lundi, 13 décembre 2010
Chez moi
Chez moi, dit la petite fille
On élève un éléphant.
Le dimanche son œil brille
Quand papa le peint en blanc
Chez moi, dit le petit garçon
On élève une tortue.
Elle chante des chansons
En latin et en laitue.
Chez moi, dit la petite fille
Notre vaisselle est en or.
Quand on mange des lentilles
On croit manger un trésor.
Chez moi, dit le petit garçon
Nous avons une soupière
Qui vient tout droit de Soissons
Quand Clovis était notaire.
Chez moi, dit la petite fille
Ma grand-mère a cent mille ans.
Elle joue encore aux billes
Tout en se curant les dents.
Chez moi, dit le petit garçon
Mon grand-père a une barbe
Pleine pleine de pinsons
Qui empeste la rhubarbe.
Chez moi, dit la petite fille
Il y a trois cheminées
Et lorsque le feu pétille
On a chaud de trois côtés.
Chez moi, dit le petit garçon
Passe un train tous les minuits.
Au réveil mon caleçon
Est tout barbouillé de suie.
Chez moi, dit la petite fille
Le pape vient se confesser.
Il boit de la camomille
Une fois qu’on l’a fessé.
Chez moi, dit le petit garçon
Vit un Empereur chinois.
Il dort sur un paillasson
Aussi bien qu’un Iroquois.
Iroquois ! dit la petite fille
Tu veux te moquer de moi !
Si je trouve mon aiguille
Je vais te piquer le doigt !
Ce que c’est d’être une fille !
Répond le petit garçon.
Tu es bête comme une anguille
Bête comme un saucisson.
C’est moi qu’ai pris la Bastille
Quand t’étais dans les oignons.
Mais à une telle quille
Je n’en dirai pas plus long !
René de Obaldia (Innocentines")
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mardi, 01 juin 2010
Palestine, pierre précieuse dans sa nuit sanglante
Mahmoud Darwich,
Deux extraits de Ne t'excuse pas, publié chez Actes Sud,
Pour notre patrie,
proche de la parole divine,
un toit de nuages.
Pour notre patrie,
distante des attributs du nom,
une carte de l'absence.
Pour notre patrie,
petite comme un grain de sésame,
un horizon céleste...et un abîme caché.
Pour notre patrie,
pauvre comme les ailes de la grouse,
des Livres saints...et une blessure à l'identité.
Pour notre patrie,
aux collines assiégées déchiquetées,
les embuscades du passé nouveau.
Pour notre patrie, butin de guerre,
le droit de mourir consumée d'amour.
Pierre précieuse dans sa nuit sanglante,
notre patrie resplendit au loin, au loin,
elle illumine à l'entour...
mais nous, en elle,
nous étouffons chaque jour davantage !
__________
Cadavres et anonymes.
Aucun oubli ne les réunit,
aucun souvenir ne les sépare...
Oubliés sur la voie publique,
dans l'herbe hivernale,
entre deux longs récits de bravoure
et de souffrances.
«Je suis la victime». «Non, je suis
l'unique victime». Ils n'ont pas répliqué:
«Une victime ne tue pas une autre,
et il y a dans cette histoire un assassin et une victime». Enfants,
ils cueillaient la neige sur les cyprès du Christ
et jouaient avec les angelots, car ils avaient
le même âge...Ils fuyaient
l'école pour échapper aux mathématiques
et à la vieille poésie héroïque. Aux barrages
ils jouaient avec les soldats au jeu innocent de la mort.
Ils ne leur disaient pas: «Laissez donc les fusils
et dégagez les routes que le papillon retrouve
sa mère auprès du matin,
que nous nous envolions avec le papillon
hors des rêves, car les rêves sont étroits
pour nos portes». Ils étaient petits,
ils jouaient et inventaient un conte pour la rose
rouge sous la neige, derrière deux longs récits
de bravoure et de souffrances,
puis ils s'échappaient
en compagnie des angelots
vers un ciel limpide.
