mardi, 06 janvier 2009
La France a froid ! "Mes amis, au secours !"
Alerte météo : 27 départements en vigilance orange neige-verglas, et on nous annonce que l'on va descendre en dessous de -10° à partir de mercredi ! vols annulés au départ de l'aéroport de Roissy et quelque 1.600 passagers qui n'ont pu embarquer au cours de la journée sont hébergés dans l'aéroport. La consommation française d'électricité a atteint un record historique ce lundi soir à 19h à 90.200 mégawatts, et la consommation pourrait même culminer à près de 91.000 MW mardi 6 et mercredi 7 janvier, selon RTE ... Bref, la France a froid ! "Mes amis, au secours !" criait l'abbé Pierre en 1954 ... et pourtant cette semaine encore, la mort de nombre de sans-logis, recroquevillés sous le gel, sans toit, sans pain, plus d’un presque nu, ouvrira les actualités du 20 heures.
Mais se souvient-on qu'il y a exactement 3 siècles, un hiver exceptionnellement froid s'abattait sur la France ? L'hiver de 1709 fut sans doute l'un des plus terribles. Les indications relevées dans les registres paroissiaux permettent d'établir une température de – 28° à – 30°C.
Dans les campagnes, les paysans grelottent et la famine menace. Les arbres éclatent sous l'effet du gel, les animaux crèvent à l'étable, la terre est si dure qu'il faut enterrer provisoirement les morts nombreux dans l'intérieur des églises. A Versailles, les cheminées, mal conçues, ne parviennent pas à réchauffer les appartements royaux. Des domestiques indiquent dans leurs mémoires que "le vin du roi gelait dans les carafes" et que "celui-ci l’exposait à la chaleur des flammes pour en boire". Louis XIV renonce un temps à ses sorties quotidiennes et demeure cloîtré dans ses logements. Son petit-fils, le duc de Berry, n’a pas la sagesse de l’imiter. Malgré les rigueurs de l’hiver, il part chasser dans la forêt de Versailles. L’un de ses valets, porteur des fusils royaux, revient au palais les doigts en si mauvais état qu’il faut l’amputer d’urgence …
La vague de froid est particulièrement incroyable entre le 10 et le 21 janvier. Les températures, de jour comme de nuit tournent alors autour de -20 ° à Paris. Vers les 13 et 14 janvier des températures descendent jusqu'à -23° et une température de -26° est enregistrée à Paris. A Bordeaux les températures descendent jusqu'à -20,5°, à Montpellier jusqu'à -16 ° et à Marseille jusqu'à –17,5°. Fleuves et rivières sont gelés, même le Rhône. La mer est bloquée par les glaces dans les ports et sur les côtes. Fin février la température est encore de -6,9° puis en mars elle remonte de quelques degrés. Le 15 mars débute alors une spectaculaire débâcle de la Seine générant une importante inondation rendant encore impossible le ravitaillement de Paris. La Seine entre en crue. Ses flots impétueux emportent dans leur course de nombreuses embarcations qui se fracassent violemment contre les piliers des ponts. Le 5 avril, Paris est approvisionné pour la première fois depuis trois mois ! Mais le constat est épouvantable, toutes les récoltes sont pourries. Le 23 avril, par arrêté royal, Louis XIV autorise à ressemer chaque parcelle de terrain.
De nombreux lettres, mémoires, et registres paroissiaux attestent de l'horreur de cet hiver 1709.
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jeudi, 01 janvier 2009
Meilleurs voeux
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mercredi, 31 décembre 2008
Tant de temps
Aujourd'hui, fin de l'année ...
Le temps qui passe
Le temps qui ne passe pas
Le temps qu'on tue
Le temps de compter jusqu'a dix
Le temps qu'on n'a pas
Le temps qu'il fait
Le temps de s'ennuyer
Le temps de rêver
Le temps de l'agonie
Le temps qu'on perd
Le temps d'aimer
Le temps des cerises
Le mauvais temps
Et le bon et le beau
Et le froid et le temps chaud
Le temps de se retourner
Le temps des adieux
Le temps qu'il est bien temps
Le temps qui n'est même pas
Le temps de cligner de l'œil
Le temps relatif
Le temps de boire un coup
Le temps d'attendre
Le temps du bon bout
Le temps de mourir
Le temps qui ne se mesure pas
Le temps de crier gare
Le temps mort
Et puis l'éternité
Poèmes et poésies
Philippe Soupault
Éd. Grasset, coll. « Les Cahiers rouges », 1987.
