dimanche, 22 février 2009
caminante, no hay camino
Caminante, son tus huellas
el camino, y nada mas ;
caminante, no hay camino,
se hace camino al andar.
Al andar se hace camino,
y al volver la vista atras
se ve la senda que nunca
se ha de volver a pisar.
Caminante, no hay camino,
sino estelas en la mar.
Marcheur, ce sont tes traces
ce chemin, et rien de plus ;
Marcheur, il n'y a pas de chemin,
Le chemin se construit en marchant.
En marchant se construit le chemin,
Et en regardant en arrière
On voit la sente que jamais
On ne foulera à nouveau.
Marcheur, il n'y a pas de chemin,
Seulement des sillages sur la mer.
Antonio Machado
(Proverbios y cantares – chant XXIX ''Campos de Castilla, 1917")
Traduction de José Parets-LLorca
Le poète espagnol Antonio Cipriano José María Machado Ruiz, connu sous le nom de Antonio Machado, fut contraint de fuir vers la France à la chute de la République Espagnole. Arrivé à Collioure, à quelques kilomètres de la frontière, épuisé, Machado y mourra le 22 février 1939, trois jours avant sa mère.
Louis Aragon lui rend hommage dans Les poètes, chanté par Jean Ferrat :
Machado dort à Collioure
Trois pas suffirent hors d'Espagne
Que le ciel pour lui se fît lourd
Il s'assit dans cette campagne
Et ferma les yeux pour toujours.
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vendredi, 13 février 2009
Fatrasies
C'est le titre de la version 2009 du Printemps des poètes qui se déroule du 2 au 15 mars.
Alors je vous ai réservé deux petites fatrasies modernes de Pascal Kaeser, poète-mathématicien suisse :
Un icosaèdre
couvre un hexaèdre
de ses leucocytes,
un dodécaèdre
ouvre un tétraèdre
à ses phagocytes.
Si l'icône a ses trachytes,
si l'otage a ses exèdres,
par contre les troglodytes
n'ont jamais pu peler Phèdre,
ni son beau-fils Hippolyte.
Ou encore :
Un chat quadrilingue,
dans une carlingue,
déclenche un esclandre.
Et une meringue
pointe sa seringue
vers l'homme au scaphandre.
" Sandwich à la salamandre ",
réclame un steward cradingue,
" ou mélasse et palissandre ",
ajoute-t-il d'un ton dingue,
avec sa voix de calandre.
En fait, j'ai découvert récemment les fatrasies, ces poèmes médiévaux apparemment incohérents qui, réunis à d'autres, formaient des petites pièces satiriques.
C'était au printemps dernier, lors d'une exposition sur les arts du Moyen-âge qui avait lieu dans mon département, et à laquelle participait ma prof d'enluminure.
Enluminures, donc, mais aussi calligraphie, vitrail, peinture, sculpture, photographie ... et c'est là que je rencontrais Bernadette Wiener et ses sculptures toujours drôles et parfois coquines, mais aussi son amour de la poésie. Elle m'avait donné un marque-pages sur ce sujet, que j'avais gardé et utilisé dans un gros bouquin que j'ai mis du temps à lire.
En fait je croyais que c'était une invention de sa part, et ce n'est donc que cette semaine que j'ai eu la curiosité d'aller vérifier sur internet ... eh oui, cela a bien existé au XIIIe siècle. Des cercles de lettrés s'adonnaient alors à des expérimentations joyeuses sur le langage dignes d’André Breton et de l'OuLiPo (Ouvroir de Littérature Potentielle) et s'illustrèrent dans ce type de composition comme en témoigne les Fatrasies d'Arras, recueil anonyme (souvent attribuées à Jehan Bodel) composé dans la deuxième moitié du Xlllème siècle dans une langue du Sud de la Picardie et conservé à l'Arsenal.
