivirás.

Junta el esfuerzo y el ahorro

ábrete paso, ya verás,

como la vida te depara

buenos momentos, te alzarás

sobre los pobres y mezquinos

que no han sabido descollar.


Me lo decía mi abuelito,

me lo decía mi papá,

me lo dijeron muchas veces

y lo olvidaba muchas más.


La vida es lucha despiadada

nadie te ayuda, así, no más,

y si tú solo no adelantas,

te irán dejando atrás, atrás.

¡Anda muchacho dale duro !

La tierra toda, el sol i el mar,

son para aquellos que han sabido,

sentarse sobre los demás.


Me lo decía mi abuelito,

me lo decía mi papá,

me lo dijeron muchas veces,

y lo he olvidado siempre más.


traduction : mon grand-père me le disait


Refrain :

Mon grand-père me le disait

Et mon père me le disait

Et plus souvent ils me le dirent

Plus souvent moi je l'oubliais


Travaille fils ne vas pas croire

Que sans fortune tu vivras

Fais des efforts, économise

Joue bien des coudes et tu verras

Combien cette vie te réserve

De bons moments, tu fouleras

Aux pieds, les pauvres et les médiocres

Qui n'ont pas su sortir du tas

(Refrain)

La vie est une lutte impitoyable

Nul ne t'aidera pour tes beaux yeux

Si tu ne gravis pas l'échelle,

Tu resteras en bas, en bas

Allons gamin, travaille ferme

La terre, le mer et le soleil

Appartiennent à ceux qui marchent

Sur le ventre de leurs pareils

(Refrain)

dessin http://undessinparjour.wordpress.com/

mardi, 22 septembre 2009

sans papier

2341609605_1.jpgJ'ai pas de papier

D'après ce qu'on dit

Je vais me faire expulser

Vers ce maudit pays

J'entends même dire

Je vous jure c'est vrai

Que j'allais mourir

Si je résistais

Mettront sur le nez

Un de leur coussin

Voudront m'étouffer

Mais y sont pas bien

Pas de risque que je crie

M'auront bien scotché

La bouche et puis

Les mains les pieds


Tu sais d'où je viens

Y'a pas que des manchots

Ça frappe du poing

Même sur les marmots

Si tu gueules « j'ai faim »

On te coupe la langue

Si c'est « mort aux chiens !»

On te fou la sangle

Je croyais qu'ici

Les bras ouverts

On m'aurait dit

Respire le grand air

Je croyais qu'ici

Finis les cauchemars

Qui me réveillent la nuit

Maman !

J'ai peur dans le noir


Me voilà par terre

Dans cette église

C'est pas l'enfer

Mais ça s'éternise

Paraît que dehors

Y'a des uniformes

Qui veulent ma mort

En bonne et due forme

J'ai pas de papier

D'après ce qu'on dit

Je vais me faire expulser

Vers ce maudit pays

J'ai pas de papier

Et je sais même pas

Si je vais me faire tuer

Ici ou là-bas....


Gavroche

 

Photo : Linternationalmagazine.com

 

vendredi, 22 mai 2009

Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !

Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !

 

Au-dessus de l'île on voit des oiseaux

Tout autour de l'île il y a de l'eau

 

Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !

 

Qu'est-ce que c'est que ces hurlements

 

Bandit ! Voyou ! Voyou ! Chenapan !

 

C'est la meute des honnêtes gens

Qui fait la chasse à l'enfant

 

Il avait dit j'en ai assez de la maison de redressement

Et les gardiens à coup de clefs lui avaient brisé les dents

Et puis ils l'avaient laissé étendu sur le ciment

 

Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !

 

Maintenant il s'est sauvé

Et comme une bête traquée

Il galope dans la nuit

Et tous galopent après lui

Les gendarmes les touristes les rentiers les artistes

 

Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !

 

C'est la meute des honnêtes gens

Qui fait la chasse à l'enfant

 

Pour chasser l'enfant, pas besoin de permis

Tous le braves gens s'y sont mis

Qu'est-ce qui nage dans la nuit

Quels sont ces éclairs ces bruits

C'est un enfant qui s'enfuit

On tire sur lui à coups de fusil

 

Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !

 

Tous ces messieurs sur le rivage

Sont bredouilles et verts de rage

 

Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !

 

Rejoindras-tu le continent rejoindras-tu le continent !

 

Au-dessus de l'île on voit des oiseaux

Tout autour de l'île il y a de l'eau.