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mardi, 30 décembre 2008
Recette de la dinde au Whisky
Une recette gentiment transmise par une amie pour la période des fêtes ! Certains la connaissent peut-être déjà mais on ne s'en lasse pas. Et pour ceux qui n'aiment pas le whisky, un autre alcool pourra faire l'affaire ... Attention, c'est une recette un peu longue, s'y prendre assez tôt pour être prêt pour le réveillon !
Les ingrédients (pour 7-8 personnes):
- dinde de 5 kg environ
- 1 bouteille de whisky (ou 2)
- sel, poivre
- huile d'olive
- bardes de lard
- aqua selzer et aspirine
Préparation : 6 heures 40 minutes.
Difficulté : Très difficile.
Coût : Plat de fête
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dimanche, 28 décembre 2008
La révolte des joujoux
Ma mère, qui était fan d'André Dassary, me chantait cette berceuse ...
On vient d'éteindre la lumière
Bébé succombe à son sommeil
Mais les joujoux très en colère
Dans leur placard tiennent conseil
Les joujoux font grève, ils en ont assez
D'être tracassés et fracassés
Le ballon qu'on crève
La poupée qu'on bat
Son lassés des jeux et des combats
Le pompier n'a plus d'échelle
Le tambour est plein de trous
Le cheval n'a plus de selle
Et l'auto n'a plus de roue
Mais ils se soulèvent contre cet enfant
Il va voir comment on se défend
Le placard entrouvre sa porte
Ça grince un peu, ma fois tant pis
Et voilà que les joujoux sortent
Sautant sans bruit sur le tapis
Les joujoux discutent pour savoir comment
Ils vont préparer leurs armements
Pour mener la lutte un chef est nommé
C'est un vieil indien tout déplumé
Le pompier fourbit sa lance
Le tambour bat le rappel
Le cheval déjà s'élance
Le moment est solennel
Quittant leur cahute ils forment les rangs
Le mot d'ordre étant : "mort au tyran"
Le chef a dit marchons en ordre
Vers celui qui nous démolit
Pour le griffer et pour le mordre
Nous grimperons aux draps de lit
Mais l'enfant sommeille
Tendre et gracieux
Comme un chérubin tombé des cieux
Devant ces merveilles, les joujoux surpris
Se sont arrêtés tout attendris
Le pompier dit : "tout de même
Un bébé c'est bien gentil"
Le tambour dit :"moi je l'aime"
Alors ils sont repartis
Quand l'enfant s'éveille
Vers huit heures un quart
Les joujoux sont tous
Dans le placard !
paroles de Christian Webel, musique de Claude Pingault - 1936
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vendredi, 26 décembre 2008
Morale du joujou
En cette période de Noël, un petit extrait d'un texte de Charles Baudelaire ... l'intégralité de ce texte sur http://www.bmlisieux.com/litterature/baudelaire/moraljou....
"Le joujou est la première initiation de l'enfant à l'art, ou plutôt c'en est pour lui la première réalisation, et, l'âge mûr venu, les réalisations perfectionnées ne donneront pas à son esprit les mêmes chaleurs, ni les mêmes enthousiasmes, ni la même croyance.
Et même, analysez cet immense mundus enfantin, considérez le joujou barbare, le joujou primitif, où pour le fabricant le problème consistait à construire une image aussi approximative que possible avec des éléments aussi simples, aussi peu coûteux que possible : par exemple le polichinelle plat, mû par un seul fil ; les forgerons qui battent l'enclume ; le cheval et son cavalier en trois morceaux, quatre chevilles pour les jambes, la queue du cheval formant un sifflet et quelquefois le cavalier portant une petite plume, ce qui est un grand luxe ; - c'est le joujou à cinq sous, à deux sous, à un sou. - Croyez-vous que ces images simples créent une moindre réalité dans l'esprit de l'enfant que ces merveilles du jour de l'an, qui sont plutôt un hommage de la servilité parasitique à la richesse des parents qu'un cadeau à la poésie enfantine ?