La fatrasie a une forme très rigoureuse, constituée par une strophe de six vers de cinq syllabes (rimes aabaab), suivis de cinq vers de sept syllabes (rimes babab), soit un onzain), mais son contenu est irrationnel. Les phrases grammaticalement correctes semblent ne pas avoir de sens réel, l'auteur s'y abandonne au pur plaisir des mots. Mais parfois ces phrases cachent des critiques ou des pamphlets du pouvoir en place. Malraux a pu écrire que "l'audience des fatrasies du Moyen Âge ne fut pas moindre que celle de Jérôme Bosch".
Allez, je vous en mets une des Fatrasies d'Arras en vieux picard !
Uns kailleus veluz
Devenoit rendus,
Ses pechiez plourant,
Et uns vieue baüs
Ocist quatre dus
Son cors desfendant ;
Mais mal lor fust convenant,
Se ne fust uns eternus
Qu'il troi firent en dormant,
Qui dit que li rois Artus
Estoit gros de vif emfant.
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samedi, 10 janvier 2009
Coplas por la muerte de su padre
Je viens de perdre un ami, et pure coincidence, France inter passait tout à l'heure cette belle chanson de Paco Ibáñez, tiré d'un long poème médiéval ... le début de la version "originale" du XVième siècle ...
I - Recuerde el alma dormida
Recuerde el alma dormida,
avive el seso y despierte
contemplando
cómo se pasa la vida,
cómo se viene la muerte
tan callando,
cuán presto se va el placer,
cómo, después de acordado,
da dolor;
cómo, a nuestro parecer,
cualquiera tiempo pasado
fue mejor
II - Pues si vemos lo presente
Pues si vemos lo presente
cómo en un punto se es ido
y acabado,
si juzgamos sabiamente,
daremos lo no venido
por pasado.
No se engañe nadie, no,
pensando que ha de durar
lo que espera
mas que duró lo que vio,
pues que todo ha de pasar
por tal manera.
III - Nuestras vidas son los ríos
Nuestras vidas son los ríos
que van a dar en la mar,
que es el morir,
allí van los señoríos
derechos a se acabar
y consumir;
allí los ríos caudales,
allí los otros medianos
y más chicos,
y llegados, son iguales
los que viven por sus manos
y los ricos.
La suite ici
Coplas por la muerte de su padre, appelé également Coplas a la muerte del maestro don Rodrigo, ou tout simplement coplas de Jorge Manrique, une élégie écrite par Jorge Manrique à la mort de son père. Écrite après le 11 Novembre 1476, date de la mort de Don Rodrigo Manrique, ce long poème constitue une des œuvres capitales de la la poésie castillan.
Le poème est composé de 40 strophes (on parle de "laisse" dans la littérature médiévale). Chacune est une suite 12 vers caractérisés par une alternance de deux octosyllabe suivis d'une tétrasyllabe ou d'une pentasyllabe. Pour sa part, Paco Ibáñez en a fait une version musicale dans les années 60 avec un rythme imposé par cette forme très particulière.
Et la chanson donc en vidéo ...
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Une fenêtre ouverte
La mort n'est jamais complète,
il y a toujours puisque je le dis
puisque je l'affirme
au bout du chagrin
une fenêtre ouverte
une fenêtre éclairée.
Il y a toujours un rêve qui veille,
désir à combler,
faim à satisfaire,
un cœur généreux
une main tendue
une main ouverte
des yeux attentifs
une vie, la vie à se partager.
Paul Eluard.
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mercredi, 31 décembre 2008
Tant de temps
Aujourd'hui, fin de l'année ...
Le temps qui passe
Le temps qui ne passe pas
Le temps qu'on tue
Le temps de compter jusqu'a dix
Le temps qu'on n'a pas
Le temps qu'il fait
Le temps de s'ennuyer
Le temps de rêver
Le temps de l'agonie
Le temps qu'on perd
Le temps d'aimer
Le temps des cerises
Le mauvais temps
Et le bon et le beau
Et le froid et le temps chaud
Le temps de se retourner
Le temps des adieux
Le temps qu'il est bien temps
Le temps qui n'est même pas
Le temps de cligner de l'œil
Le temps relatif
Le temps de boire un coup
Le temps d'attendre
Le temps du bon bout
Le temps de mourir
Le temps qui ne se mesure pas
Le temps de crier gare
Le temps mort
Et puis l'éternité
Poèmes et poésies
Philippe Soupault
Éd. Grasset, coll. « Les Cahiers rouges », 1987.