 

Jacques PREVERT

PAROLES

jeudi, 19 février 2009

Et pourquoi pas une lecture marathon de "la nausée" rue du faubourg Saint-Honoré ?

zdzislaw-beksinski1.jpg“La chose, qui attendait, s'est alertée, elle a fondu sur moi, elle se coule en moi, j'en suis plein. - Ce n'est rien: la Chose, c'est moi. L'existence, libérée, dégagée, reflue sur moi. J'existe.

J'existe. C'est doux, si doux, si lent. Et léger: on dirait que ça tient en l'air tout seul. Ça remue. Ce sont des effleurements partout qui fondent et s'évanouissent. Tout doux, tout doux. Il y a de l'eau mousseuse dans ma bouche. Je l'avale, elle glisse dans ma gorge, elle me caresse - et la voila qui renaît dans ma bouche, j'ai dans la bouche à perpétuité une petite mare d'eau blanchâtre - discrète - qui frôle ma langue. Et cette mare, c'est encore moi. Et la langue. Et la gorge, c'est moi.

Je vois ma main, qui s'épanouit sur la table. Elle vit - c'est moi. Elle s'ouvre, les doigts se déploient et pointent. Elle est sur le dos. Elle me montre son ventre gras. Elle a l'air d'une bête à la renverse. Les doigts, ce sont les pattes. Je m'amuse à les faire remuer, très vite, comme les pattes d'un crabe qui est tombé sur le dos. Le crabe est mort: les pattes se recroquevillent, se ramènent sur le ventre de ma main. Je vois les ongles - la seule chose de moi qui ne vit pas. Et encore. Ma main se retourne, s'étale à plat ventre, elle m'offre à présent son dos. Un dos argenté, un peu brillant - on dirait un poisson, s'il n'y avait pas les poils roux à la naissance des phalanges. Je sens ma main. C'est moi, ces deux bêtes qui s'agitent au bout de mes bras. Ma main gratte une de ses pattes, avec l'ongle d'une autre patte ; je sens son poids sur la table qui n'est pas moi. C'est long, long, cette impression de poids, ça ne passe pas. Il n'y a pas de raison pour que ça passe. A la longue, c'est intolérable... Je retire ma main, je la mets dans ma poche. Mais je sens tout de suite, à travers l'étoffe, la chaleur de ma cuisse. Aussitôt, je fais sauter ma main de ma poche; je la laisse pendre contre le dossier de la chaise. Maintenant, je sens son poids au bout de mon bras. Elle tire un peu, à peine, mollement, moelleusement, elle existe. Je n'insiste pas: ou que je la mette, elle continuera d'exister et je continuerai de sentir qu'elle existe; je ne peux pas la supprimer, ni supprimer le reste de mon corps, la chaleur humide qui salit ma chemise, ni toute cette graisse chaude qui tourne paresseusement comme si on la remuait à la cuiller, ni toutes les sensations qui se promènent là-dedans, qui vont et viennent, remontent de mon flanc à mon aisselle ou bien qui végètent doucement, du matin jusqu'au soir, dans leur coin habituel.

Je me lève en sursaut : si seulement je pouvais m'arrêter de penser, ça irait déjà mieux. Les pensées, c'est ce qu'il y a de plus fade. Plus fade encore que de la chair. Ça s'étire à n'en plus finir et ça laisse un drôle de goût. Et puis il y a les mots, au-dedans des pensées, les mots inachevés, les ébauches de phrases qui reviennent tout le temps : "Il faut que je fini... J'ex... Mort... M. de Roll est mort... Je ne suis pas... J'ex..." Ça va, ça va... et ça ne finit jamais. C'est pis que le reste parce que je me sens responsable et complice. Par exemple, cette espèce de rumination douloureuse :

j'existe, c'est moi qui l'entretiens. Moi. Le corps, ça vit tout seul, une fois que ça a commencé. Mais la pensée, c'est moi qui la continue, qui la déroule. J'existe. Je pense que j'existe. Oh ! le long serpentin, ce sentiment d'exister - et je le déroule, tout doucement... Si je pouvais m'empêcher de penser ! J'essaie, je réussis : il me semble que ma tête s'emplit de fumée... et voila que ça recommence :

"Fumée... ne pas penser... Je ne veux pas penser... Je pense que je ne veux pas penser. Il ne faut pas que je pense que je ne veux pas penser. Parce que c'est encore une pensée."