Tel est le joujou du pauvre. Quand vous sortirez le matin avec l'intention décidée de flâner solitairement sur les grandes routes, remplissez vos poches de ces petites inventions, et le long des cabarets, au pied des arbres, faites-en hommage aux enfants inconnus et pauvres que vous rencontrerez. Vous verrez leurs yeux s'agrandir démesurément. D'abord ils n'oseront pas prendre, ils douteront de leur bonheur ; puis leurs mains happeront avidement le cadeau, et ils s'enfuiront comme font les chats qui vont manger loin de vous le morceau que vous leur avez donné, ayant appris à se défier de l'homme. C'est là certainement un grand divertissement.
À propos du joujou du pauvre, j'ai vu quelque chose de plus simple encore, mais de plus triste que le joujou à un sou, - c'est le joujou vivant. Sur une route, derrière la grille d'un beau jardin, au bout duquel apparaissait un joli château, se tenait un enfant beau et frais, habillé de ces vêtements de campagne pleins de coquetterie. Le luxe, l'insouciance, et le spectacle habituel de la richesse rendent ces enfants-là si jolis qu'on ne les croirait pas faits de la même pâte que les enfants de la médiocrité ou de la pauvreté. À côté de lui gisait sur l'herbe un joujou splendide aussi frais que son maître, verni, doré, avec une belle robe, et couvert de plumets et de verroterie. Mais l'enfant ne s'occupait pas de son joujou, et voici ce qu'il regardait : de l'autre côté de la grille, sur la route, entre chardons et orties, il y avait un autre enfant, sale, assez chétif, un de ces marmots sur lesquels la morve se fraye lentement un chemin dans la crasse et la poussière. À travers ces barreaux de fer symboliques, l'enfant pauvre montrait à l'enfant riche son joujou, que celui-ci examinait avidement comme un objet rare et inconnu. Or ce joujou que le petit souillon agaçait, agitait et secouait dans une boîte grillée, était un rat vivant ! Les parents par économie, avaient tiré le joujou de la vie elle-même."
BAUDELAIRE, Charles (1821-1867) : Morale du joujou (in Le Monde littéraire, 17 avril 1853).
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jeudi, 25 décembre 2008
Noel
Dis, Bébé, ce que ta menotte
Trouva ce matin dans la botte
Près de ton petit berceau doux?
Joujoux !
Confiez-nous aussi, ma chère,
Ce que dans la mule légère
Noël a déposé pour vous ?
Bijoux !
Et devant l'âtre misérable
Qu'as-tu trouve, toi, pauvre diable,
Au fond de tes deux souliers roux ?
Des trous !
Miguel Zamacoïs (1866 -1955).
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mercredi, 03 décembre 2008
"La France c’est comme une mobylette, pour avancer il lui faut du mélange."
Il y a 25 ans, le 3 décembre 1983, quelques personnes parties de Marseille le 15 octobre, et des dizaines de milliers d’autres qui les avaient rejoints arrivaient à Paris après un périple de 1.700 kilomètres, dans la liesse et l’espoir d’une reconnaissance de leur identité et de leur volonté d’intégration ... 100.000 personnes accueillent la Marche contre le racisme, rebaptisée "Marche des beurs"
"Est-ce parce que certains en mettent dans le couscous ?" ironise Coluche dans son chmilblik. Mais eux ne rigolent pas. Ils marchent, parlent, expliquent, arpentent les cités, rencontrent les associations, secouent les rares élus qui les reçoivent, et plantent le mot égalité sur le terrain du racisme. Un mouvement est né.
A la bastille ce 3 décembre, on s'enlace, on s'embrasse, on chante "douce France" avec Rachid Taha et le groupe Carte de Séjour, on scande le slogan qui depuis des semaines a ouvert la marche des beurs: "La France, c'est comme une Mobylette, pour avancer, il faut du mélange."