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vendredi, 16 avril 2010
DARKNESS
Poème écrit suite à l'éruption du volcan Tambora, en 1815, en Indonésie
En 1815 , le mont Tambora, sur l'île de Sumbawa, en Indonésie, projette dans l'atmosphère d'énormes quantités de fine poussière. Longtemps ignorée puis considérée aujourd’hui comme la plus grande explosion volcanique de tous les temps, cette éruption tua plus de cent mille personnes en quelques secondes et bouleversa, un an après, l’équilibre du monde. Le volcan qui avait une altitude de 4 300 m, perd en quelques heures 1 500 m de hauteur (il culmine actuellement à 2 850 m) et éjecte près de 150 km3 de débris . Près du volcan, l’épaisseur des dépôts atteint une trentaine de mètres, sur une superficie d’environ 500 000 km2, soit la superficie de la France Après l'explosion, la poussière accumulée dans les hautes couches atmosphériques se déplace progressivement vers des latitudes plus élevées, sous l'effet des vents de la mousson qui soufflaient alors d’est en ouest, portant son ombre plus au nord. L'année suivante, la Nouvelle-Angleterre, le Canada et l'Europe de l'Ouest connaissent un été exceptionnellement froid. En Nouvelle-Angleterre, il neige au mois de juin et il gèle à pierre fendre pendant tout le mois d'août. En Europe, dans de nombreuses régions, les mauvaises récoltes de 1816 causent une grave pénurie de nourriture, voire des conditions voisines de la famine.
Cet été de 1816, Mary Shelley et son époux Percy Bysshe rendent visite à Lord Byron dans sa villa du Lac de Genève. La météo hostile les oblige à rester cloîtrés. Pour passer le temps, ils s’amusent à écrire des histoires de fantômes. Une seule restera à la postérité, Frankenstein. Lord Byron, lui, écrit une poésie sur cette éruption, Darkness.
Durant ces périodes sont également signalés des couchers de soleil prolongés et brillamment colorés, oranges ou rouges sur l'horizon, pourpres ou roses au-dessus. Ce phénomène nous est resté par les œuvres du peintre anglais William Turner (1775-1851), qui fit des aquarelles remarquables de ces couchers et de levers de soleil en 1815 et 1816. Ces phénomènes, que l'on a pu analyser aujourd'hui, semblent avoir été provoqués par le nuage éruptif du Tambora.
I had a dream, which was not all a dream.
The bright sun was extinguish'd, and the stars
Did wander darkling in the eternal space,
Rayless, and pathless, and the icy earth
Swung blind and blackening in the moonless air ;
Morn came and went - and came, and brought no day,
And men forgot their passions in the dread
Of this their desolation ; and all hearts
Were chill'd into a selfish prayer for light :
And they did live by watchfires - and the thrones,
The palaces of crowned kings - the huts,
The habitations of all things which dwell,
Were burnt for beacons ; cities were consum'd,
And men were gather'd round their blazing homes
To look once more into each other's face ;
Happy were those who dwelt within the eye
Of the volcanos, and their mountain-torch :
A fearful hope was all the world contain'd ;
Forests were set on fire - but hour by hour
They fell and faded - and the crackling trunks
Extinguish'd with a crash - and all was black.
The brows of men by the despairing light
Wore an unearthly aspect, as by fits
The flashes fell upon them ; some lay down
And hid their eyes and wept ; and some did rest
Their chins upon their clenched hands, and smil'd ;
And others hurried to and fro, and fed
Their funeral piles with fuel, and look'd up
With mad disquietude on the dull sky,
The pall of a past world ; and then again
With curses cast them down upon the dust,
And gnash'd their teeth and howl'd : the wild birds shriek'd
And, terrified, did flutter on the ground,
And flap their useless wings ; the wildest brutes
Came tame and tremulous ; and vipers crawl'd
And twin'd themselves among the multitude,
Hissing, but stingless - they were slain for food.