On n'en finira donc jamais ?

Ma pensée, c'est moi : voilà pourquoi je ne peux pas m'arrêter. J'existe par ce que je pense. .. et je ne peux pas m'empêcher de penser. En ce moment même - c'est affreux - si j'existe, c'est parce que j'ai horreur d'exister. C'est moi, c'est moi qui me tire du néant auquel j'aspire: la haine, le dégoût d'exister, ce sont autant de manières de me faire exister, de m'enfoncer dans l'existence. Les pensées naissent par derrière moi comme un vertige, je les sens naître derrière ma tête... si je cède, elles vont venir la devant, entre mes yeux - et je cède toujours, la pensée grossit, grossit, et la voilà, l'immense, qui me remplit tout entier et renouvelle mon existence. (...)

Je suis, j'existe, je pense donc je suis ; je suis parce que je pense, pourquoi est-ce que je pense ? je ne veux plus penser, je suis parce que je pense que je ne veux pas être, je pense que je... parce que... pouah!”

Jean-Paul Sartre - la nausée

tableau de Zdzislaw Beksinski

 

dimanche, 01 février 2009

On trouve des pépites sur dailymotion

En ces temps, plus ou moins inquiétants, où l'on va ficher les jeunes dès 13 ans (et même certains voudraient commencer à 3 ans ...), j'ai découvert un court métrage réalisé par des étudiants de l'Ecole supérieure des métiers d'art (ESMA) de Montpellier : il s'agit d'"Oracle", un système futuriste qui permet de découvrir l'avenir de nos enfants alors qu'ils viennent à peine de naitre, et ainsi de savoir si oui ou non il deviendra un délinquant, permettant alors de choisir de le garder ou non ... Ce logiciel novateur permettrait de baisser la violence dans le monde d'une manière significative ! Un père de famille découvre donc l'avenir de sa fille d'une manière dubitative ...

Cette animation est épatante par la qualité de sa réalisation, mais aussi heureusement par sa fin très humaniste ... bravo aux réalisateurs qui font passer implicitement une question récurrente, peut on tout contrôler ?


Oracle
envoyé par Esma-Movie

 

Une foule d'autres animations à savourer sur http://www.dailymotion.com/Esma-Movie

 

mercredi, 03 décembre 2008

"La France c’est comme une mobylette, pour avancer il lui faut du mélange."

marche des beurs.jpgIl y a 25 ans, le 3 décembre 1983, quelques personnes parties de Marseille le 15 octobre, et des dizaines de milliers d’autres qui les avaient rejoints arrivaient à Paris après un périple de 1.700 kilomètres, dans la liesse et l’espoir d’une reconnaissance de leur identité et de leur volonté d’intégration ... 100.000 personnes accueillent la Marche contre le racisme, rebaptisée "Marche des beurs"

"Est-ce parce que certains en mettent dans le couscous ?" ironise Coluche dans son chmilblik. Mais eux ne rigolent pas. Ils marchent, parlent, expliquent, arpentent les cités, rencontrent les associations, secouent les rares élus qui les reçoivent, et plantent le mot égalité sur le terrain du racisme. Un mouvement est né.

A la bastille ce 3 décembre, on s'enlace, on s'embrasse, on chante "douce France" avec Rachid Taha et le groupe Carte de Séjour, on scande le slogan qui depuis des semaines a ouvert la marche des beurs: "La France, c'est comme une Mobylette, pour avancer, il faut du mélange."

L'histoire a commencé à l'été 1981 à Vénissieux, entre les tours des Minguettes. Dans les banlieues ouvrières, à Lyon comme ailleurs, la crise avec son lot de licenciements et de fermetures d’usines, aggrave les tensions et chasse les habitants. Aux Minguettes sur 9 200 logements, 2 000 à 3 000 sont vides. Alors, les jeunes "rouillent" au bas des tours, s’approprient caves ou appartements vides, et se débrouillent pour vivre. A défaut de travail, ils trouvent d’autres sources de revenus, plus ou moins licites. Mitterrand vient d’être élu, la gauche est au pouvoir et le gouvernement compte quatre ministres communistes. Les révoltes de la banlieue lyonnaise apparaissent alors comme les signes ultimes d’une période révolue. Mais les affrontements entre les jeunes et la police dans les banlieues de l’est lyonnais, médiatisés à travers les fameux "rodéos" automobiles, prennent un tournant politique. En effet, la droite, encore sous le coup de sa déroute électorale de 1981, a décidé de relever la tête en attaquant le gouvernement sur la question de l’immigration et de la sécurité. "Il faut arrêter cette invasion par une véritable politique de l’immigration [...]. Nous demandons l’expulsion des faux étudiants et des délinquants", lit-on par exemple dans les tracts de la liste UDF-RPR à Paris. À Grenoble, d’autres dénoncent les origines arabes du maire, Hubert Dubedout, battu par Alain Carignon au premier tour. Et mars 1983 marque la première percée du Front national dans plusieurs villes : dans le XXème arrondissement de Paris, où Jean-Marie Le Pen recueille plus de 11% des voix, et à Dreux où le RPR René-Jean Fontanille et le FN Jean-Pierre Stirbois présentent une liste commune au premier tour qui rassemble près de 31% des voix.