L'histoire a commencé à l'été 1981 à Vénissieux, entre les tours des Minguettes. Dans les banlieues ouvrières, à Lyon comme ailleurs, la crise avec son lot de licenciements et de fermetures d’usines, aggrave les tensions et chasse les habitants. Aux Minguettes sur 9 200 logements, 2 000 à 3 000 sont vides. Alors, les jeunes "rouillent" au bas des tours, s’approprient caves ou appartements vides, et se débrouillent pour vivre. A défaut de travail, ils trouvent d’autres sources de revenus, plus ou moins licites. Mitterrand vient d’être élu, la gauche est au pouvoir et le gouvernement compte quatre ministres communistes. Les révoltes de la banlieue lyonnaise apparaissent alors comme les signes ultimes d’une période révolue. Mais les affrontements entre les jeunes et la police dans les banlieues de l’est lyonnais, médiatisés à travers les fameux "rodéos" automobiles, prennent un tournant politique. En effet, la droite, encore sous le coup de sa déroute électorale de 1981, a décidé de relever la tête en attaquant le gouvernement sur la question de l’immigration et de la sécurité. "Il faut arrêter cette invasion par une véritable politique de l’immigration [...]. Nous demandons l’expulsion des faux étudiants et des délinquants", lit-on par exemple dans les tracts de la liste UDF-RPR à Paris. À Grenoble, d’autres dénoncent les origines arabes du maire, Hubert Dubedout, battu par Alain Carignon au premier tour. Et mars 1983 marque la première percée du Front national dans plusieurs villes : dans le XXème arrondissement de Paris, où Jean-Marie Le Pen recueille plus de 11% des voix, et à Dreux où le RPR René-Jean Fontanille et le FN Jean-Pierre Stirbois présentent une liste commune au premier tour qui rassemble près de 31% des voix.
La haine aussi, qui ne se contient plus : rodéos au pied des tours, jets de pierres, voitures incendiées, policiers à cran qui rôdent, à la recherche surtout de jeunes issus de l’immigration qu’ils considèrent avant tout comme des "délinquants étrangers", et qui ne pardonnent pas au pouvoir socialiste d'avoir aboli la peine de mort, ni les nouvelles dispositions législatives protégeant les étrangers arrivés avant l’âge de dix ans et coupables de petits délits.
Mi mars, juste après les élections, le meurtrier du jeune Ahmed Boutelja de Bron est remis en liberté. Le surlendemain, une imposante descente de police aux Minguettes pour une histoire de recel se transforme en affrontement collectif. Les violences policières mettent le feu aux poudres, et les policiers sont obligés de battre en retraite. Les jours suivants, leurs syndicats se lancent dans une virulente campagne publique, menacent le pouvoir d’"actes d’indiscipline" et exigent "la reprise des expulsions et des peines exemplaires pour les meneurs et leurs complices, des opérations systématiques de police avec de nombreux effectifs équipés de moyens pour le maintien de l’ordre", ainsi que "le quadrillage de la commune".
Dans ce contexte, une douzaine de jeunes décident d’une grève de la faim pour interpeller les pouvoirs publics sur une situation qui peut dégénérer à tout moment. Ils créent l’association SOS Avenir Minguettes et formulent une série de revendications concernant la police ou la justice, mais également la réhabilitation de la ZUP. Sur le terrain, les incidents se multiplient. A quelques jours de la destruction spectaculaire d’une première tour à Monmousseau, le 9 juin, la police fait une descente brutale dans le petit centre commercial et arrête Kamel, un des grévistes de la faim. Le 20 juin 1983, la police intervient de nouveau, elle lâche ses chiens. L'un d'entre eux attaque un jeune garçon. Toumi Djaidja tente d'éloigner l'animal. Un policier tire.