And War, which for a moment was no more,
Did glut himself again : a meal was bought
With blood, and each sate sullenly apart
Gorging himself in gloom : no love was left ;
All earth was but one thought - and that was death
Immediate and inglorious ; and the pang
Of famine fed upon all entrails - men
Died, and their bones were tombless as their flesh ;
The meagre by the meagre were devour'd,
Even dogs assail'd their masters, all save one,
And he was faithful to a corse, and kept
The birds and beasts and famish'd men at bay,
Till hunger clung them, or the dropping dead
Lur'd their lank jaws ; himself sought out no food,
But with a piteous and perpetual moan,
And a quick desolate cry, licking the hand
Which answer'd not with a caress - he died.
The crowd was famish'd by degrees ; but two
Of an enormous city did survive,
And they were enemies : they met beside
The dying embers of an altar-place
Where had been heap'd a mass of holy things
For an unholy usage ; they rak'd up,
And shivering scrap'd with their cold skeleton hands
The feeble ashes, and their feeble breath
Blew for a little life, and made a flame
Which was a mockery ; then they lifted up
Their eyes as it grew lighter, and beheld
Each other's aspects - saw, and shriek'd, and died -
Even of their mutual hideousness they died,
Unknowing who he was upon whose brow
Famine had written Fiend. The world was void,
The populous and the powerful was a lump,
Seasonless, herbless, treeless, manless, lifeless -
A lump of death - a chaos of hard clay.
The rivers, lakes and ocean all stood still,
And nothing stirr'd within their silent depths ;
Ships sailorless lay rotting on the sea,
And their masts fell down piecemeal : as they dropp'd
They slept on the abyss without a surge -
The waves were dead ; the tides were in their grave,
The moon, their mistress, had expir'd before ;
The winds were wither'd in the stagnant air,
And the clouds perish'd ; Darkness had no need
Of aid from them - She was the Universe.
LORD GEORGE BYRON
Diodati, July, 1816
Les ténèbres
Je fis un rêve qui n'était pas tout à fait un rêve. Le soleil s'était éteint, et les astres privés de lumière erraient au hasard à travers l'immensité de l'espace. La terre glacée et comme aveugle se balançait dans une atmosphère ténébreuse que n'éclairait plus la clarté de la lune. Le matin arriva, s'écoula, revint encore, mais il n'amenait plus le jour.
Dans cette désolation affreuse, les hommes oublièrent leurs passions. Tous les coeurs glacés d'effroi ne soupiraient qu'après la lumière. On allumait de grands feux, et l'on y passait tous ses intants. Les trônes, les palais des rois, les chaumières, les huttes du pauvre, tout fut brûlé pour servir de signaux. Les cités furent consumées, et les habitants, rassemblés autour de leurs demeures enflammées, cherchaient à se regarder encore une fois. Heureux ceux qui vivaient auprès des volcans et des montagnes brûlantes.
Une espérance mêlée de terreur; tel était le sentiment universel. On mit le feu aux forêts; mais d'heure en heure elles se réduisaient en cendres. Les troncs d'arbres tombaient avec un dernier craquement, s'éteignaient et tout rentrait dans une obscurité profonde. Le front des humains éclairé par ces flammes mourantes avait un aspect étrange. Les uns étaient prosternés, cachaient leurs yeux et répandaient des pleurs; les autres reposaient leurs têtes sur les mains jointes, et s'efforçaient de sourire; ceux-ci couraient çà et là, cherchant de quoi entretenir leurs bûchers funèbres. Ils regardaient avec une sombre inquiétude le firmament obscurci qui semblait un drap mortuaire jeté sur le cadavre du monde; puis ils se roulaient dans la poussière, grinçaient des dents, blasphémaient et poussaient des hurlements.