marche des beurs2.jpgLa haine aussi, qui ne se contient plus : rodéos au pied des tours, jets de pierres, voitures incendiées, policiers à cran qui rôdent, à la recherche surtout de jeunes issus de l’immigration qu’ils considèrent avant tout comme des "délinquants étrangers", et qui ne pardonnent pas au pouvoir socialiste d'avoir aboli la peine de mort, ni les nouvelles dispositions législatives protégeant les étrangers arrivés avant l’âge de dix ans et coupables de petits délits.

Mi mars, juste après les élections, le meurtrier du jeune Ahmed Boutelja de Bron est remis en liberté. Le surlendemain, une imposante descente de police aux Minguettes pour une histoire de recel se transforme en affrontement collectif. Les violences policières mettent le feu aux poudres, et les policiers sont obligés de battre en retraite. Les jours suivants, leurs syndicats se lancent dans une virulente campagne publique, menacent le pouvoir d’"actes d’indiscipline" et exigent "la reprise des expulsions et des peines exemplaires pour les meneurs et leurs complices, des opérations systématiques de police avec de nombreux effectifs équipés de moyens pour le maintien de l’ordre", ainsi que "le quadrillage de la commune".

Dans ce contexte, une douzaine de jeunes décident d’une grève de la faim pour interpeller les pouvoirs publics sur une situation qui peut dégénérer à tout moment. Ils créent l’association SOS Avenir Minguettes et formulent une série de revendications concernant la police ou la justice, mais également la réhabilitation de la ZUP. Sur le terrain, les incidents se multiplient. A quelques jours de la destruction spectaculaire d’une première tour à Monmousseau, le 9 juin, la police fait une descente brutale dans le petit centre commercial et arrête Kamel, un des grévistes de la faim. Le 20 juin 1983, la police intervient de nouveau, elle lâche ses chiens. L'un d'entre eux attaque un jeune garçon. Toumi Djaidja tente d'éloigner l'animal. Un policier tire.

Pendant ce temps, éclate "l’été meurtrier" : Aux quatre coins de France, les crimes racistes se multiplient. Ce sont 19 maghrébins qui sont tués et plus d’une vingtaine blessés. Parmi eux, on dénombre beaucoup de jeunes, touchés par des balles tirées depuis les fenêtres du "Haut-du-Lièvre" à Nancy, des "3000" à Aulnay, des "Francs-Moisins" à Saint-Denis... A la cité "des 4000" de La Courneuve, c'est le drame, un habitant excédé vise un groupe d'enfants avec sa carabine, Toufik, 9 ans, tiré comme un pigeon, tombe au pied de sa barre la veille du 14 juillet. Au "Matin de Paris", les journalistes titrent "L'été des tontons-flingueurs". Un choc pour les jeunes issus de l’immigration qui n'ont que le mot égalité à la bouche. A côtés de ces jeunes se trouvent le père Christian Delorme, celui qu’on appelle le curé des Minguettes, et le pasteur Jean Costil. Surgit l’idée d’une marche sur une inspiration de Martin Luther King ou de Gandhi. . Deux revendications principales : une carte de séjour de dix ans et le droit de vote pour les étrangers

Mais il faut un peu de patience, une initiative d’une telle ampleur, ça s’organise. Les jeunes délèguent l’organisation à la Cimade de Lyon, ainsi qu’au MAN (mouvement pour une alternative non-violente). Christian Delorme et le pasteur Jean Costil obtiendront l’appui des réseaux chrétiens, humanistes et anti-racistes qui avaient permis à leur grève de la faim d’avril 1981 contre les expulsions d’aboutir. Le soutien des protestants, bien représentés au gouvernement, sera aussi particulièrement important pour la suite.