Pendant ce temps, éclate "l’été meurtrier" : Aux quatre coins de France, les crimes racistes se multiplient. Ce sont 19 maghrébins qui sont tués et plus d’une vingtaine blessés. Parmi eux, on dénombre beaucoup de jeunes, touchés par des balles tirées depuis les fenêtres du "Haut-du-Lièvre" à Nancy, des "3000" à Aulnay, des "Francs-Moisins" à Saint-Denis... A la cité "des 4000" de La Courneuve, c'est le drame, un habitant excédé vise un groupe d'enfants avec sa carabine, Toufik, 9 ans, tiré comme un pigeon, tombe au pied de sa barre la veille du 14 juillet. Au "Matin de Paris", les journalistes titrent "L'été des tontons-flingueurs". Un choc pour les jeunes issus de l’immigration qui n'ont que le mot égalité à la bouche. A côtés de ces jeunes se trouvent le père Christian Delorme, celui qu’on appelle le curé des Minguettes, et le pasteur Jean Costil. Surgit l’idée d’une marche sur une inspiration de Martin Luther King ou de Gandhi. . Deux revendications principales : une carte de séjour de dix ans et le droit de vote pour les étrangers
Mais il faut un peu de patience, une initiative d’une telle ampleur, ça s’organise. Les jeunes délèguent l’organisation à la Cimade de Lyon, ainsi qu’au MAN (mouvement pour une alternative non-violente). Christian Delorme et le pasteur Jean Costil obtiendront l’appui des réseaux chrétiens, humanistes et anti-racistes qui avaient permis à leur grève de la faim d’avril 1981 contre les expulsions d’aboutir. Le soutien des protestants, bien représentés au gouvernement, sera aussi particulièrement important pour la suite.
Voilà donc les jeunes de Vénissieux qui rejoignent ceux des quartiers Nord de Marseille. C’est parti. Dans l’indifférence quasi générale. A gauche, on s’en méfie, on les soupçonne même de vouloir gêner le gouvernement de Pierre Mauroy. La marche part de Marseille avec 32 personnes le 15 octobre 1983. Une seule personne, un étudiant les accueille à Salon de Provence, mais quelques jours plus tard, ils sont reçus par un millier de jeunes à Lyon, les partis de gauche appellent leurs militants à rejoindre les marcheurs et quelque soixante-dix associations, partis politiques et organisations syndicales apportent leur soutien. Des comités de soutien sont créés dans toute la France, qui récoltent des dons pour financer hébergement et repas. Bientôt, après les députés et les maires qui les reçoivent, ce sont des personnalités qui font quelques kilomètres avec eux, à commencer par Edmond Maire, le secrétaire général de la CFDT, puis Georgina Dufoix, alors ministre de la Famille, de la Population et des Travailleurs immigrés, Jack Lang, Monseigneur Lustiger ... mais ce sont donc les marcheurs qui décident et qui prennent la parole à chaque étape, davantage sur le mode affectif que politique. Craignant le risque de "récupération", ils interdisent banderoles et slogans jugés trop polémiques.
cependant les racistes ne désarment pas et pendant la marche, dont un des slogans est "Rengainez, on arrive", on apprend coup sur coup l'assassinat d'Habib Grimzi, un jeune algérien en visite chez sa famille à Bordeaux, jeté du train Bordeaux-Vintimille pendant la nuit du 14 novembre, après avoir été torturé par trois jeunes Français en route pour rejoindre la Légion étrangère, le meurtre d’un Maghrébin de 17 ans, tué par balles aux Minguettes, et d’autres incidents, toujours aux Minguettes ... A l’arrivée, 60 000 personnes défilent aux côtés des marcheurs avec les portraits des victimes des crimes racistes et sécuritaires, en scandant "Egalité des droits, justice pour tous", le gouvernement et des élus républicains des deux bords rejoignent en fanfare les marcheurs et 100 000 personnes envahissent la place de la Bastille, sous un beau ciel bleu. Georgina Dufoix, ministre des affaires sociales, assure que de nouvelles mesures contre le racisme vont être prises. Le président Mitterrand reçoit les marcheurs à l’Elysée (sauf, tout de même, les porteurs d’une inscription au casier judiciaire...) pendant trois quarts d’heure et annonce la création prochaine de la carte unique de dix ans pour les étrangers, (en remplacement des cartes de séjour et de travail), et "des mesures de principe pour que justice soit rendue aux jeunes victimes et à leur famille" (limitation des ventes d’armes, possibilité pour les associations de quartier de se constituer partie civile dans les affaires de crimes racistes, etc., mais il se contente de leur dire que le droit de vote pour les étrangers est "une de ses préoccupations". Vers 21 heures, ils reviennent à l’Espace Balard où se déroule une fête. La soirée est douce. Le rêve fou de quelques beurs obscurs et méprisés se transforme en formidable fête républicaine dont ils sont les héros. La "génération beur" vient-elle de naître ? Ils auraient tellement aimé le croire ...