Les oiseaux de proie faisaient entendre des cris lugubres, et voltigeaient sur la terre en agitant leurs ailes inutiles. Les bêtes les plus féroces devenaient timides et tremblantes. Les vipères rampaient et s'entrelaçaient au milieu de la foule; elles sifflaient, mais leur venin était sans force; on les tua pour s'en nourrir.
La guerre qui avait un moment cessé, renaquit avec toutes ses horreurs. On acheta sa nourriture avec du sang, et chacun, assis à l'écart, se repaissait de sa proie. L'amour n'existait plus; il n'y avait plus qu'une pensée sur la terre, celle de la mort... et d'une mort prochaine et sans gloire. La faim, de sa dent cruelle, déchirait les entrailles. Les hommes mouraient, et leurs corps gisaient privés de sépulture. Des cadavres ambulants dévoraient les cadavres qui avaient vécu. Les chiens eux-mêmes assaillirent leurs maîtres, un seul excepté qui demeura fidèle au corps du sien et le défendit contre les oiseaux, les animaux et les hommes, jusqu'à ce que la faim les eût fait périr. Il ne chercha pas sa nourriture, mais léchant la main qui ne pouvait plus lui rendre ses caresses, il poussait des cris lamentables et continuels, et il mourut enfin.
La famine fit périr peu à peu tout le genre humain. Deux habitants d'une grande cité survécurent seuls : c'étaient deux ennemis. Ils se rencontrèrent auprès d'un autel sur lequel finissaient de brûler quelques tisons qui avaient consumé une foule d'objets sacrés destinés à un usage profane. Ils agitèrent en frissonnant les cendres chaudes avec leurs mains froides et décharnées; de leur faible souffle, ils essayèrent de ranimer les charbons presque éteints, et produisirent une légère flamme. Cette lueur passagère attira leurs regards, et en levant les yeux, ils aperçurent leurs visages : à cette vue, ils poussèrent un cri et moururent de l'effroi de leur laideur mutuelle, ne sachant lequel des deux la famine avait réduit à l'état d'un spectre.
Le monde n'était plus qu'un grand vide; la réunion des contrées populeuses et florissantes ne fut plus qu'une masse, sans saisons, sans verdure, sans arbres, sans hommes, sans vie, empire de la mort, chaos de la matière. Les rivières, les lacs, l'océan demeurèrent immobiles; rien ne troubla le silence de leurs profondeurs. Les navires sans matelots pourrirent sur la mer; leurs mâts tombèrent en pièces, mais sans faire rejaillir l'onde par leur chute. Les vagues étaient mortes; elles étaient comme ensevelies dans un tombeau; la lune qui les agitait autrefois avait cessé d'être. Les vents s'étaient flétris dans l'air stagnant, les nuages s'étaient évanouis; les ténèbres n'avaient plus besoin de leur secours, elles étaient tout l'univers.
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lundi, 07 décembre 2009
Te recuerdo Amanda
Il est des hommes dont la voix et l’engagement politique font vibrer les coeurs et les mémoires bien au-delà de leur mort. Le chanteur Victor Jara est de ceux-là au Chili. 36 ans après avoir été torturé et exécuté lors du coup d‘état d’Augusto Pinochet, il a été enterré dignement hier après trois jours d’hommage national.
“Son corps, détruit par la torture va retourner à la terre, entouré de l’amour de ses filles et de sa femme, et dans l’immense amour que son peuple et le monde ont exprimé,” a déclaré la fille du chanteur, Manuella Jara. Victor Jara avait été enterré à la sauvette en 1973. Sa dépouille a été exhumée en juin dernier pour des examens médico-légaux. Le dossier des morts et disparus de la dictature est loin d‘être clos. “Victor peut enfin reposer en paix après 36 ans, a souligné la présidente du Chili Michelle Bachelet. Mais beaucoup d’autres familles” aimeraient aussi retrouver la paix”. “Il est important de poursuivre la quête de justice et de vérité”. Un souhait partagé par la femme de Victor Jara. Son mari fut détenu dans le stade de Santiago avec 5000 autres prisonniers politiques en 1973. Ses bourreaux s’acharnèrent sur ses doigts de guitariste. Ils les brisèrent avant d’exécuter à la mitraillette le chanteur dont la voix, elle, continue de rimer avec résistance.
http://fr.euronews.net/2009/12/06/chili-enterrement-solen...