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jeudi, 25 décembre 2008
Noel
Dis, Bébé, ce que ta menotte
Trouva ce matin dans la botte
Près de ton petit berceau doux?
Joujoux !
Confiez-nous aussi, ma chère,
Ce que dans la mule légère
Noël a déposé pour vous ?
Bijoux !
Et devant l'âtre misérable
Qu'as-tu trouve, toi, pauvre diable,
Au fond de tes deux souliers roux ?
Des trous !
Miguel Zamacoïs (1866 -1955).
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lundi, 04 août 2008
De la rose de marbre à la rose de fer
La rose de marbre immense et blanche était seule sur la place déserte
Où les ombres se prolongeaient à l'infini.
Et la rose de marbre seule sous le soleil et les étoiles était la reine de la Solitude
Et sans parfum la rose de marbre sur sa tige rigide au sommet du piédestal de
Granit ruisselait de tous les flots du ciel.
La lune s'arrêtait pensive en son cœur glacial et les déesses des jardins les déesses
Fe marbre à ses pétales venaient éprouver leurs seins froids.
La rose de verre résonnait à tous les bruits du littoral.
Il n'était pas un sanglot de vague brisée qui ne la fît vibrer.
Autour de sa tige fragile et de son cœur transparent des arcs en ciel tournaient
Avec les astres.
La pluie glissait en boules délicates sur ses feuilles que parfois le vent faisait gémir à L'effroi des ruisseaux et des vers luisants.
Le rose de charbon était un phénix nègre que la poudre transformait en rose de feu. Mais sans cesse issue des corridors ténébreux de la mine où les mineurs
La recueillaient avec respect pour la transporter au jour dans sa gangue d'anthracite la Rose de charbon veillait aux portes du désert.
La rose de papier buvard saignait parfois au crépuscule
Quand le soir à son pied venait s'agenouiller.
La rose de buvard gardienne de tous les secrets et mauvaise conseillère
Saignait un sang plus épais que l'écume de mer et qui n'était pas le sien.
La rose de nuages apparaissait sur les villes maudites à l'heure des
Éruptions de volcans à l'heure des incendies à l'heure des émeutes et
Au-dessus de Paris quand la commune y mêla les veines irisées du
Pétrole et l'odeur de la poudre. Elle fut belle au 21 janvier belle au
Mois d'octobre dans le vent froid des steppes belle en 1905 à l'heure
Des miracles à l'heure de l'amour.
La rose de bois présidait aux gibets.
Elle fleurissait au plus haut de la guillotine puis dormait dans la mousse
À l'ombre immense des champignons.
La rose de fer avait été battue durant des siècles par des forgerons d'éclairs.
Chacune de ses feuilles était grande comme un ciel inconnu.
Au moindre choc elle rendait le bruit du tonnerre.
Mais qu'elle était douce aux amoureuses désespérées la rose de fer.
La rose de marbre, la rose de verre, la rose de charbon, la rose de papier
Buvard la rose de nuages, la rose de bois, la rose de fer refleuriront
Toujours mais aujourd'hui elles sont effeuillées sur ton tapis.
Qui es-tu ? toi qui écrases sous tes pieds nus les débris fugitifs de la rose de marbre, de la rose de verre, de la rose de charbon, de la rose de papier buvard, de la rose de Nuages, de la rose de bois, de la rose de fer.
Robert Desnos ("Les Ténèbres", XXIV)
Extraits de Corps et biens (1930)
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vendredi, 25 juillet 2008
Dormir sept ans ... ou l'éternité
Au gré des mots qui passent
Nous construisons mausolée,
Palais des mille vocables,
Ignorant sens et serrure :
Ainsi neige opaque
Obtiendra
Âme, cœur, temps
Le plancher grince
Dès qu'un rat devient
Sombre animal défunt.