Voilà donc les jeunes de Vénissieux qui rejoignent ceux des quartiers Nord de Marseille. C’est parti. Dans l’indifférence quasi générale. A gauche, on s’en méfie, on les soupçonne même de vouloir gêner le gouvernement de Pierre Mauroy. La marche part de Marseille avec 32 personnes le 15 octobre 1983. Une seule personne, un étudiant les accueille à Salon de Provence, mais quelques jours plus tard, ils sont reçus par un millier de jeunes à Lyon, les partis de gauche appellent leurs militants à rejoindre les marcheurs et quelque soixante-dix associations, partis politiques et organisations syndicales apportent leur soutien. Des comités de soutien sont créés dans toute la France, qui récoltent des dons pour financer hébergement et repas. Bientôt, après les députés et les maires qui les reçoivent, ce sont des personnalités qui font quelques kilomètres avec eux, à commencer par Edmond Maire, le secrétaire général de la CFDT, puis Georgina Dufoix, alors ministre de la Famille, de la Population et des Travailleurs immigrés, Jack Lang, Monseigneur Lustiger ... mais ce sont donc les marcheurs qui décident et qui prennent la parole à chaque étape, davantage sur le mode affectif que politique. Craignant le risque de "récupération", ils interdisent banderoles et slogans jugés trop polémiques.

cependant les racistes ne désarment pas et pendant la marche, dont un des slogans est "Rengainez, on arrive", on apprend coup sur coup l'assassinat d'Habib Grimzi, un jeune algérien en visite chez sa famille à Bordeaux, jeté du train Bordeaux-Vintimille pendant la nuit du 14 novembre, après avoir été torturé par trois jeunes Français en route pour rejoindre la Légion étrangère, le meurtre d’un Maghrébin de 17 ans, tué par balles aux Minguettes, et d’autres incidents, toujours aux Minguettes ... A l’arrivée, 60 000 personnes défilent aux côtés des marcheurs avec les portraits des victimes des crimes racistes et sécuritaires, en scandant "Egalité des droits, justice pour tous", le gouvernement et des élus républicains des deux bords rejoignent en fanfare les marcheurs et 100 000 personnes envahissent la place de la Bastille, sous un beau ciel bleu. Georgina Dufoix, ministre des affaires sociales, assure que de nouvelles mesures contre le racisme vont être prises. Le président Mitterrand reçoit les marcheurs à l’Elysée (sauf, tout de même, les porteurs d’une inscription au casier judiciaire...) pendant trois quarts d’heure et annonce la création prochaine de la carte unique de dix ans pour les étrangers, (en remplacement des cartes de séjour et de travail), et "des mesures de principe pour que justice soit rendue aux jeunes victimes et à leur famille" (limitation des ventes d’armes, possibilité pour les associations de quartier de se constituer partie civile dans les affaires de crimes racistes, etc., mais il se contente de leur dire que le droit de vote pour les étrangers est "une de ses préoccupations". Vers 21 heures, ils reviennent à l’Espace Balard où se déroule une fête. La soirée est douce. Le rêve fou de quelques beurs obscurs et méprisés se transforme en formidable fête républicaine dont ils sont les héros. La "génération beur" vient-elle de naître ? Ils auraient tellement aimé le croire ...

Trois semaines seulement après l’euphorie de la Marche, les affrontements raciaux entre grévistes et non-grévistes à Talbot-Poissy sonnent déjà le glas de l’idylle. Les marcheurs soutiennent les travailleurs immigrés licenciés, signifiant par là-même leur refus de jouer la division entre les enfants, accueillis à bras ouverts au sein de la République, et les parents O.S. virés par milliers des usines.

Le 17 juillet 1984, l’Assemblée Nationale vote à l’unanimité la création d’une carte de résident de dix ans, délivrée "de plein droit" aux étrangers vivant en France. Mais dès le 4 décembre, le décret d’application lui adjoint une série de conditions restrictives, exigeant que les demandeurs fournissent la preuve de leur entrée régulière sur le territoire. En six mois, la principale conquête de la "Marche des Beurs" est venue buter sur la raison administrative, inaugurant vingt cinq ans d’une coexistence amère, et d’une politique d’immigration toujours plus suspicieuse ... jusqu'à mélanger les questions d'identité nationale avec d'autres questions, qui tiennent à l'origine !

mardi, 26 février 2008

Mémoire ...