Te recuerdo Amanda
La calle mojada
Corriendo a la fábrica
Donde trabajaba Manuel.
La sonrisa ancha
La lluvia en el pelo,
No importaba nada
Ibas a encontrarte,
Con él, con él, con él
Son cinco minutos,
La vida es eterna
En cinco minutos.
Suena la sirena
De vuelta al trabajo,
Y tu caminando
Lo ilumina todos
Los cinco minutos
Te hacen florecer
Te recuerdo Amanda
La calle mojada
Corriendo a la fábrica
Donde trabajaba Manuel.
La sonrisa ancha
La lluvia en el pelo,
No importaba nada
Ibas a encontrarte,
Con él, con él, con él,
Que partió a la sierra
Que nunca hizó daño
Que partió a la sierra
Y en cinco minutos
Quedó destrozado.
Suena la sirena
De vuelta al trabajo ;
Muchos no volvieron,
Tampoco Manuel.
Te recuerdo Amanda…
Victor Jara (1968)
Je me souviens de toi, Amanda.
Les rues qui se mouillaient
tandis que tu marchais vers l'usine
où travaillait Manuel.
Un large sourire,
la pluie sur ton visage,
rien n'avait d'importance
car tu allais te retrouver avec lui,
avec lui, avec lui, avec lui...
Cinq minutes seulement.
La vie est éternelle
Pendant ces cinq minutes.
La sirène sonne,
La reprise du travail.
et toi tu marchais
en illuminant tout ce qui t'entourait.
Ces cinq minutes
t'avaient fait fleurir.
Je me souviens de toi, Amanda.
Les rues qui se mouillaient
tandis que tu marchais vers l'usine
où travaillait Manuel.
Un large sourire,
la pluie sur ton visage,
rien n'avait d'importance
car tu allais te trouver avec lui,
avec lui, avec lui, avec lui
qui est parti à la montagne,
qui ne faisait aucun mal,
qui est parti à la montagne
et qui en cinq minutes
a été déchiqueté.
La sirène sonne,
La reprise du travail.
Beaucoup d'entre eux ne sont pas revenus,
Manuel non plus.
Je me souviens de toi, Amanda.
Les rues qui se mouillaient
tandis que tu marchais vers l'usine
où travaillait Manuel.
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mardi, 20 octobre 2009
Me lo decía mi abuelito
Ces derniers jours, l'affaire de Jean Sarkozy et de sa nomination à l'EPAD (car je n'ose pas parler d'élection !) j'ai repensé à cette chanson de Paco Ibañez, dont j'ai trouvé la traduction ici ... Le texte est à l'origine un poème de Jose Agustin GOYTISOLO, écrivain et poète catalan. La traduction est du chanteur provençal Pierre Pascal, ami de Paco Ibanez qui traduit pour lui en espagnol les chansons de Georges Brassens.
Me lo decía mi abuelito,
me lo decía mi papá,
me lo dijeron muchas veces
y lo olvidaba muchas más.
Trabaja niño, no te pienses
que sin dinero vivirás.
Junta el esfuerzo y el ahorro
ábrete paso, ya verás,
como la vida te depara
buenos momentos, te alzarás
sobre los pobres y mezquinos
que no han sabido descollar.
Me lo decía mi abuelito,
me lo decía mi papá,
me lo dijeron muchas veces
y lo olvidaba muchas más.