Nous ouvrons la fenêtre ;
Chauve-souris s'installent
Près des tocsins, des chamades.
Jacques Izoard
Dormir sept ans (Coll. Clepsydre)
Je rentre de quelques jours de vacances au vert, et me précipite lire le Monde délaissé pendant une semaine. Habituellement je jette un œil distrait sur la page "carnet", mais cette fois-ci, mon regard s'attarde. Un poète, Jacques Izoard, est mort !
Connais pas, normal, je n'ai découvert la poésie qu'assez récemment. Pourtant son œuvre comprend plus d’une cinquantaine de livres et plaquettes !
Alors google me livrera peut être quelques uns de ces poèmes ? Pourquoi pas celui-ci, de son recueil Vêtu, dévêtu, libre paru en 1978
Passage à langue
D'ombre à langue, un seul quinquet
Celui de la petite parole
ou de la petite pupille.
Petite langue à la serpe.
Languette douce, langue de papier.
Langue de boucher, de vitrier.
Langue de musée du verre étoilé.
Deux langues disent la voix
d'un double corps d'épouse.
Langue de dimanche au soleil.
Langue à l'affût des langues,
des dards, des verges et des glus.
J'avance la langue vers toi,
pli très doux du vertige.
Je la loge entre les lèvres
les plus aveugles du corps.
Le bleu tassé inonde
ventre et bouche ensevelis.
Mais l'herbe en masse
étourdit le dormeur.
Le chemin de salive
a longé la forêt.
Langue dodue, langue d'ailleurs.
J'arrache la voix du crieur.
J'avale la voix du voleur.
Jacques Izoard
Vêtu, dévêtu, libre
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vendredi, 07 mars 2008
LE 7 MARS, GRAND JOUR DU POEME A L'AUTRE!
Pour célébrer la dixième édition du printemps des poètes,
qui a lieu dans toute la France du 3 au 16 mars,
chez vous, au travail, à l'école, dans la rue…
offrez, échangez vos poèmes, postez un poème, glissez un poème sous la porte,
ceci ou cela ... mais donnez un poème à l'autre !
Moi, je vous en offre ce texte de mon auteur préféré ...
FRATERNITE
Je rêve l'équité, la vérité profonde,
L'amour qui veut, l'espoir qui luit, la foi qui fonde,
Et le peuple éclairé plutôt que châtié.
Je rêve la douceur, la bonté, la pitié,
Et le vaste pardon. De là ma solitude.
Victor Hugo
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lundi, 03 mars 2008
LA PLUS ETRANGE CREATURE AU MONDE
Aujourd'hui commence le 10ème printemps des poètes sur le thème "l'éloge de l'autre".
J'aime ce poème de Nazim HIKMET, surtout quand il est dit par Yves Montand
Tu es comme le scorpion
Dans une nuit d’épouvante.
Comme le moineau, mon frère,
Tu es comme le moineau
Dans ses menues inquiétudes.
Comme la moule, mon frère,
Tu es comme la moule
Enfermée et tranquille.
Tu es terrible, mon frère,
Comme la bouche d’un volcan éteint.
Et tu n’es pas un, hélas,
Tu n’es pas cinq,
Tu es des millions.
Tu es comme le mouton, mon frère,
Quand le bourreau habillé de ta peau
Quand le bourreau lève son bâton
Tu te hâtes de rentrer dans le troupeau
Et tu vas à l’abattoir en courant, presque fier.
Tu es la plus drôle des créatures, en somme,
Plus drôle que le poisson
Qui vit dans la mer sans savoir la mer.
Et s’il y a tant de misère sur terre
C’est grâce à toi, mon frère,
Si nous sommes affamés, épuisés,
Si nous somme écorchés jusqu’au sang,
Pressés comme la grappe pour donner notre vin,
Irai-je jusqu’à dire que c’est de ta faute, non
Mais tu y es pour beaucoup, mon frère.
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