Trois semaines seulement après l’euphorie de la Marche, les affrontements raciaux entre grévistes et non-grévistes à Talbot-Poissy sonnent déjà le glas de l’idylle. Les marcheurs soutiennent les travailleurs immigrés licenciés, signifiant par là-même leur refus de jouer la division entre les enfants, accueillis à bras ouverts au sein de la République, et les parents O.S. virés par milliers des usines.
Le 17 juillet 1984, l’Assemblée Nationale vote à l’unanimité la création d’une carte de résident de dix ans, délivrée "de plein droit" aux étrangers vivant en France. Mais dès le 4 décembre, le décret d’application lui adjoint une série de conditions restrictives, exigeant que les demandeurs fournissent la preuve de leur entrée régulière sur le territoire. En six mois, la principale conquête de la "Marche des Beurs" est venue buter sur la raison administrative, inaugurant vingt cinq ans d’une coexistence amère, et d’une politique d’immigration toujours plus suspicieuse ... jusqu'à mélanger les questions d'identité nationale avec d'autres questions, qui tiennent à l'origine !
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lundi, 01 septembre 2008
Big brother (ou plutôt Edvige) is watching you !!!
Photo de Vic Polsinelli sur http://www.vicgallery.com
"Monsieur le procureur de la République,
J'ai l'honneur de porter ci-dessous à votre connaissance une liste d'individus, groupes, organisations et personnes morales, dont moi, qui, en raison de leur activité individuelle ou collective, sont susceptibles de porter atteinte à l'ordre public.
Cette liste est disponible sur le site de la pétition "Non à Edvige!", circulant sur Internet.
Veuillez agréeer, Monsieur le procureur de la République, mes plus viles salutations."
Car signer une pétition contre un fichier destiné à "protéger l'ordre public", ne serait-ce pas déjà se montrer susceptible de troubler l'ordre public ? Il faut donc absolument dénoncer tous les signataires de la pétition anti-Edvige qui méritent légalement de figurer sur ce fichier. Combien de noms déjà ? Plus de 90 000 ! Une bonne prise n'est-ce pas ? Non mais !!!
Car depuis le début de l'été, associations et syndicats se mobilisent contre le fichier Edvige (littéralement: Exploitation documentaire et valorisation de l'information générale), appelant à signer la pétition "Non à Edvige!" circulant sur Internet, et un recours a été déposé vendredi devant le Conseil d'Etat pour obtenir le retrait pur et simple de ce nouveau fichier considéré comme «liberticide»
Jusqu’ici étaient fichées "les personnes majeures qui, par leurs actions violentes, étaient susceptibles de porter atteinte à la sûreté de l’Etat". Eh bien désormais le gouvernement, c'est-à-dire les renseignements généraux et les services de police, et non pas la justice (or, en démocratie, c’est le juge qui est le garant des libertés individuelles), pourront ficher les personnes "susceptibles de porter atteinte à l'ordre public". Ainsi, participer à une manifestation sera, selon le texte, une raison suffisante pour être fiché …
Le texte vise également toute personne "ayant sollicité, exercé ou exerçant un mandat politique, syndical ou économique ou qui joue un rôle institutionnel, économique, social ou religieux significatif." ... Bref, tout citoyen (et d'ailleurs aussi toute institution) faisant preuve ou ayant fait preuve d'un quelconque engagement dans la vie sociale ! Et ce à partir de l'âge de ... 13 ans ! Dont on stockera et croisera les informations d'état civil, de profession, les signes physiques particuliers, les photographies, le "comportement", l'immatriculation des véhicules, les adresses, numéros de téléphone et adresses électroniques, informations fiscales et patrimoniales, les déplacements, etc. ... ce qui n'est pas sans rappeler les fiches du ministre Foucher qui comportait renseignements, dénonciations et calomnies sur tout individu suspecté de ne pas être un bon sujet de l’Empire.
Et comme si cela n'est pas suffisant, on stockera aussi les données relatives à leur environnement, notamment aux personnes "entretenant ou ayant entretenu des relations directes et non fortuites avec elle.... Donc, si vous côtoyez une personne susceptible de "porter atteinte à l’ordre public", par exemple votre frère ou votre sœur qui manifeste contre la vie chère, vous pourrez être fiché.