La vida es lucha despiadada
nadie te ayuda, así, no más,
y si tú solo no adelantas,
te irán dejando atrás, atrás.
¡Anda muchacho dale duro !
La tierra toda, el sol i el mar,
son para aquellos que han sabido,
sentarse sobre los demás.
Me lo decía mi abuelito,
me lo decía mi papá,
me lo dijeron muchas veces,
y lo he olvidado siempre más.
traduction : mon grand-père me le disait
Refrain :
Mon grand-père me le disait
Et mon père me le disait
Et plus souvent ils me le dirent
Plus souvent moi je l'oubliais
Travaille fils ne vas pas croire
Que sans fortune tu vivras
Fais des efforts, économise
Joue bien des coudes et tu verras
Combien cette vie te réserve
De bons moments, tu fouleras
Aux pieds, les pauvres et les médiocres
Qui n'ont pas su sortir du tas
(Refrain)
La vie est une lutte impitoyable
Nul ne t'aidera pour tes beaux yeux
Si tu ne gravis pas l'échelle,
Tu resteras en bas, en bas
Allons gamin, travaille ferme
La terre, le mer et le soleil
Appartiennent à ceux qui marchent
Sur le ventre de leurs pareils
(Refrain)
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mardi, 06 octobre 2009
L'ENFANT QUI VA AUX COMMISSIONS
"Un pain, du beurre, un camembert,
mais surtout n'oublie pas le sel.
Reviens pour mettre le couvert,
ne va pas traîner la semelle."
L'enfant s'en va le nez au vent.
Le vent le voit. Le vent le flaire.
L'enfant devient un vol-au-vent,
l'enfant devient un fils de l'air.
"Reviens, reviens, au nom de Dieu !
Tu fais le malheur de ton père.
Ma soupe est déjà sur le feu.
Tu devais mettre le couvert !"
Léger, bien plus léger que l'air,
l'enfant est sourd à cet appel.
Il est déjà à Saint-Nazaire.
Il oublie le pain et le sel...
Claude Roy
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mardi, 22 septembre 2009
sans papier
D'après ce qu'on dit
Je vais me faire expulser
Vers ce maudit pays
J'entends même dire
Je vous jure c'est vrai
Que j'allais mourir
Si je résistais
Mettront sur le nez
Un de leur coussin
Voudront m'étouffer
Mais y sont pas bien
Pas de risque que je crie
M'auront bien scotché
La bouche et puis
Les mains les pieds
Tu sais d'où je viens
Y'a pas que des manchots
Ça frappe du poing
Même sur les marmots
Si tu gueules « j'ai faim »
On te coupe la langue
Si c'est « mort aux chiens !»
On te fou la sangle
Je croyais qu'ici
Les bras ouverts
On m'aurait dit
Respire le grand air
Je croyais qu'ici
Finis les cauchemars
Qui me réveillent la nuit
Maman !
J'ai peur dans le noir
Me voilà par terre
Dans cette église
C'est pas l'enfer
Mais ça s'éternise
Paraît que dehors
Y'a des uniformes
Qui veulent ma mort
En bonne et due forme
J'ai pas de papier
D'après ce qu'on dit
Je vais me faire expulser
Vers ce maudit pays
J'ai pas de papier
Et je sais même pas
Si je vais me faire tuer
Ici ou là-bas....
Gavroche
Photo : Linternationalmagazine.com
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vendredi, 22 mai 2009
Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !
Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !
Au-dessus de l'île on voit des oiseaux
Tout autour de l'île il y a de l'eau
Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !
Qu'est-ce que c'est que ces hurlements
Bandit ! Voyou ! Voyou ! Chenapan !
C'est la meute des honnêtes gens
Qui fait la chasse à l'enfant
Il avait dit j'en ai assez de la maison de redressement
Et les gardiens à coup de clefs lui avaient brisé les dents
Et puis ils l'avaient laissé étendu sur le ciment
Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !
Maintenant il s'est sauvé
Et comme une bête traquée
Il galope dans la nuit
Et tous galopent après lui
Les gendarmes les touristes les rentiers les artistes
Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !
C'est la meute des honnêtes gens
Qui fait la chasse à l'enfant
Pour chasser l'enfant, pas besoin de permis
Tous le braves gens s'y sont mis
Qu'est-ce qui nage dans la nuit
Quels sont ces éclairs ces bruits
C'est un enfant qui s'enfuit
On tire sur lui à coups de fusil
Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !
Tous ces messieurs sur le rivage
Sont bredouilles et verts de rage
Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !
Rejoindras-tu le continent rejoindras-tu le continent !
Au-dessus de l'île on voit des oiseaux
Tout autour de l'île il y a de l'eau.
Jacques PREVERT
PAROLES
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mercredi, 08 avril 2009
Femme nue, femme noire
Mon coeur est ardent, comme brûlant, mon soleil.
Grand aussi mon coeur, comme l'Afrique mon grand coeur.
Habitée d'un grand coeur, mais ne pouvoir aimer...
Aimer toute la terre, aimer tous ses fils.
Etre femme, mais ne pouvoir créer;
Créer, non seulement procréer.
Et femme africaine, lutter.
Encore lutter, pour s'élever plutôt.
Lutter pour effacer l'empreinte de la botte qui écrase.
Seigneur!... lutter
Contre les interdits, préjugés, leur poids.
Lutter encore, toujours, contre soi, contre tout.
Et pourtant!...
Rester Femme africaine, mais gagner l'autre.
Créer, non seulement procréer.
Assumer son destin dans le destin du monde
Mbengué Diakhaté Ndèye-Coumba
Filles du soleil.
Nouvelles Editions Africaines, 1980
Que ce poème réponde aux propos racistes et machistes d'Alain Destrem, un élu parisien méprisant et méprisable du 15ème arrondissement ...
Ndèye Coumba Mbengue Diakhaté a été institutrice et écrivaine Sénégalaise. Elle est décédée le 25 septembre 2001. La majeure partie du recueil "Filles du soleil" est composée de poèmes qui posent le problème de la condition sociale des femmes (L'Aveugle - mère , Mirage , Tu n'es qu'une femme , Négresse en laisse , Deux négresses ), mais évoque aussi la douleur face à la mort (Jeune femme morte , Veuve ce jour ). La dédicace du recueil est un poème à l'adresse d'une femme ayant perdu la vie en couches :
Ma soeur si douce!
Fleur à peine épanouie,
Mais très tôt perdit la vie,
Car voulant la donner
A Ndiar, nymphe des clairs de lune,
Et fille de Coumbam'lamb;
A toutes les filles de Râ,
Génitrices de chaleur.
Ventre en gésine,
Seins palpitants
De naissantes vies.
A l'Afrique-Coeur,
Mon coeur,
Et lumière du monde.
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mercredi, 11 mars 2009
Tant de temps
Le temps qui passe
Le temps qui ne passe pas
Le temps qu'on tue
Le temps de compter jusqu'a dix
Le temps qu'on n'a pas
Le temps qu'il fait
Le temps de s'ennuyer
Le temps de rêver
Le temps de l'agonie
Le temps qu'on perd
Le temps d'aimer
Le temps des cerises
Le mauvais temps
Et le bon et le beau
Et le froid et le temps chaud
Le temps de se retourner
Le temps des adieux
Le temps qu'il est bien temps
Le temps qui n'est même pas
Le temps de cligner de l'œil
Le temps relatif
Le temps de boire un coup
Le temps d'attendre
Le temps du bon bout
Le temps de mourir
Le temps qui ne se mesure pas
Le temps de crier gare
Le temps mort
Et puis l'éternité
Poèmes et poésies
Philippe Soupault
Éd. Grasset, coll. « Les Cahiers rouges », 1987.
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