Reçu ceci d'une copine et comme je trouve que c'est très bon, je me permets de vous le retransmettre :

"Désormais chaque année, à partir de la rentrée scolaire 2008, tous les enfants de CM2 se verront confier la mémoire d'un des 11 000 enfants victimes des lois Sarkozy-Hortefeux contre l'immigration. Les enfants de CM2 devront connaître le nom et l'existence d'un enfant renvoyé par avion dans son pays. Car rien n'est plus émouvant pour un enfant que l'histoire d'un enfant de son âge, qui avait les mêmes jeux, les mêmes joies et les mêmes espérances que lui."

vendredi, 18 janvier 2008

Le bal des faux culs


Alors que l’on s’apprête à enterrer le vote du 29 mai 2005, je reprends à mon compte ce titre de Politis car certains de mes camarades socialistes continuent vraiment à nous prendre pour des cons!

Entre Manuel Valls et Jacques Lang qui votent les yeux fermés le nouveau traité, Ségolène Royal qui renie sans vergogne ses engagements de campagne, il existe heureusement encore des camarades qui ont le sens de la légitimité démocratique et sauvent un peu l’honneur du PS. En effet, 51 députés PS, dont Laurent Fabius, Henri Emmanuelli, Arnaud Montebourg et Michel Vauzelle ont voté contre afin de protester contre la décision du président Nicolas Sarkozy de passer par la voie parlementaire pour ratifier le nouveau traité et non par référendum.

Henri Emmanuelli, lui, ne mâche pas ses mots dans l’interview qu’il donne au journal Libération de mardi. Revenant sur le boycott du Congrès, il juge cette position « incompréhensible ». Pour lui, il ne fait aucun doute qu’il faut aller à Versailles pour voter non à la révision de la constitution afin d’exiger un référendum sur le nouveau traité. Qu’il parle de Jean-Marc Ayrault, François Hollande ou Ségolène Royal, Emmanuelli n’est pas tendre. « Je sais que ceux qui l’ont menée (ndlr : la campagne) pour le oui n’ont jamais admis le vote du peuple français. Mais qu’ils aient le courage de le dire et qu’ils arrêtent d’expliquer que ceux qui veulent le faire respecter sont des tacticiens. » Et on comprend pourquoi Henri Emmanuelli veut proposer que lors du prochain congrès socialiste, « le futur ou la future secrétaire s’achète une boussole ». Si c’est pour se diriger vers la droite, nul besoin. Le PS est pour l'instant dans la bonne direction.

 

A lire aussi "la peur du peuple" l'édito de Denis Siffert dans Politis

 

Et pour finir, une petite citation : "On ne ment jamais autant qu’avant les élections, pendant la guerre et après la chasse." (Otto von Bismarck)

lundi, 10 décembre 2007

L'avenir de nos parents en danger dans le Sud-Yvelines

5deb36f1777e45aab34717adfcf65674.jpgIl existe dans notre département un réseau de santé le CARMAD  qui travaille sur Plaisir, Saint-Quentin-en Yvelines, ...

CARMAD, association Loi 1901, est un réseau de santé gérontologique de ville pour aider au maintien et au retour à domicile de la personne âgée de plus de 60 ans, ayant besoin d'aide, quel que soit l'état cognitif, avec l'accord du médecin traitant, du Patient et/ou de la famille. CARMAD propose alors un maintien sécurisé, un suivi, un contact permanent, une coordination. Actuellement il prend en charge 548 personnes dont la moyenne d’âge est de 79.8 ans.

bc80d852fa24dad56e077e4889fcb2a1.jpgOr je viens d'apprendre (sur les infos régionales de France 3) que la diminution de la subvention 2007/2008 accordée par la caisse d'assurance maladie URCAM-ARH (moins 43 % du financement antérieur), leur a été notifiée définitivement  et sans appel, le 30 octobre, sans aucun espoir d’un complément pour finir 2007.

Ce réseau, faute de financement, risque de fermer ses portes, laissant par force à l'abandon les personnes âgées qu'il avait prises en charge. A l'heure où tout le monde parle maintien à domicile, où notre Président de la République fait sa « com » sur le Plan « Alzheimer », comment cela est-il possible???

Visitez son site: www.carmad.fr, tout y est expliqué. Soutenez les, c'est l'avenir de nos parents qui est en danger.