Et qui aura accès à ces infos ? Réponse simple, tout le monde ou presque ! Puisque en plus des services spécialisés (services d'information générale de la direction centrale de la sécurité publique ou des directions départementales de la sécurité publique), le texte prévoit aussi "tout autre agent d'un service de la police nationale ou de la gendarmerie nationale, sur demande expresse" ... seule limite prévue par le décret : "dans la limite du besoin d'en connaître". Tu parles d’une garantie !
Vous n'y croyez pas ? eh bien cliquez ici pour télécharger le décret créant ce fameux fichier EDVIGE
Big brother is watching you !!! Fait rare, la Commission Nationale Informatique et libertés, a publié un communiqué faisant part de ses désaccords.
Alors signez et faites signez la pétition "Non à EDVIGE!" , qui regroupe près de 700 organisations, collectifs, partis et syndicats contre ce fichier qui institue un niveau de surveillance des citoyens totalement disproportionné et incompatible avec une conception digne de ce nom de l’état de droit.
A suivre : le 9 septembre, conférence de presse publique du collectif "Non à EDVIGE", à 11 heures à la Bourse du travail.
03:08 Publié dans coup de gueule | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
lundi, 04 août 2008
De la rose de marbre à la rose de fer
La rose de marbre immense et blanche était seule sur la place déserte
Où les ombres se prolongeaient à l'infini.
Et la rose de marbre seule sous le soleil et les étoiles était la reine de la Solitude
Et sans parfum la rose de marbre sur sa tige rigide au sommet du piédestal de
Granit ruisselait de tous les flots du ciel.
La lune s'arrêtait pensive en son cœur glacial et les déesses des jardins les déesses
Fe marbre à ses pétales venaient éprouver leurs seins froids.
La rose de verre résonnait à tous les bruits du littoral.
Il n'était pas un sanglot de vague brisée qui ne la fît vibrer.
Autour de sa tige fragile et de son cœur transparent des arcs en ciel tournaient
Avec les astres.
La pluie glissait en boules délicates sur ses feuilles que parfois le vent faisait gémir à L'effroi des ruisseaux et des vers luisants.
Le rose de charbon était un phénix nègre que la poudre transformait en rose de feu. Mais sans cesse issue des corridors ténébreux de la mine où les mineurs
La recueillaient avec respect pour la transporter au jour dans sa gangue d'anthracite la Rose de charbon veillait aux portes du désert.
La rose de papier buvard saignait parfois au crépuscule
Quand le soir à son pied venait s'agenouiller.
La rose de buvard gardienne de tous les secrets et mauvaise conseillère
Saignait un sang plus épais que l'écume de mer et qui n'était pas le sien.
La rose de nuages apparaissait sur les villes maudites à l'heure des
Éruptions de volcans à l'heure des incendies à l'heure des émeutes et
Au-dessus de Paris quand la commune y mêla les veines irisées du
Pétrole et l'odeur de la poudre. Elle fut belle au 21 janvier belle au
Mois d'octobre dans le vent froid des steppes belle en 1905 à l'heure
Des miracles à l'heure de l'amour.
La rose de bois présidait aux gibets.
Elle fleurissait au plus haut de la guillotine puis dormait dans la mousse
À l'ombre immense des champignons.
La rose de fer avait été battue durant des siècles par des forgerons d'éclairs.
Chacune de ses feuilles était grande comme un ciel inconnu.
Au moindre choc elle rendait le bruit du tonnerre.
Mais qu'elle était douce aux amoureuses désespérées la rose de fer.
La rose de marbre, la rose de verre, la rose de charbon, la rose de papier
Buvard la rose de nuages, la rose de bois, la rose de fer refleuriront
Toujours mais aujourd'hui elles sont effeuillées sur ton tapis.
Qui es-tu ? toi qui écrases sous tes pieds nus les débris fugitifs de la rose de marbre, de la rose de verre, de la rose de charbon, de la rose de papier buvard, de la rose de Nuages, de la rose de bois, de la rose de fer.
Robert Desnos ("Les Ténèbres", XXIV)
Extraits de Corps et biens (1930)
19:06 Publié dans poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |